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Quand Maigret se lave les mains… ça fait des bulles !

> 13 octobre 2024

Quand Maigret se lave les mains… ça fait des bulles !

M. Gallet est décédé… par une belle nuit d’un mois de juin « caniculaire » !1 Qui est ce M. Gallet ? Un type bien modeste, malade du foie, qui est au régime depuis des années et peine à faire vivre sa famille. Rien à voir avec le gai luron décrit par ses camarades de collège et d’Indochine. Rien à voir… pour la bonne raison que le fameux Emile Gallet a troqué, pour une somme dérisoire, son patronyme contre celui de Saint-Hilaire ! Pas pour l’esbrouffe, mais pour l’héritage car Emile a entendu, chez un notaire, une histoire de vieil oncle, cédant toute sa fortune au dernier des Saint-Hilaire ! Donc, pour résumer quand M. Gallet meurt, c’est en réalité M. de Saint-Hilaire qui succombe. Et le M. de Saint-Hilaire, qui survit à cet évènement tragique, n’est autre qu’Emile Gallet. Simple comme bonjour !

Et c’est Jules Maigret qui a pour mission d’y voir clair dans cette étrange affaire !

L’affaire se passe dans la nuit du 25 ou 26 juin

Emile Gallet, représentant en objets argentés de piètre qualité, est retrouvé mort d’un coup de révolver, dans une chambre d’hôtel, à Sancerre.

L’affaire se passe par épisode de canicule

Le commissaire - il est alors âgé de 45 ans et pèse ses 100 kg - envoyé sur place souffre mille morts par cette chaleur écrasante. De la gare à la maison de la veuve (celle-ci vit à Saint Fargeau), Jules tente, au mieux, de se protéger des rayons du Soleil, en glissant « un mouchoir sous son chapeau melon afin de protéger sa nuque. ».

Jules transpire abondamment et ramollit « son faux-col », en un rien de temps !

A Sancerre, en circulant autour de l’hôtel pour les besoins de l’enquête, Jules s’éponge le visage et cuit à petit feu. « Puis il enjambait l’appui de la fenêtre, « la peau cuite par le soleil », luisante, s’épongeait, grognait. »

L’affaire met en scène une veuve revêche

Mme Gallet est une « femme d’une cinquantaine d’années, franchement désagréable. Rien à voir physiquement avec sa sœur très cosmétiquée, « les cheveux oxygénés », « le visage fardé ».

L’affaire est celle d’un escroc et même de trois escrocs, et de 1 !

M. Gallet n’est pas un représentant de commerce comme il le fait croire à sa famille. Sous le nom de M. Clément, il écume les milieux légitimistes, soutirant, aux uns et aux autres, des fonds censés être remis à de nobles familles dans le besoin.

« Très soigneux » de sa personne, ce M. Gallet est né à Nantes en 1879 ; il est décrit par ses camarades comme un coureur de jupons et un gai luron. Tout le contraire de l’image compassée laissée par le M. Gallet d’aujourd’hui.

L’affaire est celle d’un escroc et même de trois escrocs, et de 2 !

Tiburce de Saint-Hilaire est le châtelain de Sancerre. Il est « petit, grassouillet, rougeaud, avec des mains courtes et peu soignées. »

L’affaire est celle d’un escroc et même de trois escrocs, et de 3 !

M. Jacob est un maître-chanteur qui fait chanter M. Gallet, celui-ci faisant lui-même chanter M. de Saint-Hilaire, sachant que M. Gallet est, en fait, M. de Saint-Hilaire et donc que M. de Saint-Hilaire est, en fait, M. Gallet !

M. Jacob semble être un courant d’air, tant il est difficile à appréhender. « M. Jacob est à peu près aussi inconsistant qu’une bulle de savon. »

Et les mains de Moers

Moers est le bon génie du commissaire, le technicien du laboratoire, qui arrive à reconstituer une lettre de chantage à partir d’un tas de cendres.

« Ses gestes restaient aussi précieux que ceux d’une manucure […] ».

M. Gallet décédé, en bref

Une affaire bien compliquée avec des escrocs en série, des usurpations d’identité et des femmes sans intérêt cosmétique. Juste une femme fardée, qui passe comme une ombre et une bulle de savon qui explose en plein vol !

Un grand merci à Jean-Claude A. Coiffard, poète et plasticien, pour son illustration du jour.

Bibliographie

1 Simenon G., M. Gallet décédé, Fayard, 1971, 188 pages

 

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