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Maigret au Picratt’s, une histoire d’épilation intégrale qui fait jaser !

> 28 mars 2021

Maigret au Picratt’s, une histoire d’épilation intégrale qui fait jaser !

Le Picratt’s est une boîte de seconde zone, située à Montmartre et tenue par Fred et Rose.1 Des musiciens aux cheveux « gominés » y jouent, sans réelle conviction. De toute façon, la star de l’endroit, c’est pas eux, mais bien plutôt une certaine Arlette, qui réalise un numéro de striptease qui se termine en nu intégral. Toutes les nuits, c’est la même chanson. Arlette pratique son art avec acharnement (elle semble y prendre plaisir) et se laisse conter fleurette par un jeune inspecteur (le petit Lapointe), qui est bien décidé à lui faire changer de vie. Un soir pas comme les autres, Arlette décide de pousser la porte d’un commissariat de police, annonçant qu’une comtesse va être dépouillée de ses bijoux et assassinée par un certain Oscar. Pauvre Arlette qui, à peine rentrée à son domicile, est assaillie et étranglée. De quoi donner des remords aux policiers qui ne l’ont pas vraiment prise au sérieux. C’est Maigret qui enquête et on imagine bien qu’il va prendre ses quartiers dans cette petite boîte de nuit qui a plein de choses à lui révéler.

Arlette, un maquillage peu résistant, un déodorant inopérant

Arlette, Jeanne-Marie-Marcelle Leleu si l’on croit sa carte d’identité (une fausse carte !), en réalité Anne-Marie Trochain, si l’on en croit le témoignage de sa tante, est une « artiste chorégraphique » d’un genre un peu spécial, âgée d’une vingtaine d’années. Après une nuit de travail, les fards se mêlent entre eux pour former un curieux mélange. « Elle était très maquillée et les fards avaient un peu déteints les uns sur les autres. » Le « bleu de ses prunelles » semble se diluer au fil de la soirée, pendant que son rouge à lèvres file en tous sens, lui dessinant une « bouche démesurée ». Les odeurs fusionnent également entre elles, mêlant « l’odeur des fards » à « un léger relent de transpiration qui venait de ses aisselles. » Dans son sac à main, rien que de très classique pour l’époque - on est en 1950 - à savoir « un poudrier, des clefs, un bâton de rouge, une carte d’identité et un mouchoir sans initiale. » Dans sa loge - en réalité les lavabos - « des peignes, des brosses, de la poudre de riz et des fards ».

Arlette, une épilation intégrale

Des sourcils (« Elle avait l’air boudeur, maintenant, et sa peau était devenue luisante, surtout à la place où les sourcils étaient épilés. ») au pubis, Arlette ne laisse aucune chance de survie au follicule pileux. Cette épilation intégrale intrigue les policiers qui réalisent les premières constatations. « Le docteur qui l’a examinée m’a appelé pour le faire voir. Elle est complètement épilée. Même dans la rue, elle ne portait rien en-dessous. » Cette épilation est réalisée afin de faire plus propre... un argument toujours d’actualité pour les femmes qui la pratique et qui considèrent que ne pas s’épiler est « sale », « grossier » et même contre-nature ».2

Maigret au Picratt’s, en bref

Le crime annoncé par Arlette aura bien lieu. La comtesse von Farnheim, une femme droguée et solitaire, est bien retrouvée étranglée au petit matin. Pour le reste, faisons confiance à Maigret, dans son pardessus épais, la pipe entre les dents, il ne lâchera rien !

Un grand merci à Jean-Claude A. Coiffard, poète et plasticien, pour son illustration du jour !

Bibliographie

1 Simenon G., Maigret au Picratt’s, Tout Simenon 5, Edition du club France Loisirs, 862 pages

2 Obst P, White K, Matthews E., A full Brazilian or all natural: understanding the influences on young women's decision to remove their pubic hair., BMC Womens Health., 2019, 19, 19, 1, 164

 

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