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Magnifaïk, ces produits de maquillage, ma chérie !

> 15 décembre 2021

Magnifaïk, ces produits de maquillage, ma chérie !

A force de voir bondir du taxi qui les mène au studio d’enregistrement « Les reines du shopping » des candidates à la mise impeccable (entendez par là des candidates qui ont coché toutes les cases en matière de choix de vêtements sur le thème d’une soirée entre amies, d’une journée au bureau, de la rencontre d’un élu ou d’un pique-nique éco-responsable avec une association de lutte contre la pollution, mais qui n’ont pas eu le temps de passer dans un institut de beauté pour magnifier leur teint), mais au teint sinistre, la reine du relooking a décidé de retrousser les manches de son chemisier fétiche,1 afin de mettre au point la solution cosmétique qui peut sauver une situation quasi désespérée. La mini-gamme de maquillage Magnifaïk avec ses deux références est ainsi née !

Enfilant la blouse du chimiste de rigueur dans un laboratoire de R&D, Cristina Cordula s’est faite coach pour une équipe de formulateurs aguerris qui ont sorti béchers, pipettes, mélangeurs et tout le nécessaire pour mettre au point des produits de maquillage. Une black liste longue comme le bras, on y reviendra... un embellisseur de teint (teinte unique !) et un correcteur de teint (en 5 teintes) ont, ainsi pu voir le jour, à l’heure actuelle. Cristina, la conseillère, s’est faite toute oreille pour une équipe de formulateurs souhaitant mettre au point des formules saines et efficaces (dans le cas présent efficacité rime avec teint parfait). La conseillère conseillée - à la manière de l’arroseur arrosé - s’est faite élève, afin de s’initier aux bases de la formulation ; une élève turbulente qui n’a pas manqué, certainement, d’interrompre le cours par un « Ah la la, ma chérie, mais ça va pas du tout. Le produit que tu me proposes est bien trop pâteux, impossible à étaler... » ou par un « Ah la la, mon chéri, t’es bien mignon mais je n’y comprends rien à tes histoires d’ingrédients filmogènes, adaptateurs de pH, séquestrants, émollients... sois plus clair et exprime-toi comme tout le monde » ! Bref, on imagine le genre de dialogues. Au final, les uns ont compté les ingrédients sur le bout de leurs doigts (26 pour l’embellisseur et 34 pour les correcteurs), l’autre (Cristina pour ne pas la citer) a plongé les doigts dans les produits en cours de formulation, afin de noter les textures de la moins convaincante à la plus fashion.

Côté black list, on est servi. Cristina n’aime pas, pêle-mêle, les gélifiants de synthèse (les acrylates), des ingrédients qui, pourtant, sont parfaitement bien tolérés, les sels d’aluminium (des ingrédients retrouvés un peu trop souvent à notre goût dans des produits qui se présentent comme des déodorants et sont en réalité des antitranspirants  ; dans une gamme de maquillage, on ne voit pas bien le rapport ; on s’étonne, toutefois, de retrouver de l’hydroxyde d’aluminium dans le correcteur de teint de Cristina, étant donné cette mention faite à l’aluminium), les ingrédients d’origine animale comme le miel et la cire d’abeille (on n’y voit, pour notre part, rien à redire), les benzophénones, des filtres UV, utilisés pour stabiliser la couleur des formules et/ou pour mettre au point des produits de maquillage anti-solaire (on est bien d’accord à ce sujet, les filtres UV n’étant pas nécessaires dans les produits de maquillage et devant être réservés à la formulation des produits de protection solaire), le BHA et le BHT (des antioxydants, sûrs d’emploi, bien utiles pour protéger la phase grasse des cosmétiques), le goudron de houille ou coaltar (un ingrédient que nous n’aimons pas non plus, mais qui ,de toute façon, est interdit dans le domaine cosmétique ; cet ingrédient figure ainsi à l’Annexe II du Règlement (CE) N°1223/2009 au numéro d’ordre 420),2 l’EDTA,3 un séquestrant pourtant sûr d’emploi)...

Cette invraisemblable black list, qui ne fait pas le tri, englobe aussi bien des excipients (silicones), que des actifs (palmitate de rétinyle) ou bien encore des additifs conservateurs (parabens), aussi bien des ingrédients autorisés que des ingrédients interdits. La liste des « sans » est donc très longue. Règlementairement parlant, il serait judicieux de la faire disparaitre du site de la marque, au demeurant fort esthétique.

Passons maintenant à l’analyse des formules.

L’embellisseur de teint est une émulsion de composition simple stabilisée à l’aide de tensioactifs non ionique doux. En matière d’ingrédients actifs, deux matières premières directement en provenance du Brésil... Le beurre de cupuaçu (Theobroma Grandiflorum Seed Butter), en effet, est un ingrédient certainement choisi par Cristina pour son origine (l’arbre qui fournit le fruit qui fournit le beurre est, en effet, originaire du nord du Brésil et, plus précisément, de la forêt tropicale amazonienne). Ce beurre est considéré comme un ingrédient susceptible de remplacer la lanoline dans les cosmétiques véganes et dans les cosmétiques pour lesquels on cherche à éviter tout caractère allergisant. La capacité de rétention d’eau de ce beurre est considérée comme formidable, car bien supérieure à celle observée avec la lanoline ou le beurre de karité. Un test en laboratoire a permis de montrer que le beurre de cupuaçu est capable de « supporter »  440 % de son poids en eau, avant de crier grâce (comprendre par là qu’il est possible d’adjoindre au beurre de cupuaçu de grandes quantités d’eau sans pour autant observer de déphasage). Par comparaison, le beurre de karité (capacité de rétention d’eau de 289 %) et la lanoline (capacité de rétention d’eau de 250 %) semblent des hydratants bien modestes. De là à parler de « super-hydratant » il n’y a qu’un pas, vite franchi par les adeptes de ce beurre encore peu connu. Un émollient qui redonne son élasticité à la peau, un ingrédient hydrophile qui fait la peau douce et souple. Un hydratant qui convient aux peaux sèches, abimées par le soleil et aux peaux matures. Produit de beauté naturel des habitants de l’Amazonie, ce beurre hydratant, riche en phytostérols, combattrait également les effets du vieillissement cutané.4 L’extrait de baie d’acaï (Euterpe Oleracea fruit extract), ce « super-fruit », également originaire du Brésil, provenant d’un palmier poussant sur les berges du fleuve Amazone,5 se combine au beurre de cupuaçu, avec délice. Des travaux font état de l’effet antioxydant de cet extrait démontré in vitro, sur culture de fibroblastes ; un effet « anti-stress », qui laisse augurer des propriétés anti-âge fait également rêver.6,7 Une larme de savon (potassium olivate) est venue se perdre dans cette émulsion, comme au bon vieux temps des crèmes sur base savon. Ici, le pourcentage est faible, contrairement aux formules du passé. Mica et oxyde d’étain apportent leur pétulance à la formule... Pour briller, pour réfléchir la lumière, rien de mieux. Oxyde de fer rouge (CI 77 491) et dioxyde de titane (CI 77 891), en se mélangeant, permettent d’obtenir la teinte voulue. Le dioxyde de titane, du fait de son caractère couvrant, permet de masquer les imperfections cutanées.

Le correcteur est, quant à lui, une émulsion qui fait la part belle aux humectants (glycérine et propanediol émargent, en effet, en tête de la liste des ingrédients). Le beurre de cupuaçu est remplacé ici par le traditionnel beurre de karité ou plus exactement par la fraction insaponifiable de ce beurre (Butyrospermum Parkii Butter Unsaponifiables) (c’est-à-dire la fraction du beurre qui ne se transforme pas en savon lors de la réaction avec une base forte) ; les stérols qui le composent, entre autres, constituent des ingrédients apaisant et renforçateur de la fonction barrière de la peau.8 En matière de super-fruit, l’acaï est laissé au vestiaire, pendant que le fruit de l’acérola (Texa, Mexique, Amérique centrale, Amérique du sud, Caraïbes) entre sur le terrain.9 Ce fruit, riche en vitamine C (teneur de l’ordre de 50 à 100 fois plus élevée que celle de l’orange ou du citron), possède, bien évidemment, des propriétés antioxydantes que les plus dithyrambiques n’hésiteront pas à qualifier de remarquables ! Les colorants ont, visiblement, échappé à la vigilance du rédacteur du site web qui ne les mentionne pas dans la liste INCI.

Magnifaïk, cette mini-gamme de maquillage. Des produits à la fois traitant et teintant, du maquillage hydratant et anti-âge, un 2 en 1, pour femmes pressées, qui souhaitent passer plus de temps dans les cabines d’essayage que dans les points de vente de cosmétiques. Des super-fruits, un beurre super-hydratant, des super-mini-tutoriels, pour savoir comment appliquer les produits, un super-tutoriel avec Cristina, pour changer de visage en 15 minutes chrono ! Tout serait parfait dans le meilleur des mondes, s’il n’y avait cette méchante black list totalement incongrue.

Bibliographie

1 Ovide, la star antique du relooking | Regard sur les cosmétiques (regard-sur-les-cosmetiques.fr)

2 https://ec.europa.eu/growth/tools-databases/cosing/index.cfm?fuseaction=search.details_v2&id=84505

3 Pas de danger avec l’EDTA, continuons d’utiliser sans complexe (appréciez le jeu de mots !) les cosmétiques qui en contiennent | Regard sur les cosmétiques (regard-sur-les-cosmetiques.fr)

4 Fleck CA, Newman M. Advanced Skin Care - A Novel Ingredient. J Am Coll Clin Wound Spec. 2014, 25;4(4):92-4

5 Schauss AG, Wu X, Prior RL, Ou B, Patel D, Huang D, Kababick JP. Phytochemical and nutrient composition of the freeze-dried amazonian palm berry, Euterpe oleraceae mart. (acai). J Agric Food Chem. 2006;54(22):8598-603

6 Petruk G, Illiano A, Del Giudice R, Raiola A, Amoresano A, Rigano MM, Piccoli R, Monti DM. Malvidin and cyanidin derivatives from açai fruit (Euterpe oleracea Mart.) counteract UV-A-induced oxidative stress in immortalized fibroblasts. J Photochem Photobiol B. 2017;172:42-51

7 Schauss AG, Wu X, Prior RL, Ou B, Huang D, Owens J, Agarwal A, Jensen GS, Hart AN, Shanbrom E. Antioxidant capacity and other bioactivities of the freeze-dried Amazonian palm berry, Euterpe oleraceae mart. (acai). J Agric Food Chem. 2006;54(22):8604-10

8 Lodén M, Andersson AC. Effect of topically applied lipids on surfactant-irritated skin. Br J Dermatol. 1996 Feb;134(2):215-20

9 Prakash A, Baskaran R. Acerola, an untapped functional superfruit: a review on latest frontiers. J Food Sci Technol. 2018 Sep;55(9):3373-3384

Composition

Embellisseur de teint : Aqua, Coco-caprylate/Caprate, Silica, Polyglyceryl-6 Polyricinoleate, Polyglyceryl-6 Polyhydroxystearate, Glycerin, Mica, Sodium Chloride, Caprylic/Capric Triglyceride, Theobroma Grandiflorum Seed Butter, Disteardimonium Hectorite, Polyglyceryl-6 Oleate, Helianthus Annuus Seed Oil, Tocopheryl Acetate, Polyglycerin-6, Propylene Carbonate, Euterpe Oleracea Fruit Oil, Xanthan Gum, Potassium Olivate, Magnesium Stearate, Tin Oxide, Tocopherol, Potassium Sorbate, Sodium Dehydroacetate, Ci 77491, Ci 77891.

Correcteur : Aqua, Glycerin, Propanediol, Coco-Caprylate/Caprate, Squalane, C9-12 Alkane, Tribehenin, Ethyl Oleate, Pentylene Glycol, Disteardimonium Hectorite, Polyglyceryl-3 Polyricinoleate, Sorbitan Isostearate, Ethyl Stearate, Aluminum Hydroxide, Butyrospermum Parkii Butter Unsaponifiables, Ethyl Linoleate, Glyceryl Caprylate/Caprate, Ethylene Brassylate, Ethyl Palmitate, Sodium Lauroyl Glutamate, Lysine, Malpighia Glabra Fruit Extract, Magnesium Chloride, Butylene Glycol, Tapioca Starch, Glucose, Potassium Sorbate, Sodium Benzoate, Tocopherol, Hydrolyzed Pea Protein, Sodium Chloride, Citric Acid, Theobroma Cacao Seed Extract, Sodium Succinate.

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