> 20 octobre 2024
San Antonio sort de l’hexagone. San Antonio arrive à Chicago. Il y est envoyé par le boss, pour enquêter sur un tueur en série, qui s’en prend aux taxi-girls et qui signe ses méfaits d’un billet laissé sur place, un billet ne comportant que deux mots : « Le Français » !1
San Antonio se met sur la piste de Maresco, le parrain qui tient toutes les boîtes où les victimes ont été recrutées. Un parrain généreux, qui tente de corrompre notre valeureux commissaire. « Je désire rester incorruptible », lui susurre Tony (Antoine est le prénom de San Antonio, Tony, son diminutif) à l’oreille !
Allez c’est parti, on vous met « au parfum de toute l’histoire » !
Arrivé fourbu à Chicago, San Antonio file à son hôtel (le « Connor ») prendre une bonne « douche glacée », afin de reprendre ses esprits.
Il en reprend d’autres dans cet opus, des douches. Des douches « froides », au sens propre… et au sens figuré !
« Aussi déprimé qu’un cachet d’aspirine dans un verre d’eau chaude »… voilà l’état dans lequel débarque San Antonio à Chicago. Il a le mal du pays, ce cher petit !
Chez les flics américains, avant de rencontrer le lieutenant Grane, San Antonio est pris en charge par une « souris blonde comme un demi de bière ». Une fille digne d’un magazine, sculpturale, « grande, mince », le visage gentiment passé au « fond de teint ». Une beauté, qui répond au doux nom de Cecilia. Une idylle se noue rapidement, forcément !
Cecilia a l’haleine fraiche… Un baiser avec elle rendrait lyrique n’importe quel publiciste en mal de slogan cosmétique. Une bouche comme ça… « ça vaut tous les dentifrices à la chlorophylle que vous pouvez imaginer », nous dit San Antonio, qui en connait un rayon en hygiène bucco-dentaire.
Forcément, on ne met pas impunément un gars de la trempe de San Antonio avec une fille du calibre de Cecilia. Tout cela conduit direct au « pucier ». Pour leur premier rendez-vous, San Antonio commence par une bonne « douche », car il a beaucoup transpiré dans la journée et qu’il tient « à se présenter nickel chez Cecilia ». Puis, un nuage de parfum. Un gros nuage d’orage qui craque et déborde et dégouline… C’est « parfumé comme un slip de marié », que San Antonio arrive, frais comme un gardon, chez l’auxiliaire de police ! Pour la suite, on ne souhaite pas rentrer dans les détails.
Le lieutenant Grane est un drôle de poulet, qui ressemble à un clown démaquillé » ! Sa « peau lisse et rosâtre » laisse supposer à San Antonio qu’il a dû passer un sale quart d’heure à un moment de sa vie, dans les flammes d’un incendie.
Une taxi-girl est, faut-il le préciser, une femme embauchée par les patrons de boîtes de nuit pour faire guincher les clients. Chaque danse est tarifée, bien entendu !
Dans cette enquête, San Antonio mouille la chemise et passe de boîte en boîte, afin d’enquêter sur le tueur en série. Il achète des tickets (« deux dollars les six ») qui lui permettront de se trémousser sur la piste de danse, une jolie fille à son bras, pendant le temps d’un morceau. L’une des taxi-girls, Melle Morrisson, possède des « yeux de chat siamois dont l’ovale est scientifiquement accentué au crayon ». Et forcément, comme on connaît le commissaire, la soirée se termine au pieu de la demoiselle, dans un appartement « craspec », où les petites culottes jonchent les chaises et où les « mégots poisseux de rouge » débordent des cendriers.
Et de deux… la seconde taxi girl interrogée est rousse, aux « yeux verts » ! « Elle a renforcé son maquillage et s’est vaporisée un parfum pas tellement désagréable. »
Maresco est au sommet de l’édifice. C’est lui qui gère toute une armée de taxi-girls travaillant pour son profit dans ses boîtes de nuit. Un « vieux bonhomme aux cheveux drus, grisonnants », au « visage ridé », qui garde pourtant, malgré les signes de l’âge, une belle « prestance ». Un homme chicos au « parfum délicat, frais comme un bouquet de fiançailles » !
Maresco, en trois mots : « Sobre, élégant, parfumé » !
Séruti est un sous-fifre de Maresco. Une espèce de dandy, précieux, se baladant avec un « fin mouchoir de soie blanche parfumé » dans la poche. Pas tout à fait le genre du commissaire, qui fait parler la poudre et finit par mettre KO le bel Italien.
Ce petit Belge, rencontré sur la route, se nomme Robert Dauwel. Il va servir d’interprète à San Antonio qui ne parle pas un mot de ricain. Et pour commencer, tous deux prennent « une douche » (séparément, cela va de soi) ! Et ce petit gars très malin, qui pourrait aussi bien être « le fils de Simenon ou d’Hercule Poirot », va être fort utile à notre cher Tony.
Ce clergyman, qui n’en est pas un, se trimballe de fille en fille, avec une bible évidée, renfermant un produit à « odeur douçâtre » ! De « l’opium », tout simplement !
San Antonio se demande, dans cet opus, ce qu’il est venu faire dans cette galère. Que vient-il « maquiller » ici ?
Frédéric Dard en use du maquillage… « Le mieux que j’aie à maquiller, c’est encore de gamberger à la situation […] ».
En tuant Séruti, San Antonio commet une bévue. Il élimine un témoin capital, dès le début de l’enquête. « Laisser passer une pareille occase de se mettre au parfum avouez que c’est sauvagement tartouze. Non ? »
San Antonio n’est pas à son aise ; il faudrait que quelqu’un le mette « au parfum des us et coutumes de ce bon Chicago », pour gagner en efficacité.
Et puis, tout à coup, tout s’éclaire dans son cerveau et il ne lui reste plus qu’à faire un gentil petit rapport à l’intention de son chef, afin de « le mettre au parfum » !
Quand le commissaire n’y voit pas clair, son expression favorite est galénique… « Tonnerre, c’est la pommade » !
San Antonio est incorruptible… ou presque. Ce n’est pas le cas du lieutenant Grane, qui l’accueille à Chicago et qui a pris le pli de taxer le travail des taxi-girls. Une fois l’enquête terminée, San Antonio retrouve sa chère Maman, Félicie, et la félicite, comme d’habitude, pour ses talents de cuisinière. La « crème renversée » et les « oiseaux sans têtes », c’est quand même mieux que toute la ragougnasse américaine !
Un grand merci à Jean-Claude A. Coiffard, poète et plasticien, pour son illustration du jour.
1 Dard F., Bas les pattes ! in San Antonio tome 2, Bouquins, Robert Laffont, 2022, 1258 pages