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Le secret de jeunesse de la Cagliostro, un élixir réellement merveilleux

> 18 avril 2020

Le secret de jeunesse de la Cagliostro, un élixir réellement merveilleux

Maurice Leblanc relate, dans son roman La comtesse de Cagliostro, les premiers pas de son héros fétiche, Arsène Lupin.1 Celui qui se fait parfois appeler Raoul d’Andrésy est le fils de Théophraste Lupin, un escroc qui a transmis à son fils une partie de ses qualités sportives (champion de boxe et de natation, excusez du peu) et morales... car c’est, en effet, dès l’âge de 6 ans que le sympathique cambrioleur réalise son premier forfait.

A 20 ans, en l’an de grâce 1894, Raoul tombe amoureux de Clarisse d’Etigues, 18 ans à peine, des cheveux blonds et un teint on ne peut plus frais. Alors qu’il vient de se faire refuser la main de sa belle, Raoul tombe en plein mélodrame. Une jeune femme est un train d'être jugée, on ne peut plus sommairement, dans une dépendance de la propriété par une douzaine de hobereaux dont le baron Godefroy d’Etigues, celui-là même qui aurait fait pour le jeune aventurier un bien beau joli-papa ! Tous ces nobliaux sont à la recherche du « trésor des monastères » et ont tendance à rencontrer bien trop souvent sur leur route une rivale qui ne leur fait pas de cadeau. Déjà deux décès du côté des chercheurs d’or... La jeune femme va être condamnée à être noyée... et non pas tout à fait, car c'est sans compter sur un sauveur qui semble tombé du ciel (Arsène Lupin, pour ceux qui ne suivraient pas bien !).

La jeune victime (mais est-ce vraiment une pure victime ?) est une jeune femme à la chevelure incandescente (ses cheveux bouclés possèdent des « reflets fauves ») et à la « chair parfumée » qui se fait appeler, semble-t-il tantôt Mme Pellegrini, tantôt Joséphine Balsamo, tantôt Comtesse de Cagliostro. On évoque même une Marquise de Belmonte et une Comtesse de Fenix. Un patronyme qui change... une date de naissance élastique qui oscille entre le XVe et le XIXe siècle. Les portraits qui la représentent (c’est bien elle !) datent de 1498, de 1816 et de 1870. Le même sourire léger, un « sourire de Joconde », flotte immuablement sur ses jolies lèvres. Un grain de beauté posé sur « la peau blanche de la poitrine » constitue le point de repère qui permet de comprendre qu’à 80 ans d’intervalle, la Cagliostro est toujours une jeune fille pleine de charme (Le « grain de beauté, noir comme une de ces mouches que les coquettes se posaient autrefois, marquait la peau blanche et soyeuse. »). Ses « joues tendres et pleines comme un fruit » ne sont pas celles d’une octogénaire, ah ça non.

Afin de traverser les ans sans attraper une seule ride, la Cagliostro a recours à un « secret d’éternelle jeunesse ». Lorsque le poids des ans se fait sentir sur son visage, elle « sort de sa poche un petit miroir en or, y verse 2 gouttes d’un flacon imperceptible, l’essuie et se contemple ». Le miracle se produit à chaque fois, la peau qui s’avachissait se redresse comme par magie, les rides s’estompent, le teint redevient d’une clarté lumineuse. En frottant la surface mouillée de son miroir avec un chiffon de soie, la Cagliostro fait jaillir une nouvelle femme à chaque fois.

Afin de traverser dans les meilleures conditions tous les épisodes de sa vie aventureuse, la Cagliostro a recours à quelques cosmétiques. Le vide-poches que l’on peut trouver dans sa berline regorge « d’objets de toilette, de bâtons de rouge, de brosses ». Bien utile lorsqu’il faut fuir un lieu en toute hâte !

Grâce à ce roman, il est possible d’en savoir un peu plus sur la jeunesse du célèbre gentleman-cambrioleur. Un coeur tendre qui hésite entre la charmante et pure Clarisse et la démoniaque Joséphine, un esprit éminemment perspicace qui résout les énigmes en un rien de temps, un charme fou, quelques « petits entrechats » malicieux de ci de là... Voilà le personnage d’Arsène Lupin qui se dessine au fil des pages.

Ah au fait, il est bon de préciser que Lupin n’a pas su résister au charme maléfique de Joséphine, mais qu’il a quand même réussi à triompher de son esprit du mal, du moins pour cette fois.

Un grand merci à Jean-Claude A. Coiffard, poète et plasticien, pour cette illustration pleine... de magie !

Bibliographie

1 Leblanc M. La comtesse de Cagliostro, Librairie générale française, 350 pages

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