Nos regards
La flore vaginale, une flore à protéger

> 11 décembre 2017

La flore vaginale, une flore à protéger L’importance de la flore vaginale a été mise en évidence dès 1892, par Albert Döderlein. En effet, celui-ci consacre sa thèse, intitulée « Sécrétions vaginales », à ce sujet.

L’observation microscopique de différents prélèvements lui fait découvrir des différences, en fonction de l’état physiologique ou pathologique dans lequel se trouve chaque femme. Des lactobacilles sont présents chez les femmes « saines » et sont déficients chez les femmes souffrant, par exemple, d’endométrite post-partum. Par la suite, Schröder va proposer une classification utile sur un plan clinique. Il définit 3 stades : le stade I (ou microflore « saine ») qui regroupe différents morphotypes de lactobacilles, le stade II (stade intermédiaire) pour lequel les lactobacilles sont remplacés partiellement par d’autres bactéries et le stade III où les lactobacilles sont totalement remplacés par d’autres bactéries. Les lactobacilles restent toujours actuellement les marqueurs de la flore vaginale normale. Leur capacité à maintenir localement un pH acide et des bactériocines aux propriétés antimicrobiennes vise à protéger le vagin d’hôtes indésirables (Gilbert G.G. Donders, Definition and classification of abnormal vaginal flora, Best Practice & Research Clinical Obstetrics & Gynaecology, 21, 3, 2007, 355-373). Les lactobacillus sont retrouvés à raison de 10 à 100 millions d’unités formant colonies par gramme (UFC/g) de fluide vaginal, chez la femme ne souffrant pas de pathologies vaginales (Juan Antonio García-Velasco, Marco Menabrito, Isidoro Bruna Catalán, What fertility specialists should know about the vaginal microbiome: a review, Reproductive BioMedicine Online, 35, 1, 2017, 103-112).

On comprend donc aisément que la qualité de la flore vaginale conditionne l’état de santé gynécologique. A partir des années 1950, un gynécologue et un microbiologiste s’associent pour trouver les causes des vaginites bactériennes. Ils découvrent alors dans les prélèvements un nouveau genre bactérien qu’ils nomment Gardnerella et auquel ils associent la production de sécrétions aqueuses à odeur « nauséabonde ». Toutefois, une petite expérience, pas très éthique, va venir les faire changer d’avis. Après inoculation de sécrétions vaginales provenant de femmes souffrant de vaginites chez 15 volontaires, on observe des vaginites dans 13 cas contrairement à ce que l’on observe lors de l’inoculation de la bactérie isolée qui n’est responsable, quant à elle, que d’un seul cas de vaginite. Si Gardnerella est bien présente en quantité importante dans les prélèvements de femmes atteintes de vaginites, elle n’est toutefois pas responsable des symptômes observés. D’autres germes seront alors identifiés tels que des germes anaérobies du genre Bacteroides ou encore des peptostreptococci. Quant aux odeurs fétides, celles-ci seront mises en lien avec des molécules volatiles produites par les bactéries telles que les lactates, les succinates et la triéthylamine.

Du fait de la production d’acide lactique par la flore présente au niveau vaginal, le pH du milieu est voisin de 4 (compris entre 3,8 et 4,4). Si le pH est plus acide que cela, on parle de vaginose cytolytique car le pH trop acide provoque une nécrose des cellules constitutives de l’épithélium vaginal. Brûlures et écoulement vaginal sont les signes cliques perceptibles (Gilbert G.G. Donders, Definition and classification of abnormal vaginal flora, Best Practice & Research Clinical Obstetrics & Gynaecology, 21, 3, 2007, 355-373). Ce pH peut être influencé par un certain nombre de facteurs tels que le mode de contraception, la prise de certains médicaments, les menstruations… Les oestrogènes entraînent une prolifération des cellules constitutives de l’épithélium et une augmentation de la synthèse de glycogène ; la progestérone, quant à elle, exerce un rôle cytolytique au niveau épithélial ce qui provoque une libération importante de glycogène. Celui-ci sera métabolisé, par les bactéries, en glucose, puis en acide lactique (Juan Antonio García-Velasco, Marco Menabrito, Isidoro Bruna Catalán, What fertility specialists should know about the vaginal microbiome: a review, Reproductive BioMedicine Online, 35, 1, 2017, 103-112). On n’observe pas de différence de pH en fonction de l’ethnie, ce qui est important à noter pour le formulateur de produits d’hygiène intime (Kevin Fiscella, Mark A. Klebanoff, Are racial differences in vaginal pH explained by vaginal flora?, American Journal of Obstetrics and Gynecology, 191, 3, 2004, 747-750).

Chez la petite fille, des vulvo-vaginites sont à mettre en lien avec des habitudes qu’il conviendra de modifier. L’utilisation de cosmétiques irritants (c’est par exemple le cas des bains moussants), le port de vêtements serrés, une habitude d’hygiène en allant de l’arrière vers l’avant sont autant d’habitudes à perdre si l’on veut faire disparaître les signes cliniques associés (Fatıma Cemek, Dursun Odabaş, Ünal Şenel, Ayşe Tuba Kocaman Personal Hygiene and Vulvovaginitis in Prepubertal Children, Journal of Pediatric and Adolescent Gynecology, 29, 3, 2016, 223-227).

Du point de vue des cosmétiques, on privilégiera, dans la majorité des cas, des produits d’hygiène formulés à partir de tensioactifs doux et à pH légèrement acide.


Retour aux regards