> 20 mars 2021
Le flambeau d’Agatha Christie regroupe un ensemble de nouvelles à dormir debout.1 Des maisons hantées, des esprits errants, des assassins en chair et en os, voilà tout ce que l’on peut croiser dans ces histoires qui changent de l’univers habituel de la mère d’Hercule Poirot et de Jane Marple.
Dans la nouvelle Le chien de la mort, il est question de l’essence de gaulthérie ou de wintergreen. Le Dr Rose, qui étudie de près le cas de sœur Marie-Angélique, une sœur capable de détruire le mal par la seule force de sa pensée, considère que, dans la vie, il est possible d’atteindre le même but par différents procédés. Il cherche donc à percer le pouvoir de cette femme énigmatique, en tentant de découvrir les lois qui régissent le surnaturel.
Pour le Dr Rose, l’essence de gaulthérie existe « dans la nature sous forme végétale », mais « L’homme peut également en réaliser la synthèse en laboratoire ».
L’huile essentielle de gaulthérie est un ingrédient à manipuler avec prudence ; ses indications thérapeutiques et ses contre-indications n’en font pas la matière première de choix des cosmétiques.2
Comme toutes les huiles essentielles, l’huile essentielle de gaulthérie est composée d’un très grand nombre de molécules, présentes en proportions variables (et d’ailleurs d’autant plus variables que le lieu ou la saison de récolte n’est pas la même). Obtenue par distillation à la vapeur d’eau des feuilles de Gaultheria procumbens avec un rendement de l’ordre de 2 %, cette huile essentielle qui provient du Canada, de Chine ou du Népal peut être adultérée pour une question de profit.
La molécule majoritaire est le salicylate de méthyle (97 à 99 %, selon les sources bibliographiques), mais on trouve également, entre autres, du limonène (2,00 %) de l’alpha-pinène (0,22 %), du bêta-pinène (0,25 %), de la fenchone (0,17 %), de la menthone (0,12 %), du bêta-myrcène (0,09 %), du sabinène (0,08 %) et bien d’autres molécules aromatiques…3
Certains fournisseurs n’hésitent pas à couper l’huile essentielle avec du salicylate de méthyle de synthèse beaucoup moins onéreux. Celui-ci peut, par exemple, être obtenu à partir du phénol d’origine pétrolière.4
En une phrase et sans avoir l’air d’y toucher, Agatha Christie aborde donc le problème de l’adultération des huiles essentielles. Un véritable crime à l’égard du consommateur !
Un grand merci à Jean-Claude A. Coiffard, poète et plasticien, qui nous invite à cultiver notre jardin !
Bibliographie
1 Christie A. Le flambeau, Librairie des Champs-Elysées, 2009, 219 pages
3 Miloš N, Tatjana Marković, Miloš Mojović, Marina Soković, Chemical composition and biological activity of Gaultheria procumbens L. essential oil, Industrial Crops and Products, 49, 2013, 561 – 567
4 Cuchet A., Patrick Jame, Anthony Anchisi, Hervé Casabianca, Authentication of the naturalness of wintergreen (Gaultheria genus) essentialoils by gas chromatography, isotope ratio mass spectrometry and radiocarbon assessment, Industrial Crops and Products, 142, 2009, 111873)
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