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Une histoire de palaces et de savonnette !

> 09 février 2020

Une histoire de palaces et de savonnette !

Lorsque l’on est immensément riche - on n’est pas héritier des eaux minérales Saint-Yorre, à Vichy, pour rien - il ne paraît pas aberrant de se laisser dorloter dans tel ou tel palace européen. C’est donc très logiquement dans le palace hôtel de Bussaco, au Portugal, que Valéry Larbaud va décider de rédiger un court opuscule sur les bonheurs qui attendent le voyageur qui déposera ses bagages dans l’un ou l’autre de ces prestigieux hôtels.

Voulant se servir du papier à en-tête de l’hôtel pour commencer à rédiger son texte, l’écrivain maladroit s’y prend mal et se retrouve avec une feuille dans le haut de laquelle se trouve une réclame pour « 200 chambres- 200 salles de bains ».1

Dans les palaces, il convient de tenir son rang ; on s’habille pour dîner et on se rase soigneusement. Le débraillé est laissé dans la chambre...

Dans les palaces, on peut se faire hospitaliser si l’on dispose d’un médecin attitré et de tout le personnel adéquat. Cela a tout de même plus d’allure que de se faire confiner dans un sanatorium où l’on est susceptible de croiser toutes sortes de gens... et puis quel bonheur de « se sentir entouré de gens qui ne souffrent pas, qui ne songent pas à prendre leur température. »

Dans les palaces, il est possible de croiser des escrocs de haut vol. La comtesse X, par exemple, ne manque pas de piquant. Généreuse à crédit, elle se charge d’une petite marchande de fleurs (« elle avait lavée, peignée, complètement décrassée » cette petite fille) et la fait dîner à sa table, tout de blanc vêtue. Au bout d’un certain temps tout de même, les créanciers se réveillent en meute et se mettent à hurler sous ses fenêtres. En attendant de savoir si l’on est en présence d’une vraie comtesse ou d’une habile actrice, on la relègue dans « une petite chambre (sans salle de bains) obscure et donnant sur la cour. »

Dans les palaces - l’hôtel du Louvre à Paris par exemple - on peut croiser des personnalités, Mark Twain,2 courant après une savonnette et s’étonnant auprès des uns et des autres de ne pas trouver de savon dans la salle de bains (« Il débarquait pour la première fois sur le Continent et ne savait pas que les gens y ont l’habitude de choisir leur savon, qu’ils l’apportent dans leurs valises, qu’ils ne se serviraient pas de n’importe quel savon. ») ou Valéry Larbaud écrasant, d’un pied sûr, une moquette à l’épaisseur incomparable... A défaut de les rencontrer en chair et en os, on pourra sûrement croiser leurs fantômes dans quelque couloir un peu tranquille. « Oh, j’ai bien aimé cet hôtel au centre du monde, plus que ma maison natale, plus qu’aucune des maisons où mon enfance a passé. »

Désormais, dans tous les hôtels, le voyageur étourdi trouvera dans sa salle de bains tout un nécessaire de toilette. Pas besoin de « protester, de se moquer, de faire du bruit dans les corridors si discrets » pour pouvoir se laver les mains, se laver les cheveux ou prendre une bonne douche. Il y a tout ce qu’il faut sur le bord du lavabo !

Merci à Jean-Claude A. Coiffard, poète et palsticien, de nous emmener, discrètement dans la salle de bain de Valery Larbaud !

Bibliographie

1 Larbaud V. 200 chambres 200 salles de bains, Les éditions du sonneur, 2008, 57 pages

2 http://www.leparisien.fr/culture-loisirs/hotel-de-legende-le-louvre-un-palace-imperial-19-08-2019-8135670.php

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