> 22 septembre 2024
Les braves gens ne se tuent pas entre eux.1 Les braves gens ne se font pas tuer durant les vacances d’été, non plus. Les braves commissaires ne se laissent pas guider par leurs idées préconçues. A partir d’un mégot non taché de rouge à lèvres, Jules Maigret se met à la recherche d’un coupable, un homme. Un peu trop facile !
En se baladant dans Paris, Jules Maigret ronchonne, en croisant des femmes bronzées… en pantalon. Un peu trop provocant !
L’homme déconstruit connait pas… chez Georges Simenon. Normal on est en 1962 !
Maigret vient tout juste de rentrer de vacances lorsqu’il est réveillé, en pleine nuit, par un collègue qui lui annonce le crime qui vient d’être commis.
On est à la fin du mois d’août. Paris est encore un peu désert. Il flotte dans l’air un parfum de vacances. « Paris continuait à sentir les vacances » !
Le mort vient juste de rentrer de vacances - il revient de la belle station balnéaire de La Baule - lorsqu’il est tué, en pleine nuit, par ce qui semble bien être un familier des lieux !
Le mort est un certain René Josselin, 65 ans, habitant un appartement cossu de la rue Notre-Dame-des-Champs. M. Josselin est un paisible retraité, qui travaillait, il y a, encore peu, dans une entreprise de cartonnage, fabriquant des « boîtes en carton, surtout des boîtes de luxe pour les marchands de parfums par exemple… ».
Un homme de talent, qui a dû renoncer à son métier pour raison de santé. Cet homme de goût a su, tout au long de sa carrière, innover, s’adapter, afin de répondre à la demande de ses clients, les « grands parfumeurs » et les « maisons de luxe » !
Francine Josselin, née de Lancieux, est une femme encore relativement jeune (51 ans) aux cheveux bruns et aux yeux noirs. En revenant du théâtre, elle a trouvé son époux à sa table de jeu (une partie d’échec en cours), tué d’une balle de révolver !
Lorsque Jules Maigret fait sa connaissance, Mme Josselin est en robe de soirée, les cheveux impeccablement coiffés, sortant des mains du coiffeur.
Dès le lendemain de la catastrophe, Francine est apprêtée, comme si de rien n’était, lorsque Maigret frappe à nouveau à sa porte. Cette femme, ravagée de douleur, a pris le temps de se maquiller et de s’habiller avec soin. « Malgré le drame, malgré son état, elle était maquillée avec soin et pas un détail ne clochait dans sa toilette. » Simenon n’évoque pas de parfum, mais on peut supposer qu’une fragrance discrète est utilisée par cette « dame », bien comme il faut !
Véronique est une jeune femme sympathique, mariée à un pédiatre (le Dr Fabre), qui passe sa vie auprès de ses petits patients. Du point de vue physique, une jeune femme un peu fade, aux cheveux blond-roux. Une femme qui manque « d’éclat », selon Simenon. Sans doute pas ou peu parfumée, si l’on extrapole un peu.
Maigret va rapidement se rendre compte qu’un inconnu est entré dans l’immeuble cette nuit-là, en se faisant passer, auprès de la concierge endormie, pour un des locataires. On retrouve sa trace dans la chambre de bonne des Josselin.
Dans cette chambre, Maigret a retrouvé des mégots de cigarette, qui ne comportaient aucune trace de rouge à lèvres, ce qui explique pourquoi il en déduit logiquement que l’inconnu (et sans doute l’assassin en même temps) est un homme… « Si je parle d’un homme, c’est qu’il n’y a pas de rouge à lèvres sur les mégots ».
Cet inconnu n’est pas vraiment un inconnu, mais en réalité le frère de Francine, Philippe de Lancieux, un mythomane, qui a passé sa vie à embêter son beau-frère et qui a fini par le tuer pour une banale affaire d’argent.
Dans cet opus, on apprend que Mme Maigret se « tapote les cheveux pour les faire bouffer », avant de passer à table. « Bouffer »… « Passer à table »… Quoi de plus logique !
Dans cet opus, on apprend aussi que M. Maigret n’aime pas les femmes à la peau bronzée, qui reviennent des plages ensoleillées. « Il avait hâte d’en finir avec l’été, avec les vacances, de retrouver chacun à sa place et il fronçait les sourcils chaque fois que, dans la rue, son œil rencontrait une jeune femme qui portait encore le pantalon collant adopté sur quelque plage et qui foulait nonchalamment le pavé de Paris, les pieds nus et bronzés dans des sandales. »
Maigret et les braves gens, en bref
Il n’y a pas mille détails cosmétiques dans ce roman de Georges Simenon. Il y en a, du moins, un, de taille… de poids. Les mégots d’une femme sont forcément tachés de rouge à lèvres, ce qui les distinguent des mégots d’un homme. Facile dans ces conditions de mener une enquête vite fait, bien fait !
Un grand merci à Jean-Claude A. Coiffard, poète et plasticien, pour son illustration du jour.
Bibliographie
1 Simenon G., Maigret et les braves gens, Presses de la cité, 1990, 190 pages