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Le savon Exertier, bel exemple de communication moderne

> 10 août 2020

Le savon Exertier, bel exemple de communication moderne

Le savon « le plus doux du monde » n’est pas encore en vente ; il est en prévente sur le célèbre site Ulule. Ce produit visiblement révolutionnaire sera 100 % naturel (c’est vrai sinon ce ne serait pas un savon, mais un syndet), à base de miel des Alpes (c’est normal puisqu’il s’agit d’un « projet de beauté apicole en Savoie »), zéro déchets...

En ce qui concerne les mérites du savon, on nous a dit tour à tour, qu’il nous rendrait notre peau de bébé (Cadum), qu’il laisserait notre peau jeune et fraîche (Palmolive) au point que mère et fille ne pourraient plus être distinguées sur la fraîcheur de leur teint (Monsavon), qu’il nous ferait acquérir le teint d’une star (Lux), qu’il laisserait sur notre peau un parfum délicat (Cashmere bouquet), qu’il constituerait une véritable « crème de beauté » (Cleopatra), qu’il nous laverait les dents (Gibbs), qu’il ferait glisser la lame de rasoir (Erasmic), qu’il serait utile pour la toilette et pour le bain (Donge), qu’il mousserait abondamment (Le Chat), qu’il nous laverait de manière authentique (RogeR & Gallet)... On pourrait, bien sûr, continuer longtemps.

Aujourd’hui, le ton n’est plus tout à fait le même. On fait des crèmes solaires avec amour,1 des shampooings solides emballés dans des conditionnements qui font pousser des plantes,2 des savons afin « d’aider la planète ».3 La bienveillance, le respect de la planète, le souci des animaux nous sont vendus à prix d’or.

Désormais, ce n’est plus la qualité qui suffit ; il faut encore faire preuve de multiples qualités.

Exertier se plie à l’exercice avec talent. « Le savon le plus doux du monde » (on parle tout de même du produit) est un savon « engagé », puisque, pour chaque savon acheté, 200 abeilles sont logées.

L’argent récolté permettra d’acheter les matières premières nécessaires à la fabrication, d’utiliser un papier d’emballage ensemencé (qui arriverait presque à faire pousser du savon si on s’y prend bien), de permettre une production locale française, de loger des abeilles, de permettre la livraison du produit, de couvrir la commission Ulule. A ce tarif là le savon coûte 10 euros !4

Désolées, mais il nous semble que le raisonnement est monté à l’envers. Fabriquer un bon produit cosmétique nécessite un certain investissement ; celui-ci doit être mis en premier lieu au service du produit (achat d’ingrédients de qualité, mise au point d’une formule sûre, rédaction du Dossier Informations Produit, production dans le respect des BPF...). Ce produit de qualité se vendra bien... Il permettra de dégager un bénéfice qui pourra être mis à profit pour sauver les abeilles ou les ours, plaire aux fans de Winnie l’Ourson et aux autres...

En matière de communication, enfin, l’expression « le savon le plus doux du monde » nous semble un peu excessif dans le cas de ce produit finalement très banal. Que dira-t-on du syndet dans ces conditions ?

Bibliographie

1 https://www.regard-sur-les-cosmetiques.fr/nos-regards/meejin-la-creme-solaire-confectionnee-avec-amour-1487/

2 https://www.regard-sur-les-cosmetiques.fr/nos-regards/les-shampooings-solides-ou-le-musee-des-cosmetiques-de-mme-tussauds-1247/

3 https://www.regard-sur-les-cosmetiques.fr/nos-regards/dr-bronner-s-des-savons-18-en-1-ca-fait-beaucoup-1381/

4 https://fr.ulule.com/savon-abeille/

Composition

Savon Exertier : Helianthus annuus seed oil, cocos nucifera oil, aqua, sodium hydroxide, mel.

 

 

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