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Statut en vitamine D et utilisation de produits de protection solaire : une controverse

> 26 juin 2017

Statut en vitamine D et utilisation de produits de protection solaire : une controverse Contrairement à ce que certains voudraient laisser croire actuellement (http://sain-et-naturel.com/etude-mythe-cancer-creme-solaire.html), les effets des UV dans le processus de carcinogenèse sont parfaitement bien connus et reconnus (Bruce K. Armstrong, Anne E. Cust, Sun exposure and skin cancer, and the puzzle of cutaneous melanoma: A perspective on Fears et al. Mathematical models of age and ultraviolet effects on the incidence of skin cancer among whites in the United States. American Journal of Epidemiology 1977; 105: 420–427, 48, 2017, Pages 147-156).

Les seuls bénéfices que l’on peut reconnaître au rayonnement solaire sont un effet positif sur le moral et un effet sur le taux circulant de vitamine D.

La majeure partie de la vitamine D présente dans l’organisme provient de la synthèse qui se produit au niveau cutané. Le 7-déhydrocholestérol (7-DHC) ou provitamine D3 est considéré comme un chromophore cutané à partir duquel la synthèse de vitamine D va être possible. Le 7-DHC, en absorbant les UV, se transforme en prévitamine D3. Restent deux hydroxylations à effectuer pour donner naissance au calcitriol (1,25 dihydrovitamine D). Le spectre d’absorption de la provitamine D présente un maximum d’absorption dans le domaine UVC (200 – 280 nm) et dans le domaine UVB (295 – 320 nm). La vitamine D nécessite deux hydroxylations pour révéler son acticité. L’une d’elles se produit au niveau du foie (sous l’action de la 25-alpha-hydroxylase) et l’autre au niveau du rein (sous l’action de la 1-alpha-hydroxylase).

La concentration plasmatique en 25-hydroxy-vitamine D est susceptible de varier en fonction d’un certain nombre de facteurs. Selon l’ensoleillement, le mode d’exposition, l’utilisation de produits de protection solaire, une supplémentation en vitamine, on notera des variations de cette valeur. En fonction des valeurs déterminées, on considérera que le taux est suffisant (concentrations supérieures à 50 nmol/L) ou non.
La vitamine D peut être apportée par l’alimentation. Les huiles de poisson en sont particulièrement riches. Crevettes, œufs, fromages, foie d’animaux et viandes sont également des sources intéressantes. Schématiquement, on considère qu’une portion de 100 g de fromage ou d’espadon apporte respectivement 0,3 à 0,4 microgramme ou bien 45 microgrammes de vitamine D…

Cette vitamine D est une vitamine à ne pas négliger pour la santé osseuse, bien sûr. Quant à la prévention d’un certain nombre de pathologies (cancers, maladies auto-immunes…) elle reste très discutée…

Partant du fait que la vitamine D est une molécule qui est synthétisée dans l’organisme sous l’action des UVB, certaines personnes prônent l’exposition solaire à des fins de Santé Publique. On en reviendrait pour certains à vanter à nouveau les solariums d’antan (http://www.regard-sur-les-cosmetiques.fr/nos-regards/sous-le-soleil-exactement-l-heliotherapie-209/).

Certains accusent les produits de protection solaire de faire chuter dangereusement le taux de vitamine D sanguin. Il est certain que, selon le type de peau et selon les habitudes d’exposition, les saisons… les taux sanguins de vitamine D vont varier. Les études sont nombreuses mais réalisées, bien souvent, sur un petit échantillon de volontaires. Une étude datant de 1982 démontre ainsi qu’un sujet blanc exposé à 1,5 fois sa DME (Dose Minimale Erythématogène) voit son taux de vitamine D sanguin augmenter. En revanche, le sujet noir exposé à la même dose ne verra pas son statut vitaminique modifié. Il faudra exposer le sujet noir à 6 fois la dose d’origine pour observer une augmentation du taux de vitamine D similaire à celle du sujet blanc. De nombreuses études vont dans ce sens et montrent que la phaeomélanine efficace en ce qui concerne la protection vis-à-vis des cancers cutanés préserve également (et malheureusement) de la synthèse de vitamine D.

Selon les populations, les comportements vis-à-vis du soleil et vis-à-vis des différents modes de photo-protection sont variables. Si l’on prend l’exemple de sujets souffrant de pathologies telles que le Xeroderma pigmentosum qui les met dans l’obligation de fuir le soleil ou de s’en protéger très efficacement, on constate, en effet, chez eux, une diminution du taux de vitamine D. C’est ce qui a pu être observé chez 8 patients soumis pendant 6 ans à une utilisation quotidienne de produits de protection solaire affichant un SPF supérieur ou égal à 15 (Peter Springbett, Surhi Buglass, Antony R. Young, Photoprotection and vitamin D status, Journal of Photochemistry and Photobiology B: Biology, 101, 2, 2010, Pages 160-168).

Selon les sources on dira qu’une exposition au soleil, bras et jambes, 5 à 30 minutes entre 10 h et 15 h (plage horaire large !) au printemps, en été et en automne (large gamme de saisons) est suffisante pour obtenir un taux sérique en vitamine D correct (Maurice Audran, Karine Briot, Analyse critique du déficit en vitamine D, Revue du Rhumatisme, 77, 2, 2010, Pages 139-143). D’autres auteurs avancent une dose correspondant au quart de la DME, à la fréquence de 3 fois par semaine (Deon Wolpowitz, Barbara A. Gilchrest, The vitamin D questions: How much do you need and how should you get it?, Journal of the American Academy of Dermatology, 54, 2, 2006, Pages 301-317). Le quart de la dose qui est susceptible d’engendrer un coup de soleil chez un individu sera difficile à évaluer par ce même individu qui ne possède pas les moyens concrets de réaliser cette détermination ! Il apparaît que les longueurs d’onde responsables de la synthèse de vitamine D sont également celles qui sont impliquées dans la formation du coup de soleil et dans le phénomène de carcinogenèse.

S’exposer au soleil ou ne pas s’exposer au soleil, telle est la question !

On doit conserver une grande prudence vis-à-vis des expositions solaires. On a, en effet, remarqué que l’augmentation du taux de 25 hydroxy-vitamine D liée à une exposition solaire s’accompagne d’une augmentation du taux urinaire des dimères de thymine, ceux-ci traduisant des dégâts causés à l’ADN. L’intérêt d’une supplémentation en lieu et place d’expositions solaires abusives semble une piste intéressante (Henry W. Lim, Challenges in photoprotection: Introduction, Journal of the American Academy of Dermatology, 76, 3, 1, 2017, Pages s89-s90).

Le débat sur l’intérêt des expositions solaires et la remise en cause de l’utilisation des produits de protection solaire qui seraient, selon certains, dangereux pour la santé car trop efficaces au point de bloquer la synthèse de vitamine D ne reposent pas sur des bases scientifiques solides.

L’attitude à adopter est celle de la raison. Il convient de se protéger lorsque l’on s’expose, en appliquant généreusement le produit, et en le ré-appliquant toutes les 2 heures.

Les produits de protection solaire sont des produits indispensables, ne l’oublions pas !


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