> 21 septembre 2024
« On ne tue pas les pauvres types »… se répète le commissaire Maigret, après avoir appris le décès d’un pauvre bougre d’un quartier populeux, tué d’un coup de carabine à air comprimé, alors qu’il se grattait les pieds avant de se mettre au lit.1 « Merde » alors qu’il dit le gars, avant de s’écrouler auprès de sa femme et de sa montagne de bigoudis. Une affaire estivale, qui va donner à Jules Maigret du fil à retordre, car comme il le dit si bien : « On ne tue pas les pauvres types » !
On est le 3 août à Paris. La capitale « sentait les vacances » ! Des vacances qui ne concernent pas le commissaire, qui se voit dans l’obligation d’ouvrir une enquête et de s’engouffrer dans un métro qui « sentait l’eau de Javel » !
Durant l’enquête, le commissaire Maigret ira renifler « l’odeur de passementerie et de cartonnages » de l’entreprise où était employé le mort. Du moins… il y a 7 ans. Car il y a 7 ans que Maurice Tremblet a donné sa démission ! Mais cela fait 7 ans qu’il joue la comédie à sa femme et à ses enfants, partant chaque matin au boulot avec entrain !
Maurice « se rase une fois tous les deux jours », selon le « témoignage » de sa femme Juliette. Ce détail n’a aucun intérêt en ce qui concerne l’enquête en cours !
Assis sur le bord de son lit, Maurice se gratte les pieds. Il y a un drôle de bruit, « pschouittt !... » Un dernier mot : « Merde » ! Et tout est fini ! Le meurtrier se tenait à la fenêtre de l’hôtel Excelsior situé en face !
Mme Tremblet est une femme qui ne cesse de geindre. Le genre à porter des « bigoudis » sur les cheveux et à se lamenter d’un rien !
Pour tuer un pauvre type, il faut un autre pauvre type… « un homme assez terne, entre deux âges ». Un type que l’on peine à décrire tant ses traits sont communs.
On peut juste dire qu’il s’agit d’un rouquin, moustachu.
Un type pas très soigneux, qui a loué une chambre à la semaine et qui ne s’est pas donné la peine d’aérer… « cela sentait le célibataire » !
Sur l’oreiller du tueur, l’inspecteur Lucas prélève des cheveux et un « poil de moustache », ce qui permet aux techniciens du laboratoire d’assurer que l‘homme en question est âgé de 46 à 48 ans, qu’il possède un « tempérament lymphatique » et un « foie » qui fonctionne mal.
Sur sa tablette, on trouve aussi « une savonnette à l’eau de Cologne », ce qui témoigne tout de même d’une certaine coquetterie.
Dans sa famille tout le monde crie, piaille. Dommage pour Maurice, qui a « horreur du bruit ». Aussi, lorsque celui-ci gagne à la loterie, il se garde bien de prévenir sa famille ; il achète une maison au bord de la Seine et s’y retire chaque jour comme dans un couvent.
Cette aversion pour le bruit est bien compréhensible pour Maigret, qui se souvient du cas d’un homme qui avait divorcé car il ne supportait pas « l’odeur de sa femme » ! Ah le rôle des odeurs dans une vie !
Maurice a également pris une maîtresse. Une fille qui a le « nez » sensible ! Une certaine Olga Jeanne Marie Poissonneau âgée de 29 ans !
Une enquête rondement menée par un Jules Maigret qui flaire une histoire pas banale. Le gars qui a gagné à la Loterie Nationale est harcelé par un ex-copain de billard, qui veut lui soutirer des sous. Cet homme, qui use d’un savon à l’eau de Cologne, pue la convoitise. Mais Maurice est catégorique… il n’aura pas un sou ! Pas un sou ? Une vengeance se met alors en place !
Merde, dit l’un. Alors que l’autre utilise un savon à l’eau de Cologne, pour masquer ses odeurs corporelles !
Un grand merci à Jean-Claude A. Coiffard, poète et plasticien, pour son illustration du jour.
1 Simenon G., On ne tue pas les pauvres types in Maigret et l’inspecteur malgracieux, Presses de la cité, Paris, 1983, 185 pages
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