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L’hygiène du commissaire, c’est Frédéric Dard qui tient la savonnette !

> 07 juillet 2024

L’hygiène du commissaire, c’est Frédéric Dard qui tient la savonnette !

Rien compris à cette histoire… Descendez-le à la prochaine est un roman à y perdre un latin que l’on maitrise à peine.1 Le commissaire San Antonio est chargé de trouver, dans une morgue, un mort dont on lui donne les caractéristiques physiques. Il doit, en outre, retrouver un chargé d’ambassade russe qui aurait disparu. Pour le coup, le commissaire n’a aucun détail, quant à l’aspect de celui qu’il est chargé de débusquer. Le commissaire (qui se balade dans cet opus sous le nom de Jean Nikaus et/ou de Jean Martin) doit aller déposer le cadavre dans la propriété d’un Allemand, nommé Bunks. L’idée est de faire croire à Bunks que son fils Karl est mort, alors qu’il est, en fait, aux mains des services secrets où l’on essaie de lui faire avouer… Quoi ? On n’en sait rien ! Si tout de même, l’idée globale est de démanteler un « gigantesque réseau d’espionnage pro-nazi » !

Comme d’habitude, le lecteur se fait traiter de tous les noms… « tas de navetons », individus « plus pochetés qu’un troupeau d’oies » !

Et de fait, on doit avoir un navet à la place du cerveau car on n’a pas compris grand-chose à cette intrigue très complexe.

L’hygiène du commissaire

Grand séducteur, le commissaire San Antonio ne s’embarrasse pas de préliminaires pour arriver à ses fins. Ce jouisseur de première profite de chaque rencontre, sans se poser de question métaphysique.

« Si j’ai changé de poulettes, et je continue d’en changer… C’est une habitude qui relève presque plus de l’hygiène que du sentiment […] ».

L’hygiène de la petite bonne de l’hôtel

La petite Frida est une fraîche servante, « au visage poupin ». « Elle est luisante comme une savonnette ». Peu farouche, la petite Frida se laisse approcher par le commissaire en toute simplicité !

Et lorsque la jeune fille, pleine de délicatesse, s’apprête à mettre une bouteille de kirsch dans la petite Opel du commissaire… ça fait BOUM ! La voiture avait été piégée pendant la nuit !

Le mort qui doit être placé dans la propriété des Bunks

San Antonio doit rechercher un mort mesurant 1m84, âgé d’une trentaine d’années. Blond avec une « prémolaire en argent » !

C’est un Polonais, du nom de Pantowiak, qui fera l’affaire en matière de mensurations. Vivant seul à Orléans, son corps n’est réclamé par personne, ce qui arrange fort bien l’administration, représentée par San Antonio !

Le père du mort, un Allemand chevelu

Herr Bunks n’est pas, comme San Antonio le pensait, un type à « monocle et calvitie accentuée par le rasoir » ! C’est, au contraire, un homme à « l’épaisse chevelure blanche ».

La sœur du mort, une Allemande bronzée comme une Brésilienne

Christia est une superbe « pépée » de 20 ans qui, d’après son teint et la saison, « doit revenir des sports d’hiver ». « Elle est hâlée comme un moniteur d’Antibes » ! « Merveilleusement moulée », ses seins et ses fesses « disent merde à la gaine Scandale » ! Blonde, aux yeux verts, cette jeune fille est tout à fait au goût du commissaire qui tique, toutefois, devant ce bronzage extrême ! Etrange !

Une jeune fille très parfumée. La jeune fille utilise un « parfum assez âcre », un « parfum de tubéreuse », « angoissant et troublant ». Un parfum inoubliable, que San Antonio est capable de reconnaître partout. En effet, il possède, selon ses dires, « entre autres dons naturels, la mémoire du nez » !

Une fois que son « renifleur » a détecté quelques ppm de fragrance, il se met à gamberger, afin de raccorder la bonne personne à la sensation olfactive. Avec la fille Bunks, cela fonctionne à merveille. Ce parfum, qui sent la « verdure » et la « mort », transporte immédiatement San Antonio dans le parc de la propriété de la famille de Christia.

Karl Bunks, un mort bien vivant, pâle comme la mort

Karl Bunks (celui que l’on fait passer pour mort) ressemble terriblement à Christia… à un détail près ! Karl est tout pâlot ! « Il est loin de posséder son hâle appétissant. » A force de rester enfermé, Karl est blanc comme un linge !

La belle aventurière, pâle comme un cachet d’aspirine

Christia n’est pas la fille Bunks ; il s’agit d’une aventurière capable, à l’aide de cosmétiques (fond de teint, teinture capillaire), de changer de personnalité à volonté.

Une première pour San Antonio, qui lui dit, admiratif : « Tu es la première souris qui m’ait possédé sur le chapitre du maquillage » !

Le bronzage de Christia… une simple couche de fond de teint. Un fond de teint « merveilleux qui donne l’impression » du bronzage.

L’autostoppeuse, une étoile filante dans une affaire très embrouillée

Prise en charge par San Antonio au milieu de nulle part, une autostoppeuse, du nom de Rachel Dietrich, vit une courte aventure avec le commissaire. Celui-ci s’interroge : « Qu’est-ce que maquille un Franzose lorsqu’il trouve une gentille gosse perdue sur les routes ? » Une réponse : il la prend dans tous les sens du terme !

Emmenée à Paris par San Antonio, la petite Rachel est engagée à prendre un « bain » pendant que San Antonio part faire un débrief à son chef.

La mère Tapautour

C’est chez la mère Tapautour que San Antonio a placé la petite Rachel.

La vieille femme raffole de « rahat-loukoum ». Lorsqu’elle reçoit San Antonio, c’est la bouche pleine de cette confiserie. « La vieille essuie ses lèvres flétries où le rouge se délaie avec le sucre ». Une vieille femme poilue qui prête un rasoir au commissaire lorsque celui-ci veut se faire beau pour sa belle.

Petit dialogue croquignolesque entre la mère Tapautour et San Antonio.

« Vous avez un rasoir ? je lui demande.

Pour vous raser ? demande-telle.

Je hausse les épaules. Pas pour trancher la gorge à quelqu’un, évidemment. Vous me prenez pour qui ?

Oui, j’en ai un…

Coquette, elle ajoute : Quelquefois des messieurs oublient le leur…» 

Bien sûr, je fais… Et puis quoi, vous ne vous rasez jamais que deux fois par jour… 

Un beau rasoir électrique est fourni à San Antonio pour pratiquer son « barbichage ». Un brin de toilette, « la moitié d’un flacon d’eau de Cologne » vidé sur le « dôme »… Voilà San Antonio prêt pour son grand numéro de séduction.

Une fois « savonné », le « bonhomme » assure !

Pourtant, tout ne vas pas se passer comme prévu et Rachel va finir dans la cour de l’immeuble, après un grand plongeon !

La mère Tapautour est catastrophée : « Vous me ferez prendre des cheveux blancs ! dit-elle. Pas de danger, je fais, avec la teinture que vous employez ! » 

Le chef de San Antonio, un crâne… incroyable

Un chef que l’on connaît bien et dont le crâne est présenté de manière imagée dans les différents opus de la série. Ici, son crâne est présenté comme étant « aussi désolé que le désert de Gobi » ! Un « crâne en peau de fesse » !

Et un petit vieux guère plus chevelu

Un comparse dont le crâne n’est parcouru que d’une dizaine de cheveux, comme peints au pinceau à l’encre de Chine !

Et une question de maquillage…

San Antonio est un peu paumé dans cette histoire sans queue ni tête. Il n’y comprend goutte et son lecteur le précède à ce niveau !

Il ne sait pas trop ce qu’il vient « maquiller » dans cette affaire ; son collègue non plus (« Il donnerait sa légion d’honneur pour savoir ce que je suis venu fiche ici et ce que j’y ai maquillé, au juste »).

Et l’odeur de Paris

De retour à Paris, San Antonio retrouve avec bonheur « l’odeur de métro, de foule, et de parfums riches »… « l’odeur de Paname » !

Descendez-le à la prochaine, en bref

Un opus qui prend le chou, qui nous transforme en navet…Une vraie soupe au goût caractéristique. Lorsque Frédéric Dard nous concocte un petit plat il y a des nazis, des jolies filles, des bombes, des pétards… il y a aussi beaucoup de cosmétiques. Et ici, fond de teint et parfums jouent le rôle principal !

Un grand merci à Jean-Claude A. Coiffard, poète et plasticien, pour son illustration du jour.

Bibliographie

1 Dard F., Descendez-le à la prochaine in San Antonio tome 1, Bouquins la collection, 1241 pages, 2010

 

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