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Shalimar, c’est pour tout de suite, pas dans 40 ans !

> 21 mars 2019

Shalimar, c’est pour tout de suite, pas dans 40 ans !

On trouve dans la littérature scientifique de savoureuses histoires qui ravissent celles et ceux qui n’hésitent pas à déranger les publications poussiéreuses soigneusement rangées sur les étagères des bibliothèques virtuelles ou non.

Alors que nous flânions parmi les références bibliographiques afférentes aux allergènes présents dans les cosmétiques, nous nous sommes trouvées brutalement confrontées à l’histoire étrange d’une femme ayant utilisé le parfum de sa mère ou de sa grand-mère, l’histoire ne le précise pas. Le parfum en question, à savoir Shalimar, avait alors entre 30 et 40 ans d’âge. Une fois parfumée, la jeune femme a eu l’idée de se rendre dans un centre de bronzage, afin d’y réaliser une séance « bonne mine ». De « bonne mine » il n’en a, bien sûr, pas été question. Qui dit parfum Shalimar « authentique », dit huile essentielle de bergamote, dit donc psoralènes, ces molécules photosensibilisantes dont il n’est plus besoin de dresser le portrait.1,2 En lieu et place du bronzage à la Kiraz escompté, notre Parisienne (elle ne l’était peut-être pas !) se vit affliger de lésions cutanées caractéristiques d’un phénomène de photosensibilisation au niveau des bras et du décolleté.

Cette réaction de photosensibilisation à un parfum ne créa certainement pas le buzz dans la communauté scientifique de l’époque. Elle avait été mise en avant une vingtaine d’années auparavant par un amateur de parfum et d’irradiation forte.3

Larsen nous confie en conclusion de cette anecdote que le parfum Shalimar version 1985 serait mieux toléré que sa version 1945. Il nous indique même que l’on pourrait enchainer une séance en solarium sans risque. Même si l’on sait que les ingrédients utilisés ont changé au fil du temps, cet avis nous semble bien téméraire !

En changeant de formule le parfum Shalimar a perdu « ses facettes les plus brutes, zestées et terpéniques » constatent les parfumeurs.4 Le Shalimar 2019 n’est décidemment plus le Shalimar de Grand-maman !

Morale de l’histoire : un parfum doit être utilisé rapidement. En vieillissant, les molécules qui entrent dans sa composition sont dégradées, donnant naissance à des composés qui ne seront pas forcément très bien tolérées par la peau. Quand à courir s’exposer au soleil une fois la pulvérisation faite, il vaut mieux y renoncer…

Bibliographie

1 Larsen WG, Perfume dermatitis, J Am Acad Dermatol., 1985, 12, 1 Pt 1, 1-9

2 https://cosmeticobs.com/fr/articles/leffet-miroir-42/concepts-oublies- la-couleur-de-la-peau-au-travers-des-ingredients-3233/

3 Burdick KH, Phototoxicity of shalimar perfume., Arch Dermatol., 1966, 93, 4, Pages 424-425

4 https://musquemoi.com/2014/05/08/shalimar-guerlain-de-1925-a-2015-passe-present-futur/

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