Nos regards
Chez la comtesse de Ségur, les conseils cosmétiques et médicaux coulent de source !

> 08 octobre 2020

Chez la comtesse de Ségur, les conseils cosmétiques et médicaux coulent de source !

La comédie humaine de la comtesse de Ségur est composée d’une vingtaine de romans qui mettent en scène des membres de la noblesse, mais également de pauvres gens qui, du fait du handicap, du veuvage ou de la maladie, sont réduits à la misère. Ces romans pleins de fraîcheur grouillent d’enfants considérés « comme des personnes ». Des enfants à qui il faut expliquer la différence entre le bien et le mal, des enfants à qui il faut montrer le bon exemple, des enfants qui font parfois des bêtises, mais qui se repentent toujours, sachant que la punition qu’ils vont avoir est méritée et qu’elle les aidera à grandir dans la vie. Très pédagogue, la comtesse montre à ses petits lecteurs les effets désastreux de la méchanceté, récompensant, en revanche, avec largesse, les cœurs simples et droits. Pour exemple, la comtesse démontre l’absurdité de certains systèmes éducatifs basés sur une trop grande dureté (Mme de Réan a une drôle de façon de faire passer la coquetterie de sa fille) ou bien au contraire sur une mollesse pathologique (Léontine et Victor de Gerville sont tout simplement ridicules tant ils se plient aux désirs de leur capricieuse Gisèle).

Bonne grand-mère, la comtesse distille ses conseils cosmétiques et médicaux tout au long de ces différents ouvrages. Dans ses Nouveaux contes de fée, les princesses, outrageusement maquillées avec des fards blanc et rouge, ont mauvais genre et une huile de senteur aux vertus dépilatoires transforme une oursonne velue en charmante princesse.

Pour coiffer ses cheveux et se faire jolie

Si Camille de Fleurville est toujours parfaitement bien coiffée, il n’en est pas de même de la pauvre Sophie. Jugée trop coquette par une mère trop peu aimante, Sophie se voit condamnée à arborer en permanence une coupe à la garçonne qui lui sied fort peu. Avec les moyens du bord, Sophie tente de se faire boucler les cheveux et pour cela elle va les mouiller, en se plaçant la tête sous une gouttière. Voulant par ailleurs épaissir des sourcils, jugés trop peu épais, Sophie les coupe au plus court, pensant que ce stratagème aura pour conséquence de les épaissir. Tout le monde se moque alors de sa drôle de figure et lui conseille d’utiliser du charbon pour redessiner sa ligne sourcilière ! Gisèle de Gerville, véritable despote familial, devient, quant à elle, la risée de ses camarades du fait d’une coiffure extravagante, réalisée par un coiffeur pour dames un peu déjanté… Le mieux, c’est le naturel ! La pommade pour les cheveux qui graisse la chevelure de Simplicie n’est pas vraiment esthétique non plus.

Pour laver ses mains, sa figure, son corps et ses cheveux, pour s’amuser, pour faire du mal

C’est le savon qui est aussi multi-usage. Il sert à nettoyer les mains des jeunes personnes distinguées, comme Félicie d’Orvillet, mais également à essuyer les larmes des personnes émotives. Il permet de réaliser le bain des petites indigentes pleines de poux. Une bassine, un savon tout mignon, de l’eau… voilà un jeu idéal pour des enfants qui n’ont pas peur de se mouiller. Mais attention, le savon peut également faire mal lorsqu’il est mis exprès dans les yeux. Mina, la bonne de Christine des Ormes, véritable tortionnaire pour une petite fille totalement abandonnée par ses parents, s’y connaît en matière de mauvais traitements. Parmi ses armes, le savon constitue le moyen, dès la toilette du matin, de tourmenter Christine.

Le savon utilisé à foison par les châtelains est consommé de manière beaucoup plus parcimonieuse par les pauvres paysans qui en font parfois l’économie. Un lavage à grande eau est souvent la seule toilette autorisée.

Pour guérir d’un chagrin

Le gentil petit Pierre, pour consoler sa bonne à qui l’on vient de faire une très méchante blague – on lui a annoncé pour rire le décès de sa mère – accourt avec de la fleur d’oranger.

Pour traiter les blessures

Pour traiter les blessures, plusieurs produits sont à disposition. Le cérat (mélange de cire d’abeille, d’huile et d’hydrolat) est appliqué, par Sophie de Réan, sur les plaies d’un jeune poulet, malmené par sa mère. Au bout de trois jours une guérison pleine et entière vient récompenser les efforts de la petite fille, plus habituée aux bêtises qu’aux bonnes actions. Pour Mme de Rosbourg qui chavire avec son véhicule aux portes de la propriété de Mme de Fleurville, le remède à ses multiples blessures est un onguent de colimaçons, assorti de feuilles de laitue. Un pansement DIY très original ! Pour un zouave pontifical blessé par balle, on sort la grande artillerie : dans ce cas, le colimaçon vraiment trop lent, est laissé de côté. Le baume du Commandeur (mélange de baume du Pérou, de benjoin, d’aloès, d’oliban, d’angélique, de millepertuis et d’esprit de vin) est nécessaire pour réaliser des cataplasmes qui doivent être changés le plus régulièrement possible. Parfait (!) ce baume pour son effet allergisant et photosensibilisant ! En convalescence, on peut aussi aller prendre les eaux de Bagnols, en compagnie (ou non !) du terrible général Dourakine.

Pour éviter la rage

Marguerite de Rosbourg s’est fait mordre par un chien, que l’on dit enragé. Pour éviter la rage, sa petite main sera mise à tremper dans de l’eau salée, pendant plusieurs jours.

Pour faire revenir des animaux noyés à la vie

Blaise, le fils du concierge du comte de Trénilly et souffre-douleur de Jules, le fils du châtelain, est habitué à réparer les fautes de son jeune maître. Elevé avec sagesse par un père plein de bonté, Blaise supporte tout avec douceur. Pour sauver des poulets jetés dans une mare par Jules, Blaise s’empresse de les placer dans un tonneau de cendre chaude afin de leur sauver la vie. Et cela fonctionne très bien !

Pour arrêter les saignements

Lorsque Jules de Trénilly se fait attaquer par des sangsues voraces, de la poudre de colophane est appliquée au niveau des lésions. Pour les crachements de sang, c’est l’eau de Pagliari (baume de benjoin, sulfate d’alumine et de potasse, eau) qui est recommandée.

Pour traiter une entorse

Mme Anfry, la mère de Blaise, a un moyen radical pour traiter les entorses. Pour apaiser une foulure, elle s’active autour de son fourneau et mélange du son, de l’urine et de la chandelle, afin de confectionner le cataplasme de Valdajou. Jean – qui rit – a, quant à lui, des doigts de fée qui massent les membres lésés et apaisent les douleurs lancinantes.

Pour réconforter après une chute

La bonne de Félicie connaît toutes les bonnes recettes pour traiter les bobos du quotidien. Une chute dans l’étang et la voilà qui court chercher tilleul et arnica.

Pour revigorer après un effort intense

Anisette et café bien fort sont recommandés pour éviter le refroidissement des travailleurs de force. Après avoir transpiré sang et eau dans le potager de Mme d’Orvillet, Diloy se voit récompenser de cette manière. Il est également possible de boire un petit verre de malaga, pour éviter tout refroidissement.

Pour traiter une indigestion

Un excès de cassis vous donne une indigestion… La comtesse vous recommandera du tilleul.

Pour venir à bout des puces

Durant les grandes vacances, les enfants se retrouvent tous au château. Cousins, cousines et leurs amis, forment une joyeuse bande qui voit passer l’été à vive allure. Les pères enseignent à leurs enfants à traiter les puces de leurs chiens en les plongeant dans un bain d’aloès, de couleur rougeâtre.

Pour apaiser des coups de knout

Le baume du Samaritain, à base d’huile et de vin est le remède mis en œuvre par le bon curé de L’auberge de l’ange gardien, afin de traiter les coups de fouets reçus par le malheureux Torchonnet. Le général Dourakine est un sanguin ; mieux vaut ne pas le voler, ni jouer avec ses sentiments ! Autre moyen d’apaiser les coups de fouet : réaliser un cataplasme à la bougie fondue ; ça c’est le moyen mis en œuvre par Betty pour le bon petit diable !

Contre les évanouissements

Il y a du vinaigre, de l’eau de Cologne, des sels ou alcali, de l’eau fraîche et même simplement… de l’amour ! Chez la comtesse, on s’évanouit tout le temps… On a toujours à portée de mains le flacon qu’il faut pour faire reprendre leurs esprits aux malheureuses victimes.

L’huile de millepertuis, une excellente recette

L’huile de millepertuis est le remède idéal pour enfants battus. Lorsque la fière Félicie tâte du fouet de Diloy (celui-ci pris de boisson ne sait plus trop ce qu’il fait), sa peau s’en souvient quelque temps. Constatant les bleus qui couvrent son cou et son dos, la bonne de Félicie apporte le flacon d’huile de millepertuis, à propriétés apaisantes. Cette huile sert d’ailleurs aussi bien aux petites filles arrogantes qu’aux souris malhabiles. Le soir à la veillée, les mamans qui racontent des histoires parlent souvent d’une petite souris qui s’était coincée la patte dans une porte. Et puis cette huile, il faut la préparer et pour cela apprendre à lire, afin de pouvoir décrypter la formule dans La revue de la Presse ! En laissant macérer des fleurs de millepertuis pendant un mois dans de l’huile, celle-ci devient rouge et prête à l’emploi.

Des cataplasmes de camphre

Les cataplasmes de camphre sont souverains pour traiter fièvre et vomissements.

Et puis, bien sûr, des saignées (en veux-tu en voilà), des sinapismes… Dans l’armoire à pharmacie de la comtesse, les recettes ne manquent pas. Soucieuse de la santé des siens, Sophie veille au confort des petits et des grands, mettant toujours l’amour au centre de son petit monde.

Pionnière sur le sujet, elle se fait l’avocate du peau à peau et montre à quel point il est important d’entrer en contact avec le malade. En tenant la main du petit Roger (« C’est comme quelque chose de doux, de tranquille, qui court sur moi et dans mes veines »), Jean transmet un peu de force à celui qui est condamné par la science médicale de son époque. Bien avant l’heure, la comtesse milite contre le tabac, mettant en garde les jeunes garçons contre ses effets délétères : « Si tu m’en crois, tu ne fumeras jamais. Le fumeur dépense son argent, perd son temps, ruine sa santé. » Réfléchissant sur la place de la personne handicapée dans la société de son temps, elle prend fait et cause pour Gribouille, un jeune homme qui pose bien du souci à sa sœur.

Bibliographie

https://www.regard-sur-les-cosmetiques.fr/nos-regards/deboires-cosmetiques-d-une-petite-coquette-au-pays-de-la-comtesse-de-segur-540/

https://www.regard-sur-les-cosmetiques.fr/nos-regards/un-remake-du-lion-et-du-rat-avec-felicie-et-diloy-1450/

https://www.regard-sur-les-cosmetiques.fr/nos-regards/les-deux-nigauds-il-leur-manque-les-codes-cosmetiques-tout-simplement-1458/

https://www.regard-sur-les-cosmetiques.fr/nos-regards/un-onguent-a-l-uree-home-made-1465/

https://www.regard-sur-les-cosmetiques.fr/nos-regards/chez-les-bons-enfants-ca-sent-la-fleur-d-oranger-le-savon-le-brule-et-la-tendresse-1472/

https://www.regard-sur-les-cosmetiques.fr/nos-regards/vite-vite-preparons-un-onguent-a-base-d-escargots-pour-notre-bonne-comtesse-1480/

https://www.regard-sur-les-cosmetiques.fr/nos-regards/bouquet-de-dahlias-de-resedas-et-d-ortie-pour-pimenter-des-vacances-en-normandie-1488/

https://www.regard-sur-les-cosmetiques.fr/nos-regards/chez-la-comtesse-sortez-vos-ombrelles-apres-la-pluie-le-beau-temps-1495/

https://www.regard-sur-les-cosmetiques.fr/nos-regards/argument-cosmetique-en-faveur-de-la-lecture-1503/

https://www.regard-sur-les-cosmetiques.fr/nos-regards/les-deux-jean-de-la-comtesse-de-segur-massage-au-son-du-biniou-1512/

https://www.regard-sur-les-cosmetiques.fr/nos-regards/le-general-dourakine-a-la-fois-soigne-et-soignant-1520/

https://www.regard-sur-les-cosmetiques.fr/nos-regards/une-boulette-de-toiles-d-araignees-en-guide-de-medicament-1528/

https://www.regard-sur-les-cosmetiques.fr/nos-regards/un-amour-d-enfant-qui-merite-quand-meme-un-bon-savonnage-1535/

https://www.regard-sur-les-cosmetiques.fr/nos-regards/histoire-d-un-petit-bossu-qui-finit-sa-vie-droit-comme-un-i-1542/

https://www.regard-sur-les-cosmetiques.fr/nos-regards/a-la-ferme-avec-la-comtesse-1549/

https://www.regard-sur-les-cosmetiques.fr/nos-regards/traitement-de-cheval-pour-ane-malade-1556/

https://www.regard-sur-les-cosmetiques.fr/nos-regards/recettes-pour-chasser-le-diable-1564/

https://www.regard-sur-les-cosmetiques.fr/nos-regards/une-campagne-anti-tabac-par-la-comtesse-de-segur-1572/

https://www.regard-sur-les-cosmetiques.fr/nos-regards/avec-gribouille-les-cruches-volent-et-l-huile-de-millepertuis-est-de-sortie-1580/

https://www.regard-sur-les-cosmetiques.fr/nos-regards/depilatoire-fards-a-joues-et-plante-de-vie-dans-les-curieux-contes-de-fees-de-la-comtesse-de-segur-1593/

 

Retour aux regards