> 21 décembre 2021
Vinaigre de Lubin, cher à Guy de Maupassant,1 vinaigre de Bully, cher à Louis Aragon... le vinaigre cosmétique, en vogue à la fin du XVIIIe siècle et au début du XIXe siècle, est un curieux cosmétique qui retend les chairs atteintes de flaccidité et redonne au teint ses couleurs d’origine, sans avoir besoin de se mettre la tête dans la machine à laver (n’est-ce pas, Alain Souchon ?). Bully ou Buly ? Bully s’est brûlé un "L" au fil du temps. En renaissant, en ce début de XXIe siècle, Buly est bien décidé à voler plus haut, plus loin. Pour se faire, il a fallu le talent de deux entrepreneurs de génie qui ont ouvert la malle aux souvenirs, dépoussiéré des piles de documents d’époque et remis au goût du jour une marque qui fait partie du patrimoine cosmétique français et qu’il aurait été dommage de ne pas faire renaître. Qui dit gamme ancienne dit appellations désuètes, emballage plein de raffinement etc, etc. Le pari est tenu et gagné, le Regard du jour en témoigne.
Si Jean-Vincent Bully a inspiré le romancier Honoré de Balzac pour son célèbre roman César Birotteau,2,3 alors Victoire de Taillac et Ramdane Touhami,4 qui ont fait renaître de ses cendres l’antique maison en 2014, peuvent être considérés comme les dignes héritiers du couple Ragon, ces parfumeurs qui, dans leur boutique parfumée La Reine des Roses, ont mis le pied à l’étrier du garçon parfumeur venu de Tours respirer les effluves parisiens. L’un comme l’autre ont, tout comme le jeune César, la « tête qui lui bouillait comme une marmite », tant leur appétit de faire revivre des marques/des univers disparus est pantagruélique. Si pour César tout commence avec une huile de noisettes aux vertus « comagènes »,3 pour Jean-Vincent, c’est un vinaigre, produit en trop grande quantité, qui va être recyclé dans les boudoirs féminins. Le vinaigre de toilette voit ainsi le jour, permettant aux vinaigriers d’écouler habilement un stock qui peine à trouver preneur... Malin, le Jean-Vincent... S’appuyant sur les formulaires cosmétiques en vogue, le parfumeur-vinaigrier, fait monter la moutarde aux nez de ses concurrents. Les traités de beauté qui distillent des conseils beauté/santé depuis plus d’un siècle alors ne tarissent pas d’éloge au sujet des vinaigres utilisés pour un effet astringent, susceptible de restaurer - à tous niveaux - une virginité qui n’est, parfois, que de façade.5
Dans l’omnibus qui transporte les ancêtres de Louis Aragon, il est possible de faire la connaissance avec la petite Paulette d’Ambérieux, une frêle jeune fille de 16 ans qui va rencontrer, sous nos yeux, un jeune professeur d’histoire, qui aperçoit, dans les yeux brillants de sa future épouse, un avenir souriant. La petite épousée est en admiration devant sa grande amie Denise Lassy de Lasalle, une jeune femme qui vit sur un grand pied et collectionne les produits de beauté sur une table de toilette où se pressent « l’eau de concombres, le vinaigre de Bully, l’eau de Cologne Jean-Marie Farina »... et toutes sortes de petits pots tous plus tentants les uns que les autres.6 Pouvoir s’offrir des cosmétiques Bully... voilà l’objectif de la charmante Paulette, qui associe Bully au luxe, Bully au bonheur conjugal, Bully à la félicité familiale. Fin du XIXe siècle, les produits Bully sont connus et reconnus ; synonymes de qualité, ils laissent une senteur fruitée sur la peau des femmes... de qualité !
C’est le cas d’un certain Maurice Genevoix, qui se souvient avec tendresse d’une grand-mère fraîche et rose, qui embaumait « l’eau de Bully »,7 une grand-mère, aux allures de jeune fille, toujours bien vivante dans la mémoire d’un petit-fils devenu adulte.
En 2014, il est temps de secouer la poussière qui recouvre les registres de la célèbre maison Bully. Bully est mort. Vive Buly ! Et vive les produits sagement présentés sur des étagères de bois sombre.
Pour le visage, la pommade virginale joue les préparations d’apothicaires d’antan. La galénique est un peu égratignée, puisqu’il ne s’agit pas ici d’une pommade, mais bien plutôt d’une émulsion d’application beaucoup plus agréable. Des tensioactifs « modernes » sont venus flirtés avec des corps gras ancestraux, comme le beurre de karité ou l’huile d’amande douce, sous le regard complice d’un extrait de tilleul apaisant.8
Pour le corps, un clin d’œil à la célèbre huile de Macassar,9 cette huile mystérieuse, aux sublimes propriétés. Le lait virginal Makassar fait simple, mais efficace, associant ester émollient et humectant de référence.
Pour les mains et les pieds, la pommade concrète est loin d’être abstraite. Entre le beurre de karité et la cire d’abeille, pieds et mains seront bien gardés.
Côté hygiène, petit coup de griffe galénique avec une huile de savon... ne contenant… ni huile, ni savon... Un simple gel douche. Mais une jolie mise en scène.
Enfin, pour nous ramener tout droit aux temps anciens, une huile parfumée qui mêle huiles végétales et notes parfumées.
Buly, en bref... c’est du bonheur en tube, du plaisir en flacon, du contentement pour les yeux, du ravissement pour la peau. Les amateurs de jolis objets ne se retiendront pas, en ces veilles de fêtes de Noël. Buly, c’est le cadeau rétro qu’il faut pour faire joli dans une salle de bain, pour faire beau dans un paquet-cadeau.
1 https://www.regard-sur-les-cosmetiques.fr/nos-regards/conseil-dermatologique-un-peu-tardif-1088/
2 https://fr-academic.com/dic.nsf/frwiki/1853094
4 https://www.buly1803.com/fr/content/27-histoire
5 https://www.persee.fr/doc/dhs_0070-6760_1986_num_18_1_1598
9 https://www.regard-sur-les-cosmetiques.fr/nos-regards/la-mysterieuse-huile-de-macassar-329/
Pommade virginale (visage) : Aqua (Water), Coco-Caprylate/Caprate, Butyrospermum Parkii (Shea) Butter, Sesamum Indicum (Sesam) Seed Oil, Prunus Amygdalus Dulcis (Sweet Almond) Oil, Glycerin, Cetearyl Alcohol, Sucrose Distearate, Glyceryl Stearate, Potassium Olivoyl Hydrolyzed Oat Protein, Hexyldecanol, Hexyldecyl Laurate, Tilia Platyphyllos Flower Water, Benzyl Alcohol, Sodium Lactate, Hydroxyethyl Acrylate/Sodium Acryloyldimethyl Taurate Copolymer, Parfum (Fragrance), Glyceryl Oleate, Xanthan Gum, Dehydroacetic Acid, Polysorbate 60, Sorbitan Isostearate, Tocopherol, Potassium Sorbate, Sodium Benzoate, Sodium Hydroxide, Citric Acid, Linalool, Limonene, Citronellol, Geraniol.
Lait virginal Makassar (corps) : Aqua (Water), Isopropyl Palmitate, C12-15 Alkyl Benzoate, Glycerin, Glyceryl Stearate SE, Caprylyl Caprylate/Caprate, Cetearyl Alcohol, Silica, Benzyl Alcohol, Sodium Cetearyl Sulfate, Parfum (Fragrance), Dehydroacetic Acid, Citric Acid, Tocopherol, Coumarin, Citronellol, Benzyl Salicylate.
Pommade concrète (mains - pieds) : Aqua (Water), Butyrospermum Parkii (shea) Butter, Cera Alba, Glycerin, Sesamum Indicum (Sesame) Seed Oil, Hexyldecyl Laurate, Hexyldecanol, Polyglyceryl-3 Polyricinoleate, Sorbitan Sesquioleate, Cetyl Ricinoleate, Silica, Anthemis Nobilis Flower Water, Parfum (Fragrance), Glyceryl Caprate, Magnesium Stearate, Sodium Dehydroacetate, Dehydroacetic Acid, Aluminum Tristearate, Tocopherol, Citric Acid, Sodium Benzoate, Potassium Sorbate, Linalool, Citronellol, Geraniol, Citral, Limonene.
Huile de savon rose de Damas : Aqua (Water), Caprylyl/Capryl Glucoside, Sodium Lauroamphoacetate, Inulin, Glycerin, Disodium Cocoyl Glutamate, Sodium Chloride, Parfum (Fragrance), Sodium Levulinate, Cellulose Gum, Sodium Benzoate, Citric Acid, Sodium Cocoyl Alaninate, Coconut Acid/Sodium Cocoate, Sodium Glycolate, Xanthan Gum, Cellulose, Fructose, Glucose, Linalool.
Huile antique rose de Damas : Sesamum Indicum (Sesam) Seed Oil, Coco-Caprylate/Caprate, Isoamyl Cocoate, Prunus Armeniaca (Apricot) Kernel Oil, Caprylyl Caprylate/Caprate, Olive Oil Decyl Esters, Parfum (Fragrance), Squalene, Dehydroacetic Acid, Tocopherol, Linalool, Eugenol, Limonene, Citral.
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