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Ce que l’on peut dire des Normes NF ISO 16128-1 et 16128-2

> 04 avril 2018

Ce que l’on peut dire des Normes NF ISO 16128-1 et 16128-2 D’emblée, nous sommes prévenues, la norme NF ISO 16128-1 ne traite ni des messages marketing des produits Bio, ni de leur sécurité d’emploi pour les personnes… Il ne sera question ici que de définitions. Ce qui est loin d’être inintéressant, bien sûr, et aurait même dû être fait depuis longtemps puisque l’on ne peut (bien) parler que d’un sujet que l’on a d’abord défini… (dixit Lao Tseu)

On apprend ainsi que les ingrédients naturels sont « des ingrédients cosmétiques obtenus exclusivement à partir de végétaux, d’animaux, de micro-organismes ou de minéraux, y compris les ingrédients obtenus à partir de ces matériaux résultant de procédés physiques (tels que broyage, séchage, distillation), de réactions de fermentation existant dans la nature et conduisant à des molécules existant à l’état naturel, et d’autres modes opératoires de préparation […] sans intention de modifier chimiquement l’ingrédient […] ».

Les « matériaux », ainsi visés, sont donc, pour certains, d’origine végétale (il nous est précisé que l’on peut utiliser le terme d’« herbe » à la place de « végétal » - le botaniste va rire, pendant que le toxicomane va apprécier). Pour d’autres, l’origine est minérale (on apprend qu’il s’agit de substances « possédant une formule chimique propre et un ensemble cohérent de propriétés physiques (par exemple structure cristalline, dureté, couleurs) » (là ce sont les chimistes et les physiciens qui vont se, pardonnez-nous l’expression, gondoler !). D’autres encore sont « biologiques », « issus de méthodes d’agriculture biologique ou de récoltes sauvage » (cette fois c’est le garde-champêtre qui ne va pas être content : on parle de plantes de cueillette ou plantes sauvages, difficile d’appliquer cet adjectif à la récolte elle-même !!!)

L’eau est « considérée comme naturelle ». On ne sait pas si c’est vrai, mais on va « considérer »… l’eau synthétique ne doit pas être si fréquente que cela…

Enfin sont définis les « ingrédients non naturels » : « ingrédients dont une proportion supérieure ou égale à 50 % de la masse moléculaire est issue de combustibles fossiles, ou tout autre ingrédient n’entrant dans aucune des catégories définies dans les présentes lignes directrices », dite aussi catégorie « fourre-tout », quand on ne sait pas, on met là… A l’annexe C (qui n’est, par parenthèse, qu’informative), on trouve des exemples de calcul permettant la détermination de pourcentage d’« origine naturelle ».

Passons maintenant à la norme NF ISO 16128-2. Les lignes directrices fournies dans ce contexte sont annoncées comme étant « propres à l’industrie cosmétiques car la plupart des méthodes existantes rédigées pour le secteur agroalimentaire ne sont pas directement transposables aux produits cosmétiques ». On se demande bien pourquoi.

Sont décrites dans cette deuxième partie de la norme un certain nombre de méthodes de calcul visant à déterminer des Indices Naturel, d’origine Naturelle, Biologique et d’origine Biologique pour les ingrédients, à usage cosmétique, donc.
Elémentaire aurait dit ce cher Watson, l’eau dispose d’un Indice Naturel égal à 1 (nous avions dit dans la première partie de la Norme qu’elle était naturelle, donc logique de lui attribuer la note maximum ! Ensuite, on enfonce une porte ouverte, si l’ingrédient n’est pas naturel, son Indice Naturel est égal à zéro (c’est le mauvais élève, il n’a rien compris, il est tout synthétique, il est nul, il faut le dire et même l’écrire dans une Norme ISO NF !)

Passons à l’Indice d’Origine Naturelle. Si vous avez intégré les données du paragraphe précédent, ça va être facile ! Confiance ! Si l’ingrédient répond à la définition des ingrédients naturels ou des différentes eaux telles que décrites dans la première partie de la Norme, bingo, l’Indice d’Origine Naturelle est égal à 1. S’il n’y répond pas, cherchez bien… oui, oui, vous avez la réponse… c’est zéro (il est toujours aussi nul, l’ingrédient, pas vous). Enfin, pour maintenir le lecteur dans une certaine tension, certains ingrédients peuvent obtenir des notes à concurrence de 0,5 (de toute façon, c’est une note éliminatoire !) Attention, ça va se corser, nous voilà à l’entre-deux (0,5 < Indice ≤ 1) : là, il faut avoir fait le calcul en faisant le « rapport du fragment (nous aurions plutôt dit de la fraction ou la partie) d’origine naturelle, déterminé par la masse moléculaire, la teneur en carbone renouvelable (ça c’est vraiment très fort et attention aux ingrédients qui désirent prendre l’avion) ou toute autre méthode appropriée (ça c’est très bien ça laisse du champ, comme qui dirait…), à la composition moléculaire totale dudit ingrédient ». On vous l’avait dit le niveau était monté subitement d’un (voire de beaucoup de) cran(s)…

On ne vous fera pas l’affront de vous parler des Indices biologique et d’origine Biologique des ingrédients… parce que c’est du même tonneau !

Nous terminerons par les méthodes applicables aux produits finis qui consistent à déterminer si la formule est plus ou moins naturelle et/ou biologique. Il s’agit d’avoir calculé, au préalable, les différents indices évoqués. C’est logique. On les multiplie par les pourcentages respectifs des ingrédients. C’est toujours logique. On inclut l’eau de la formule. Là, c’est moins logique, car bon an mal an tout cosmétique (ou presque) va devenir naturel et/ou biologique (mais nous on n’y voit pas d’inconvénient).

A la lecture de la Norme, on comprend aisément pourquoi l’industrie du Bio a poussé les hauts cris.

Pour notre part, nous n’y voyons pas à mal, mais nous avons juste envie rire et de dire « Tout ça pour ça »…

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