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Un parfum oriental comme signe de ralliement !

> 29 octobre 2020

Un parfum oriental comme signe de ralliement !

Publié pour la première fois en 1931, le roman Alice et les faux-monnayeurs a fait rêver des générations de petites filles.1 Il faut dire qu’Alice Roy est une jeune héroïne à qui l’on peut s’identifier aisément lorsque l’on a une dizaine d’années. Belle, riche et intelligente, Alice possède de jolis cheveux blonds et de remarquables yeux bleus. Avec ses amies, Marion Webb et Bess Taylor - deux cousines aussi différentes que complices - Alice se trouve mêlée, plus souvent qu’à son tour, à de mystérieuses affaires qu’elle résout toujours de main de maître.

Un flacon de parfum acquis de haute lutte

Dans le cas de l’aventure qui confronte Alice à une bande déterminée de faux-monnayeurs, tout commence par une journée harassante de shopping. Bess a coché toutes les cases de sa liste... il ne reste plus qu’à courir pour attraper le dernier train de la journée. Non, pas encore, supplie Bess qui n’a pas eu le temps de se procurer un parfum. Attirée par une petite boutique dont la vitrine est « remplie d’objets orientaux », Bess espère trouver LE parfum, qui l’accompagnera lors de ses soirées entre amis. C’est effectivement une « odeur agréable » qui l’accueille le seuil à peine franchi. A n’en pas douter une « essence rare » ! Bess se met alors en chasse du flacon qui héberge cet effluve prometteur. Le flacon déniché, une vendeuse revêche s’interpose : « Trop capiteux » pour une jeune fille... En lieu et place de ce lourd parfum d’orient, il faut préférer des parfums légers, qui s’adapteront beaucoup mieux à la fraîcheur de nos trois acheteuses. C’est très mal connaître Bess, une têtue de première. Ce parfum, elle le veut et plus la vendeuse s’y oppose, plus elle est convaincue que ce parfum lui est destiné. « Il n’est pas à vendre », finit par aboyer la vendeuse. Ce parfum a été commandé tout spécialement pour une cliente ! Combien, demande Bess ? Combien, quoi ? Combien le parfum, évidemment... 50 dollars ! Le prix est exorbitant, mais il n’est plus temps de faire marche arrière. Les trois amies fouillent leurs sacs, leurs poches, se cotisent et finissent par acquérir le précieux et luxueux parfum conditionné dans un flacon « minuscule ».

Un flacon de parfum cassé par maladresse

Le flacon emballé... il ne reste plus qu’à courir après le train. Manque de bol, à l’arrivée du train à River City, le flacon échappe des mains de Bess. Consternation ! « Cinquante dollars, volatilisés par pure maladresse ! soupire Marion, navrée. » Tombé sur la chaussure d’Alice, le parfum en imbibe le cuir. Une lourde senteur (une odeur « de quoi assommer tout un régiment ») se répand dans le compartiment, au point d’incommoder les voyageurs et tout spécialement une « petite voyageuse blafarde », qui n’a vraiment pas l’air dans son assiette. Evanouissement. Prise en charge magistrale de la jeune fille par une Alice jamais prise au dépourvu. Milly Barn, la jeune évanouie, revient à elle. Cette jeune fille est à la recherche d’un emploi ; sa grand-mère qui vit à la ferme des Baies Rouges est criblée de dettes ! Evidemment, Alice va tout faire pour aider sa nouvelle amie et lui permettre de faire face à ses ennuis financiers. Pour l’heure, la chaussure d’Alice exhale une forte d’odeur d’essence orientale. Ce parfum exotique et enivrant semble constituer un « signe de reconnaissance » pour une bande de malfaiteurs. En effet, la fille de James Roy est abordée par un homme qui semble peu recommandable. A-t-elle un message du chef ? Devant l’air surpris d’Alice, l’homme s’enfuit, se perdant dans la foule.

Un parfum qui hante les stations d’essence

Il faut ramener Milly chez sa grand-mère ! Voilà la décision prise par Alice. Et puis, pour renflouer les caisses de son amie, pourquoi ne pas prendre pension chez elle ? Après tout, c’est l’été ! En se rendant à la ferme, les narines d’Alice frémissent. A la pompe à essence où elle fait le plein pour son joli cabriolet, un homme, à l’allure peu catholique, « répand derrière lui une faible odeur de parfum oriental ». Continuons tout de même notre route ! Mme Barn est une dame adorable qui concocte des recettes de cuisine excellentes et se morfond en voyant les appétits d’oiseaux de ses jeunes invitées. « Vous voulez toutes être minces comme un fil. » Entre deux repas, entre deux ballades, nos quatre inséparables passent des journées merveilleuses. A proximité, il y a une grotte inquiétante et un campement qui regroupe tous les adeptes d’une secte « qui pratique le culte de la nature ». De quoi mettre un peu de piment dans ces vacances champêtres. « Les Fidèles du Chêne Centenaire », vêtus de blanc, s’adonnent à des rites nocturnes assez étranges. On les voit tourner en rond les jours de pleine lune !

Un parfum qui hante les abords des grottes mystérieuses

Evidemment, Alice ne peut résister à l’envie d’aller mettre son nez dans les affaires de cette secte étrange. Devant la grotte, « l’odeur familière » du parfum oriental empreigne les vêtements d’un homme qui semble monter la garde. Le parfum est visiblement un signe de reconnaissance qui permet aux membres d’une organisation secrète de se reconnaître entre mille. Recouverts d’un drap blanc de la tête aux pieds, d’étranges ombres se mettent à danser la sarabande. Qu’à cela ne tienne, Alice dispose elle aussi d’un déguisement qui va lui permettre de se fondre dans la masse. Le chef de la bande de ce qui s’avère être un gang de faux-monnayeurs est, semble-t-il, le plus parfumé de tous. Une « forte senteur » s’échappe du drap blanc qui le recouvre de la tête au pied.

Alice et les faux-monnayeurs, en bref

Evidemment Alice va s’en sortir. Coincée dans la grotte, elle sera délivrée par la police, au moment opportun. Le parfum oriental qui imprègne chaussure et vêtements est le véritable fil conducteur de cette histoire pleine de rebondissements. Une « merveilleuse aventure », qui « valait bien le prix d’un parfum » !

Bibliographie

1 Quine C. Alice et les faux-monnayeurs, La bibliothèque rose, Hachette jeunesse, 2006, 188 pages

 

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