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> SEHEDIC D., HARDY-BOISMARTEL A., COUTEAU C., COIFFARD L.J.M.

Arch. Dermatol. Res., 301 (10) 603 (2009)

La plupart des sociétés cosmétiques européennes mettent sur le marché des produits qui ne sont pas des produits solaires et qui cependant revendiquent un SPF. Ces produits sont essentiellement des fonds de teint et des produits de soin à utiliser quotidiennement. Cette « mode » semble venir des Etats-Unis et des journalistes comme Paula Begoun seraient à l’origine du phénomène. Américaine et ancienne maquilleuse, Paula Begoun s'est spécialisée dans le journalisme afférant aux cosmétiques et est l’auteur de best-seller tel « Don’t go to the cosmetics counter without me » ou bien « The beauty bible ». Elle présente sa vocation comme la conséquence des problèmes rencontrés durant sa jeunesse pour traiter une acné qui la fit souffrir. Elle a même créé sa propre gamme de produits (Paula’s choice) et prône, depuis une dizaine d’années, l’utilisation quotidienne de cosmétiques présentant un SPF supérieur ou égal à 15. Si cela peut se justifier en tant que méthode de prévention du vieillissement cutané, il ne faut pas négliger les risques liés à ce type de pratique si les produits utilisés ne répondent pas aux critères exigés pour les cosmétiques anti-solaires.
Pour notre part, nous nous sommes intéressés à la conformité aux recommandations qui sont faites pour les produits solaires, à savoir un ratio UVB/UVA ≤ 3 et une longueur d’onde critique, λc ≥ 370 nm, de quelques produits de soin actuellement sur le marché français.
Nous nous sommes intéressés à ces produits qui bien que n’appartenant pas à la catégorie des PPS affichent une valeur de SPF.

Dix-huit produits commercialisés en parfumerie et pharmacie ont été testés.

Caractéristiques des produits testés vendus en parfumerie :

On constate que l’octylméthoxycinnamate est présent quasi systématiquement (7 produits sur 8) et que les SPF affichés correspondent majoritairement à une protection moyenne (6 produits sur 8 affichent un SPF de 15).

Caractéristiques des produits de pharmacie :

Là encore, on remarque que l’octylméthoxycinnamate est omniprésent dans les produits testés (6 produits sur 10) ; la valeur la plus affichée est 15.

On constate que plus de la moitié des produits de parfumerie (5 produits sur 8) ne respecte pas les recommandations européennes afférentes à la validité des produits solaires, ce qui est assez alarmant puisque cela traduit un défaut de protection dans le domaine des UVA, radiations qui sont impliquées dans le photo-vieillissement cutané. Il est également à noter que les SPF mesurés sont globalement en accord avec les SPF affichés à l’exception de 2 produits (Hydraction® et Day wear plus®) qui auraient pu afficher respectivement des SPF de 25 et 30.

Mesure de l’efficacité des produits de parfumerie :

Sur les 10 produits testés, nous sommes en accord avec le SPF présenté dans la majorité des cas. Trois produits auraient pu afficher des valeurs supérieures à celles trouvées sur l’emballage. Il s’agit de Vinoperfect®, de Retin-Ox® et Aqualiathermal® qui auraient pu afficher respectivement 50, 40 et 20 au lieu de 15. Par ailleurs, tous les produits sont conformes à la réglementation des solaires et permettent donc d’assurer une protection large tant dans le domaine UVB qu’UVA.

Résultats obtenus avec les produits de pharmacie :

Ces produits de soin étant destinés à être appliqués une fois par jour afin d’assurer une action particulière (éclaircissante, anti-rougeurs, hydratante…), ils devront être particulièrement photostables ; en effet l’apposition d’une valeur de SPF sur l’emballage de ces produits laisse penser qu’ils sont efficaces tout au long de la journée. Une irradiation de 2 heures en Suntest® a été réalisée qui nous a permis de comparer la photostabilité des produits de parfumerie et de pharmacie.

Photostabilité des produits de parfumerie :

Aucun des produits testés ne s’avère photostable ; ils perdent tous plus de 10% de leur efficacité ce qui rend leur utilisation peu intéressante.

Photostabilité des produits de pharmacie :

Sur les 10 produits testés, un seul conserve plus de 90% de son efficacité après deux d’irradiation en Suntest®. Il s’agit d’Hydroprotect® d’Eucérine. Par ailleurs, ce produit est particulièrement recommandable puisqu’il répond aux exigences d’un produit solaire avant et après irradiation (ratio ≤ 3 et c ≥ 370 nm).

Conclusion :

En raison des effets indésirables imputés aux filtres tels que des effets allergisants ou perturbateurs endocriniens, la justification de leur incorporation dans des produits de soin utilisés quotidiennement n’a pas été, au vu des résultats obtenus au laboratoire, démontrée, bien au contraire. Les produits de soin n’étant pas, par définition, des produits solaires, la consommatrice ne les considérera et à raison pas comme tel. Une des questions que l’on peut se poser est la suivante : quelle quantité de produit est appliquée ?Comme nous l’avons déjà indiqué, la méthode de détermination in vivo de l’efficacité des produits solaires utilise une dose de 2 mg/cm². Il a été démontré que les consommateurs utilisent beaucoup moins de produit solaire que la quantité recommandée et il en est à plus forte raison de même pour les crèmes de soin. On peut se poser la question de savoir si l’utilisatrice se croyant protégée ne va pas s’exposer au soleil, comme elle le ferait suite à l’application d’un produit solaire. Enfin, contrairement aux produits solaires pour lesquels des applications toutes les 2 heures sont conseillées, on envisagera difficilement un tel mode d’emploi pour une crème hydratante ou anti-rougeurs, par exemple.

Pour ces diverses raisons, il apparaît inopportun de formuler, avec des filtres, des cosmétiques autres que des produits solaires.