> 27 mars 2023
Le diméthylaminoéthanol ou déanol est un principe actif médicamenteux, utilisé dans le traitement de l’asthénie.1 Depuis les années 1950, cette molécule qui augmente la teneur en acétylcholine au niveau du système nerveux central a été testée afin de traiter différentes pathologies comme la schizophrénie, les céphalées, l’asthme…2 sans réel succès. Par ailleurs, sur certains sites, le déanol est présenté comme un « anti-âge global ».3 Le magazine Vogue, par exemple, le présente, quant à lui, comme « l’une des substances les plus intéressantes du moment »,4 une arme anti-âge que l’on ne doit surtout pas hésiter à dégainer en soufflant les 60 bougies de son gâteau d’anniversaire. Composant pour crème liftante,5 le déanol est à la fois discret (il est a priori absent (tout au moins pour l’instant !) des cosmétiques vendus sur le marché Français) et effronté (tant les magazines qui en parlent sont dithyrambiques à son sujet). Evidemment, cela nous a donné envie d’en savoir un peu plus…
Pour Améli (l’assurance maladie), le déanol on oublie
Au chapitre des asthénies, l’assurance maladie préconise une consultation médicale visant à trouver la cause de la situation. La prise de psychostimulants légers comme le déanol est déconseillée.6 Une simple question de bon sens. On adhère parfaitement !
Pour l’inventaire européen, le déanol, on connaît pas bien
Le diméthylaminoéthanol est aux abonnés absents. L’un de ses dérivés, en revanche, est répertorié. On note ainsi que le tartrate de diméthylaminoéthanol est considéré comme « un agent conditionneur, émollient ». Bon, du coup, c’est un peu maigre. Des conditionneurs et des émollients, on en a déjà à la pelle… Pas un ingrédient d’exception donc !
Il est également important de remarquer que l’acéglutamate de diméthylaminoéthanol fait partie de la liste des substances interdites en cosmétologie (Annexe II, n° d’ordre 3).7
Pour le groupe Johnson & Johnson, le déanol on trouve ça bien et on oublie
Une publication datant de 2012 de Rachel Grossman (salariée du groupe Johnson & Johnson) place cet actif dans la catégorie des ingrédients anti-âge efficaces (du moins à la dose d’emploi de 3 %) et bien toléré (et ce à raison d’une application quotidienne de gel en renfermant, application 1 an durant, sans enregistrer d’effets indésirables à type d’irritation, de sécheresse cutanée, de desquamation, de picotements, de brûlures…). Une amélioration de l’aspect du visage avec une atténuation des cernes et des rides frontales, ainsi que des rides fines périorbitaires, une amélioration de la forme et de la densité des lèvres, un effet raffermissant au niveau du cou. Des effets qui perdurent dans le temps… tout du moins dans les 15 jours qui suivent l’arrêt de la routine-beauté. Une action anti-âge, observée in vivo, qui pose question in vitro… Comment ça marche ? Pour l’instant, pas de réponse. Juste des pistes, en soulignant que cet analogue de vitamine B4 (choline) pourrait agir sur des récepteurs cutanés tels que les récepteurs muscariniques de l'acétylcholine (situés au niveau des kératinocytes, des mélanocytes et des fibroblastes dermiques) ou sur les récepteurs nicotiniques de l'acétylcholine (au niveau des kératinocytes).8
Pour les autres chercheurs, le déanol que du bonheur
Un bon hydratant selon les Brésiliens.9 Un bon agent raffermissant pour les Belges.10 Pour les Suisses également, un bon agent affermissant, susceptible d’être incorporé dans les cosmétiques en association avec des actifs végétaux comme le romarin, l’hydrocotyle11 ou le curcuma,12 afin de retarder le passage à l’acte chirurgical (on parle ici de lifting, évidemment) - attention, quelques dermatites irritatives à signaler tout de même !13,14 Pour les Chinois, un principe actif de mésothérapie qui réduit, sur modèle animal, les signes du vieillissement cutané.15 Pour les Américains enfin, un bon agent anti-flaccidité ciblant le cou !16
Le déanol, en bref
Le déanol est, semble-t-il, un principe actif qui n’a pas réussi à trouver sa place dans l’arsenal thérapeutique, malgré les nombreuses tentatives réalisées. Dans le domaine cosmétique, cette molécule, qui semble maudite, ne trouve pas non plus sa place. Il y a bien quelques équipes de chercheurs qui nous en disent du bien, mais le nombre de publications reste trop chétif à notre goût pour pouvoir chanter ses louanges. L’aspect toxicologique serait à creuser. En attendant, on restera prudent. Et pour l’asthénie cutanée, on se tournera vers les poids lourds du domaine, pour une totale sécurité, et un effet minute incomparable.17,18
Bibliographie
1 https://www.vidal.fr/medicaments/substances/deanol-6111.html
2 Caraceni TA, Girotti F, Celano I, Parati E, Balboni L. 2-dimethylaminoethanol (Deanol) in Huntington's chorea. J Neurol Neurosurg Psychiatry. 1978 Dec;41(12):1114-8
4 https://www.vogue.fr/beaute/article/principes-actifs-antiage-peau-60-ans
5 https://peelings.net/cou-et-decollete/1269-deaderm-creme-liftante-professionnelle-a-la-dmae.html
6 https://www.ameli.fr/assure/sante/themes/asthenie-fatigue/consultation-medicale-traitement
7 https://ec.europa.eu/growth/tools-databases/cosing/index.cfm?fuseaction=search.details_v2&id=28839
8 Grossman R. The role of dimethylaminoethanol in cosmetic dermatology. Am J Clin Dermatol. 2005;6(1):39-47
9 Tadini KA, Campos PM. In vivo skin effects of a dimethylaminoethanol (DMAE) based formulation. Pharmazie. 2009 Dec;64(12):818-22
10 Uhoda I, Faska N, Robert C, Cauwenbergh G, Piérard GE. Split face study on the cutaneous tensile effect of 2-dimethylaminoethanol (deanol) gel. Skin Res Technol. 2002 Aug;8(3):164-7
13 http://herbalgram.org/media/4382/341_review45132-110571-341.pdf
14 Sommerfeld B. Randomised, placebo-controlled, double-blind, split-face study on the clinical efficacy of Tricutan on skin firmness. Phytomedicine. 2007 Nov;14(11):711-5
15 Liu S, Chen Z, Cai X, Sun Y, Zhao C, Liu F, Liu D. Effects of dimethylaminoethanol and compound amino acid on D-galactose induced skin aging model of rat. ScientificWorldJournal. 2014;2014:507351
16 Saxena SJ, Duque D, Schirripa MJ. Assessment of a Comprehensive Anti-Aging Neck Cream. J Drugs Dermatol. 2015 Sep;14(9):997-1002
18 https://www.regard-sur-les-cosmetiques.fr/nos-regards/le-collagene-de-la-botte-a-la-hotte-1699/
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