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Dépilatoire, fards à joues et plante de vie dans les curieux contes de fées de la comtesse de Ségur

> 01 octobre 2020

Dépilatoire, fards à joues et plante de vie dans les curieux contes de fées de la comtesse de Ségur

Les Nouveaux contes de fées de la comtesse de Ségur nous transportent, grâce à 5 histoires, dans un monde enchanté plein de fées gracieuses ou maléfiques, de crapauds, de montagne au sommet bien gardé et de forêt magique parfumé au lilas.1 On y fait la connaissance de Blondine, une princesse aux magnifiques cheveux blonds, au « teint blanc et rosé », malmenée par une affreuse marâtre dénommée Fourbette. On frémit aux côtés de la trop curieuse Rosalie, une jeune personne aux « beaux cheveux châtains », tombée sous la coupe de la fée Détestable. On s’inquiète pour le pauvre petit Henri qui doit franchir mille obstacles pour arriver enfin à trouver la plante miraculeuse qui sauvera sa maman. On s’amuse en regardant les affreux visages d’Orangine et de Roussette, deux princesses au tempérament exécrable qui ont la main très lourde en matière de maquillage. On rêve avec une huile parfumée qui fait tomber les poils comme par magie...

Qu’elle ait les pieds bien plantés dans la vie de tous les jours ou bien au contraire qu’elle rêve, la tête dans les étoiles, la comtesse de Ségur ne peut pas s’empêcher de parler cosmétiques ou médicaments.

Le bon petit Henri à la recherche de la « plante de vie »

Le bon petit Henri vit seul avec sa maman. A l’âge de 7 ans il est parfaitement aguerri aux choses de la vie ; il tient le ménage pendant que sa maman est au travail. Tout va plutôt bien jusqu’à ce que la maman d’Henri tombe grièvement malade. Henri, qui ne sait que faire, appelle à son secours la fée Bienfaisante, qui lui conseille d’aller cueillir au sommet d’une montagne voisine « la plante de vie » ; le suc de sa tige appliqué sur les lèvres de la mourante permettra de lui redonner vie. C’est un voyage mouvementé de 2 ans 7 mois et 6 jours qui va mener Henri au sommet d’un jardin botanique enchanté. Le maître des lieux est un médecin à l’allure des temps anciens, « nez crochu » et « grand manteau noir ». « La plante de vie » obtenue au prix de multiples aventures sera effectivement un remède efficace permettant de sauver une malade pleine de patience.

La princesse Rosette à la recherche du maquillage le plus naturel possible

La princesse Rosette est la fille malaimée de parents dénaturés. Ceux-ci sont plein de bonté pour leurs filles aînées, Orangine et Roussette, deux princesses outrageusement maquillées. Elles abusent de fards blanc et rouge, au point de ne pas pouvoir se laisser embrasser. Le fard blanc permet de couvrir le « teint jaune » d’Orangine et « les taches de rousseur » de Roussette. Elevée dans une ferme, la gentille Rosette est heureusement protégée par sa marraine, la fée Puissante qui la comble de bienfaits et lui permet de déjouer les plans de son infernale famille et de couler ainsi des jours paisibles aux côtés de son Charmant époux. Inutile de préciser que la princesse Rosette n’a pas besoin de fards épais et couvrants tant son teint est lumineux à souhait.

Ourson à la recherche d’un dépilatoire efficace

La fermière Agnella (il s’agit en réalité d’une reine) et sa servante Passerose vivent paisiblement dans une ferme charmante, jusqu’à ce qu’un affreux crapaud vienne vomir des invectives à leur encontre. Le fils que mettra au monde Agnella aura l’aspect d’un monstre. Son visage sera « couvert de longs poils bruns »... Le vilain crapaud a tenu promesse. Le fils d’Agnella surnommé Ourson est un gentil garçon... qui a tout d’un ours ! En se promenant dans la forêt, cet ours bien léché (c’est une vraie pâte pleine de douceur) découvre un jour une charmante enfant aux « cheveux d’un blond cendré ». En grandissant, la petite fille nommée Violette devient une belle jeune fille dont les cheveux se déroulent jusqu’à ses pieds. Heureusement d’ailleurs car ce capillaire exceptionnel permet à Ourson de sauver Violette de la noyade. Violette et Ourson s’aiment tendrement, à tel point que la jeune fille accepte de prendre le maléfice pileux à son compte. Le fée Drôlette, qui se déplace dans un délicieux sillage parfumé (la notion de fée parfumée est une première dans le genre) offre à Violette un « flacon d’huile de senteur » magique qui a le pouvoir de faire disparaître les poils en moins de deux. La peau d’oursonne fond littéralement, pour laisser place à une peau fine et blanche comme les princesses en ont toujours ! Inutile de préciser que ces deux là vivront comblés et heureux de nombreuses années.

Si la comtesse de Ségur a su puiser son inspiration dans les contes racontés à la veillée aux enfants, elle y ajoute son grain de sel, ses préparations cosmétiques, sa plante miracle, avec talent. Le coup de l’huile parfumée qui dissout les poils, il fallait y penser ! Le coup de la fée qui se parfume comme une cocotte et que l’on repère grâce à son nez, pas mal non plus !

Bibliographie

1 Comtesse de Ségur, Nouveaux contes de fées, Hachette jeunesse, 2007, 250 pages

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