> 17 avril 2024

Des crèmes barrière qui augmentent le flux de substances cancérigènes à travers la peau.¹ Niveau efficacité, c’est loupé ! Des crèmes émollientes, qui améliorent l’état de la peau du patient atopique et renforcent sa fonction barrière.² Niveau efficacité, c’est réussi. Il existe de tout en matière de « crèmes barrière » et, lorsque l’on se penche un tant soit peu sur le sujet, on a vite la tête qui tourne, tant les résultats peuvent être positifs ou négatifs selon les références testées.

Entre la crème barrière qui cherche à faire écran contre un agent toxique et la crème barrière qui stimule la fonction barrière innée de la peau… il y a un monde. Un changement d’angle de vue. C’est ce changement, survenu aux alentours des années 2000, que nous avons souhaité mettre en lumière aujourd’hui. C’est parti…

Un effet protecteur vis-à-vis des agents chimiques, couci-couça

Une crème à base de propylène-glycol, de silice, d’adipate de dioctyle et d’acétate d'amyle, semble exercer un effet protecteur vis-à-vis de la pénétration du xylène, incorporé dans sa composition.³ Idem pour une crème barrière exerçant un effet protecteur vis-à-vis du chlorure de zinc.⁴ L’ajout d’agents séquestrants à ce type de formules permet, semble-t-il, de leur donner une réelle plus-value en matière de prise en charge des dermatites allergiques aux métaux.⁵

En revanche, pas de résultat concluant en faveur d’un effet protecteur vis-à-vis des dermatites occasionnées par les liquides de coupe manipulés dans le cadre professionnel.^6,7

Et un effet néfaste est mis en évidence lorsque la crème barrière se glisse sous un gant, en théorie pour limiter les phénomènes allergiques, ceux-ci semblant au contraire majorés.⁸ Cela amène un certain nombre de chercheurs du domaine à se poser des questions.⁹ En effet, le but n’est, bien évidemment, pas d’augmenter le passage transdermique des molécules chimiques rencontrées.¹⁰ La formule retenue est importante, puisque, selon les publications, on constate un effet pervers de la crème barrière ou, au contraire, un effet protecteur (cas d’un gel à base de dérivé de zinc en particulier, celui-ci étant glissé sous le gant).¹¹

Un effet protecteur vis-à-vis des armes chimiques de guerre

Une publication de 2005 met en avant les qualités d’une crème barrière, en matière de préservation de la santé de cochons contaminés par le VX. La crème s’avérant efficace lors de l’application sur le cochon d’une dose correspondant à deux fois la dose létale 50 de VX.¹² Les dérivés perfluorés semblent les ingrédients-phares de ce type de préparations.^13-15 Certains ingrédients sont, par ailleurs, brevetés.¹⁶

Un effet protecteur vis-à-vis d’agents pathogènes

Nouvel angle de vision concernant cette crème barrière, qui est présentée comme un moyen de limiter le développement de certaines parasitoses, comme la schistosomiase. Une préparation, contenant une silicone, semble, à ce titre, intéressante.¹⁷

Un effet protecteur possible vis-à-vis de la teigne, dans le cadre de la pratique de sport de lutte où le corps à corps peut être source de contamination ? Résultat négatif pour la crème barrière.¹⁸

Un effet protecteur vis-à-vis de l’érythème fessier ou de l’érythème de la personne âgée

En matière de protection de la peau du nourrisson ou de la personne âgée incontinente, plusieurs stratégies sont cumulables, l’emploi de protections absorbantes, l’emploi de crème barrière « épaisse » et « hydrofuge »,¹⁹ qui isole la peau de l’urine et des fécès,^20-22 évitant ainsi la macération. Des crèmes à base d’oxyde de zinc, de vaseline,²³ de silicone.²⁴ Des crèmes ou des pâtes, renfermant des tensioactifs bien choisis, puisque l’on sait que certains tensioactifs sont capables d’altérer la fonction barrière de la peau,²⁵ ce qui est d’autant moins recherché dans ce cas précis.

A noter que l’oxyde de zinc reste l’ingrédient-phare de ce genre de produit et ce depuis des décennies.²⁶

Même chose, en cas d’intertrigo, avec une crème barrière, qui permet d’absorber l’humidité des zones ciblées.²⁷

Et une nouvelle notion, la crème qui restaure la fonction barrière cutanée

A la fin des années 1990, il est fait mention, dans la littérature médicale, à des crèmes hydratantes, qui permettraient de restaurer la fonction barrière de la peau, avec pour conséquence bénéfique de diminuer la sensibilité de la peau soumise à des stimuli irritants. On ne cherche donc plus à protéger la peau par une barrière extérieure, mais on souhaite consolider la barrière cutanée cornée, afin de donner à celle-ci les armes nécessaires pour lutter contre un environnement hostile. Afin de tester l’efficacité de ce genre de produits, on peut mettre en place des tests visant à perturber la fonction barrière à l’aide de tensioactifs plus ou moins irritants/détergents. Une fois cette opération réalisée, on applique la crème à tester et on détermine la perte insensible en eau (PIE) ou Transepidermal water loss (TEWL) pour les anglophones, afin de pouvoir statuer sur la restauration ou non de la fonction barrière.²⁸ Plus la perte en eau est importante, moins la restauration de l’effet barrière est probante.

Les publications vont alors s’enchainer, montrant l’intérêt de certaines crèmes barrière en matière de « récupération » d’un effet auto-protecteur.^29,30 Des crèmes ou des hydrogels, selon le cas.³¹

Et des ingrédients vont être mis en avant pour cet effet réparateur, des « protecteurs cutanés ».³² On citera comme exemple le dexpanthénol,^33,34 les céramides,^35,36 l’urée,³⁷ des huiles végétales, comme l’huile de canola,³⁸ ou encore l’avoine colloïdale.³⁹ Des ingrédients, qui pourront être utilisés dans le cadre de la « cornéothérapie », comme mentionné par certains auteurs.⁴⁰ Des ingrédients hydratants bien connus. Avec, parfois, mention à des ingrédients plus originaux comme le chlorhydrate d’aluminium, qui a fait ses preuves dans des produits destinés à la protection des mains des coiffeurs.⁴¹

Faire le distinguo entre crème barrière et crème hydratante/émolliente peut parfois s’avérer difficile, comme le montrent certains travaux, pour lesquels on n’observe pas de différence entre crème barrière et placébo (le placébo étant l’excipient de la crème barrière).⁴²

Ce qui est clair, c’est que l’emploi de ce genre de produits permet la réparation des mains des soignants abimées, par les protocoles de désinfection et de nettoyage.⁴³

Et un nouveau modèle

Après tout, un bon modèle de crème barrière est celui du vernix caseosa, qui protège la peau du nouveau-né^44,45 et exerce un rôle waterproof efficace.⁴⁶

Les crèmes barrière, à 180°

Difficile de trouver une crème barrière aussi fiable qu’un mur de béton. Selon les ingrédients incorporés, on obtient des résultats fabuleux ou catastrophiques. Il n’y a guère de demi-mesure dans le domaine. Côté crèmes barrière émollientes, en revanche, on trouve une avalanche de publications qui montrent l’effet restaurateur d’une barrière cutanée optimale avec des formules renfermant des poids lourds du domaine cosmétique.

Un domaine complexe, qui demande des efforts, du doigté, des tests pour vérifier la théorie… afin de ne pas obtenir les résultats opposés à ceux souhaités.

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