> 02 avril 2023
Il est bien lugubre ce petit conte de Villiers de L’Isle-Adam.1 En nous exposant tout le petit commerce qui s’opère au niveau des cimetières, l’écrivain nous emmène dans un monde où le profit est roi.
Les fleurs et les couronnes à peine déposées sur les tombes sont rapidement prises en main par des experts de la fleur fraîche qui s’empressent de revendre leur récolte aux fleuristes du quartier. En quelques coups de sécateurs, avec des « doigts de fée », les fleuristes aguerries transforment alors, en un rien de temps, les tristes et funèbres bouquets en fringants bouquets de corsage qui iront orner les plus belles poitrines de la capitale.
D’autres petites mains désarticulent les couronnes mortuaires, afin de constituer de tendres bouquets qui seront offerts par des amoureux transis aux « élégantes », « toutes blanches de fard » !
Pâles comme la mort (sans doute grâce à la terrible et meurtrière céruse), « parées des fleurs de la Mort », les belles en question nous apparaissent, ici, comme dans le vestibule de la grande Dame !
Dès qu’elles seront mortes, on viendra fleurir leurs tombes et le cycle de la vie des fleurs de cimetière continuera paisiblement sa vie !
Un grand merci à Jean-Claude A. Coiffard, poète et plasticien, pour son illustration du jour.
1 Villiers de L’Isle-Adam, Fleurs de ténèbres in Véra et autres nouvelles fantastiques, Flammarion, 2002, 112 pages
2 Lanoë C., Les techniques de blanchiment du visage à l'époque moderne. XVIe - XVIIIe siècles. Communications, 2007, 81, 107-120
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