> 27 janvier 2024
Liens du sang… une nouvelle cruelle d’Irène Némirovsky.1 La famille y est passée à la moulinette, tout en sachant qu’il n’existe rien de mieux sur terre.
Anna Demestre aime ses enfants (Albert, Augustin, Alain et Mariette) avec passion et ses brus (Sabine, Claire et Alix) avec discernement. Cette vieille dame ne souhaite qu’une chose : que l’entente règne au sein de la fratrie, comme au temps de la petite enfance.
Mariette est une ex-jolie blonde, trop vite fanée. Mariée, puis divorcée, Mariette n’est pas faite pour le bonheur conjugal. Elle est faite, en revanche, pour la consommation de cosmétiques… sans limites !
Claire et Alix, les deux sœurs, ont épousé les deux frères, Augustin et Alain. Anna connaît toute la perfidie de ces deux femmes, qui aiment dresser les frères les uns contre les autres. Anna sait bien, d’ailleurs, que si Claire et Alix ont renoncé au maquillage, c’est uniquement pour jeter une pierre dans le jardin cosmétique de leur belle-sœur, Mariette. « Elles étaient toutes deux extrêmement belles, avec de lourds cheveux noirs qu’elles n’avaient jamais consenti à couper, un teint blanc, sans fard. Cela même lui déplaisait : elle sentait bien que, si Claire et Alix ne se fardaient pas, c’était moins par goût personnel que comme une protestation contre les joues peintes de Mariette. » Des joues trop pâles, des lèvres décolorées… Anna trouve que, vraiment, ces deux-là en font un peu trop pour jeter le discrédit sur la petite Mariette.
Des nuits à veiller sa vieille maman grippée. Puis, la guérison subite… Ce n’est pas Anna qui est morte ; ce sont ces fils qui, par manque de sommeil, sont comme morts. « Oui. Je suis mort. Un bain et mon lit. »
Une famille unie… du moins en façade. Des petites piques, en douce, en direction de la belle-mère ou des belles-filles, histoire d’entretenir l’affection. Irène dresse ici le tableau terrible d’une famille dont les membres s’adorent, mais se déchirent aussi. C’est la vie ! Et les cosmétiques dans tout ça ? Des produits, pas si inoffensifs que cela qui se retrouvent, parfois, au centre de conflits familiaux !
Un grand merci à Jean-Claude A. Coiffard, poète et plasticien, pour son illustration du jour.
1 Némirovsky I., Les liens du sang in Dimanche et autres nouvelles, Stock, 2005, 371 pages