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Le DIY cosmétique de Salvador Dali... à éviter !

> 20 novembre 2022

Le DIY cosmétique de Salvador Dali... à éviter !

Quel salmigondis… que ces mémoires où s’enchevêtrent des pensées géniales (c’est du moins ce que nous laisse croire Dali), des souvenirs inventés, des élucubrations sur un trône (et pas celui sur lequel siègent les rois)1… Alors âgé de 36 ans, Salvador Dali nous livre les mémoires d’un peintre qui rencontre le succès et cherche, pourtant, chaque mois à joindre les deux bouts. Avec Gala, sa muse, son inspiratrice, sa protectrice… Salvador a trouvé l’âme-sœur. Chez les Dali, le plus fou des cosmétiques n’est pas celui que l’on croit. Ce « pervers, polymorphe, demeuré et anarchisant » nous donnera quelques recettes à sa façon tout au long des 400 pages de sa copieuse biographie, biographie qualifiée par l’auteur de « livre sensationnel » ! Des recettes pas vraiment sensationnelles, mais qui valent tout de même le coup d’être commentées !

Né le 11 mai 1904

Tout commence dans les vagissements, à 8h45 précisément, un 11 mai de l’année 1904. Dans la ville de Figueras, en Espagne, Don Salvador Dali y Cusi, âgé de 41 ans, déclare à l’état civil la naissance d’un fils prénommé Salvador, Felipe et Jacinto. De sa petite enfance, Dali gardera, toute sa vie durant, une véritable appétence pour le contenu de ses couches-culottes. Les âmes sensibles s’abstiendront de lire ces mémoires parfaitement coprophiles.

Souvenirs rationnels d’une éducation laïque

A l’école laïque, sous la houlette de son enseignant, M. Trayter (« Mal habillé, il empestait fortement et portait un chapeau haut de forme, chose rarissime dans le pays. »), le petit Salvador, détonne curieusement au milieu de ses congénères en haillons. Aucun notable du pays ne place ses enfants à la laïque. Aussi, Salvador se retrouve-t-il isolé, lui le « gosse de riches », parmi une floppée de petits miséreux. « J’étais le seul à apporter avec moi du chocolat chaud dans un thermos enveloppé d’une housse brodée à mes initiales. » En costume marin, le jeune Dali étonne ses camarades qui s’approchent timidement de ce phénomène, afin d’en humer le capillaire. « Mes cheveux brossés amoureusement étaient toujours parfumés […] ».

Souvenirs rationnels d’une éducation catholique

Après l’école publique, l’école des Frères… Salvador, les yeux fixés sur la fenêtre, contemple deux cyprès… Pas très studieux, le jeune garçon. Une santé débile qui nécessite des soins quotidiens. « Au retour de classe, on me donnait à boire une tisane chaude qui embaumait l’essence de sapin. » Le médecin est visité fréquemment, ce qui déclenche chez le jeune patient (guère patient) des crises de colère incontrôlables (« On m’emmenait fréquemment chez ce médecin dont, un jour de rage, j’avais brisé les lunettes »). Les angines à répétition tiennent éloigné de l’école le jeune garçon, qui se laisse choyer sans vergogne et en profite pour se comporter comme un nourrisson (« Je faisais alors mes besoins dans ma chambre. Après quoi, pour dissimuler les mauvaises odeurs, on brûlait du papier d’Arménie ou du sucre. »).

Elucubration autour de petites bonnes en sueur et des odeurs comestibles

Chez Salvador Dali, tout tourne autour de la comestibilité. Enfant, déguisé en petit roi, une cape d’hermine sur les épaules, le petit Salvador hume l’air déplacé par les bonnes en sueur (« la senteur acide des bonnes en sueur »), l’air chargé des parfums de raisin, d’huile de friture, de mayonnaise. Ces « annonces parfumées » des repas le mettent en joie.

Elucubrations autour des épinards coincés entre deux dents

Impossible pour Dali. L’épinard ne fait pas partie de son alimentation, tant ce légume est jugé « horrible » ! Jamais, vous ne le verrez un morceau d’épinard coincé entre les dents. « Cela n’était pas dû au fait que je brosse mes dents avec plus de soins que n’importe qui mais plutôt à la raison contondante que je ne mange jamais d’épinards. »

Elucubrations autour du camembert

Dali « adore le camembert », ce fromage coulant qui lui inspire, un jour de migraine, son célèbre tableau les « montres molles ». En deux heures de temps, le « super-mou de ce fromage coulant » avait trouvé sa place dans l’univers dalinien.

Elucubrations autour des bulles de savon

Si Dali contrôle bien ses sens (du moins c’est ce qu’il affirme), il maîtrise nettement moins bien ses sentiments « légers et fragiles comme des bulles de savon ». « Mille bulles irisées » qui partent dans toutes les directions et risquent d’exploser, subitement, sur l’angle aigu d’un meuble ou en s’accrochant à une branche d’arbre.

Le savon… l’hygiène, la toilette. Le lavage des mains, un acte important, qui permet de faire le vide dans la tête et de trouver la réponse à toutes les questions qui se posent (« c’est d’ailleurs le moment où l’on voit avec le plus de clarté n’importe quelle question ! »).

Elucubrations autour de ses pieds

Dali a de beaux pieds… L’une de ses amies - il a alors 29 ans et se promène pieds nus sur les lieux de son enfance - ne cesse de louer la « beauté » de ces pieds !

Elucubration autour de la ride

Sur le visage de sa grand-mère, le jeune Salvador décode un ensemble de lignes cabalistiques, dont lui seul connaît la signification. « Dans chacune des rides de Lucia ou de ma grand-mère, je lisais cette puissance de la science infuse gravée par la somme douloureuse des plaisirs passés. »

Elucubrations autour d’un adolescent qui se maquille

A l’adolescence, le jeune Dali pose devant la glace, observe ses longs cheveux (il ne les coupe pas et les laisse pousser comme s’il était une fille). Artiste dans l’âme, le jeune garçon cherche à réaliser un « chef-d’œuvre » de sa tête, en composant un visage hors norme. « Souvent, au risque d’être surpris, j’entrais dans la chambre de ma mère pour lui dérober un peu de poudre et un crayon dont je noircissais mes sourcils. Dans la rue, je mordais mes lèvres pour qu’elles paraissent plus rouges […] ».

Plus tard, à Madrid, à l’école des Beaux-Arts, Dali continuera à se faire remarquer par la longueur de ses cheveux. Ses camarades, en effet, quant à eux, se coupaient tous « les cheveux très courts » !

Elucubrations autour d’une coupe de cheveux chez un coiffeur madrilène

Dali fait bande à part au sein des Beaux-Arts. Son habillement, ses longs cheveux, le distinguent de ses camarades. Toutefois, afin de faire un pas vers eux, en vue de l’intégration dans une joyeuse bande, Dali décide-t-il de se faire couper les cheveux. Outre la volonté de s’intégrer, Dali souhaite plus que tout séduire les « femmes élégantes », qui fréquentent les salons de thé à la mode. Pour lui, une femme élégante est une « femme qui vous méprise et qui n’a pas de poils sous les bras ». La vue d’une « aisselle épilée », « délicatement bleutée » constitue alors, pour le jeune étudiant, le sommet du « luxe ».

Passant à l’action, Dali se met en quête d’un coiffeur de quartier, pas celui du Ritz, un coiffeur tout simple capable, de manier les ciseaux avec dextérité dans cet enchevêtrement opaque. « Je n’osai pas aller directement chez le coiffeur du Ritz comme mes amis me l’avaient recommandé. Il me fallait d’abord un « grossiste » qui taillât dans la masse. Ensuite je ferai fignoler ma coiffure au Ritz. » Après de longues recherches (Dali, timide, hésite sur le seuil des boutiques et recule au dernier moment), il franchit le pas et se laisse passer la « serviette autour du cou » par un figaro madrilène ! « La chute des premières mèches m’affola » ! Et si l’histoire de Samson se perpétuait des siècles plus tard, avec comme héros, cette fois, un petit apprenti-peintre ! C’est la « panique » ! Pourtant, lorsque Dali sort vivant de chez le coiffeur, ses craintes évanouies. Il est beau… comme un Dali ! Il ne lui reste plus alors qu’à filer au Ritz… C’est au bar du Ritz et non chez son coiffeur, que Dali finit la soirée, un cocktail à la main. Et là, tout au fond d’un verre à cocktail (le deuxième faut-il préciser) c’est « un cheveu blanc », le « premier cheveu blanc » qui vient gâcher la belle harmonie de l’instant. Quel raffut autour de cette vision horrible ! Dali plonge la main dans le verre, tente de piéger le cheveu coupable… fait mille zouaveries, avant de se rendre compte que le cheveu en question n’est en réalité qu’une « longue fêlure » brillante. De quoi se couper ! De quoi se mettre à saigner, en abondance…

Elucubrations autour d’une recette-maison de brillantine

Être unique, remarquable, inoubliable, soulever l’admiration de ses condisciples… Dali s’y emploie, tous les matins, avec des extravagances vestimentaires et cosmétiques. Un complet le plus chic possible, des chemises en soie de couleurs improbables, une coiffure atypique… Dali ne recule devant rien pour se distinguer de ses camarades. « J’avais passé trois heures à retenir mes cheveux dans un filet spécial et à les lustrer avec du vernis à tableau. Ils étaient devenus une sorte de pâte homogène et dure très lisse et ressemblaient plutôt à un disque de phono moulé sur ma tête. Si je frappais mes cheveux ils rendaient un son métallique. » On peut facilement imaginer la difficulté rencontrée par la suite afin de nettoyer ce vernis dur et collant. Dali, à bout de solutions cosmétiques, en arrive à plonger la tête dans une « bassine de térébenthine ». Une expérience douloureuse qui ne sera pas réitérée… « Par la suite j’employai un moyen moins dangereux, en mettant du jaune d’œuf dans ma brillantine. » ! Et ben voilà… c’est pas plus compliqué que cela ! Comme quoi les recettes-maison c’est marrant à faire mais pas marrant à utiliser… et à éliminer…

Elucubrations autour d’une bonne bouteille de champagne

Rendez-vous dans 15 ans à l’hôtel Palace de Madrid… voilà le pacte scellé par la bande d’étudiants, copains de Dali. Parmi les « chairs élégantes et saupoudrés de bijoux » qui les entourent, les jeunes gens décident de faire le bilan de leur ascension sociale, à moyenne échéance. Dali ne tiendra pas promesse !

Rendez-vous sur le pont supérieur d’un paquebot qui nous mène en Amérique… Une bouteille de champagne à la main, Dali chasse le mal de mer… (« Je bus constamment du champagne pour me donner du courage et chasser le mal de mer, qui, fort heureusement, ne vint pas. »)

Elucubrations autour de Parsifal

Après une soirée bien arrosée, Dali décide de se mettre en scène, de réaliser ce qu’il appelle son « Parsifal » ! Pour ce faire, il commence par passer 1 heure dans sa salle de bains, afin de devenir aussi beau qu’un « danseur de tango argentin ». « Je me douchai, me rasai de très près et collai du vernis à tableau sur mes cheveux malgré les inconvénients qui en résultaient. Mais rien ne serait trop magnifique pour mon « Parsifal ». Puis, je cernai mes yeux avec de la poudre de crayon. Ainsi avais-je l’air terriblement fatal […]. » Une beauté à la « Rudolph Valentino » qui le comble d’aise. En quelques gestes cosmétiques, Dali a atteint « le prototype même de la beauté masculine » ! Il ne lui reste plus qu’à se mettre en chasse de 6 femmes élégantes pour que le spectacle prenne vie. « L’important était que quatre d’entre elles aient les aisselles épilées et que les deux autres, au contraire, gardassent leurs poils sous les bras. » Le « Parsifal » de Dali n’a pas eu lieu… la soirée se termina sous la forme d’une bonne indigestion. On vous passe les détails !

Elucubrations autour de billets de banque

Bien avant que Serge Gainsbourg ne mette le feu à un billet de 500 francs à la télévision,2 Salvador Dali pratiquait déjà le même type de geste dans les bars de Madrid, sous l’œil affolé de demi-mondaines en quête de compagnie. « Un de mes jeux favoris consistait à plonger des billets de banque dans du whisky et à attendre leur désagrégation. »

Elucubrations autour d’un grain de beauté

Confusions, hallucinations… certains jours, Salvador Dali n’a visiblement pas les yeux en face des trous, comme en témoigne l’aventure de « la tique » ! Dans un minable hôtel parisien, alors qu’il vient de passer la soirée avec le poète Robert Desnos, voilà notre Dali qui tombe dans un sommeil fiévreux. La chambre douteuse abrite semble-t-il des hôtes à type de cafards, punaises et tiques. Au réveil, Dali, affolé, sent dans son dos une présence étrangère sous la forme - semble-t-il - d’une tique « profondément enfoncée » dans sa peau. Dégoûté, l’artiste sort de son nécessaire de toilette une lame de rasoir, afin de tenter l’extraction de l’hôte indésirable. Y allant de bon cœur, il provoque une hémorragie, semant l’émoi dans l’établissement douteux. Devant ce client couvert de sang, la direction fait mander un médecin qui diagnostique un « grain de beauté » et non « un parasite ». Très étonné de l’état dans lequel il trouve son patient, le médecin ajoute : « Je comprends que l’on veuille supprimer ces taches-là quand on en a une sur le visage, et encore c’est absurde d’y toucher ! Mais dans le dos, qu’est-ce que cela peut vous faire ! »

Elucubrations cosmétiques permettant de séduire la femme d’un ami

Lorsque Gala - la femme de Paul Eluard - rencontre Dali, le coup de foudre n’est pas immédiat. Dali apparait à la jeune femme sous la forme d’un « personnage antipathique et insupportable », du fait de « cheveux pommadés » qui lui donnent l’aspect « d’un danseur professionnel de tango argentin. » Pour séduire Gala, Dali a pourtant passé plus d’une heure à « coller » ses cheveux et à raser sa barbe « avec un soin maniaque. » Pour la deuxième rencontre - un rendez-vous sur la plage pour une baignade est prévu, Dali hésite entre plusieurs looks. Peut-être emprunter les boucles d’oreille de sa sœur ? Peut-être ébouriffer ses cheveux au lieu de les coller ? Que faire pour mettre en valeur sa belle « peau bronzée » ? Finalement, il opte pour un rasage des aisselles (« […] je me rasai les aisselles et comme je n'obtenais pas le bleu idéal observé chez les élégantes madrilènes, je pris un peu de bleu à laver le linge et, en le mélangeant avec de la poudre, me teignis sous les bras. Ce fut très beau un court instant, jusqu’à ce que ma sueur fasse dégouliner ce maquillage en traînées bleuâtres tout le long de mon corps. » Devant un tel désastre, Dali se met alors à se frotter les aisselles. De bleues, celles-ci virent au rose ! Et là, c’est le flash… c’est du rouge qu’il faut pour parer ces aisselles ! « Avec mon Gillette je me rasai de nouveau si près que j’eus bientôt les aisselles ensanglantées. »

Restait alors à mettre au point un parfum adapté à la situation… L’eau de Cologne du commerce écœurant Dali, il ne lui resta plus qu’à se faire « nez », afin de mettre au point une fragrance à la hauteur de sa folie créatrice. « Ah ! s’il avait pu se parfumer à l’odeur de ce bouc qui passait tous les matins sous ses fenêtres ! » Et pourquoi pas ? « Je venais de trouver mon parfum ! » Sur un réchaud, Dali touille « avec un pinceau » de la « colle de poisson dans de l’eau » avec des « excréments de chèvre ». En adaptant le pourcentage de chaque ingrédient (un coup, le produit obtenu sent trop le « poisson », une autre fois, trop la « chèvre »), Dali arrive à composer la « mixture » « parfaite ». Et ce d’autant plus qu’il y incorpore, en touche finale, « quelques gouttes d’une bouteille d’huile d’aspic ». « ô miracle ! C’était l’odeur exacte du bouc. En refroidissant, j’obtins une pâte dont je me frottai le corps. J’étais prêt. » Quel génie ce Dali, qui compose sous nos yeux ce que certains appellent, aujourd’hui, un parfum solide à caractère innovant. Sans alcool, 100 % naturel, ce parfum spécial qui pêche du côté du véganisme, constitue un bel exemple de parfumerie de niche (et le terme est ici parfaitement bien choisi du fait de sa bestialité). On suppose que ce parfum plut à Gala, étant donné la suite donnée à leur aventure… On sait également, par des confidences de Dali, que la toilette du soir fut homérique ! « Je me déshabillai et me lavai de mon mieux pour me débarrasser de l’étouffante odeur que j’exhalais, ne conservant que le collier de perles et le géranium réduit de moitié. »

Elucubrations capillaires et cosmétiques dans un paisible village de pêcheurs

Avec Gala, la vie est simple. Une villa à Torremolinos, à côté d’un « champ d’œillets ». Des séances de bronzage sur la plage. « Nous devînmes aussi bronzés que les pêcheurs ». Et Gala prit « l’air d’un gamin brûlé par le soleil. » Et une addiction pour l’huile d’olive tant dans la cuisine que dans la salle de bains. « A cette époque, je fus pris de passion pour l’huile d’olive. J’en mettais partout. De bonne heure le matin, j’y trempais mon pain grillé avec des anchois. Ce qui restait, je le buvais ou le faisais dégouliner sur ma tête et ma poitrine, me frottant les cheveux qui repoussèrent à une allure folle. » Idée reçue, cher Dali. Aucune huile végétale aussi noble soit-elle ne possède cette capacité de favoriser la pousse du poil !

Elucubrations médicales pour rester en bonne santé

Gala a dressé autour de Dali un rempart protecteur… Dans « sa coquille de bernard-l’hermite » construite avec amour par la muse, le « mou, le super-mou » Dali n’est plus qu’un hypochondriaque qui craint mille maladies. Dès que Gala s’absente, Salvador se soigne préventivement… Surtout ne pas succomber à la maladie. « A la moindre mucosité anormale, je me précipitais pour mettre des gouttes dans mon nez. Je passais mes journées à me gargariser. Le moindre soupçon de bouton ou d’eczéma m’affolait et je m’enduisais de crèmes pour la nuit. »

Et puis des informations en vrac

Les escargots, son plat favori ! Le « lapin aux oignons réchauffé », un plat qui lui fait claquer la langue (« Et, croyez-moi, ce claquement prosaïque - qui ressemble tant à un bouchon de champagne sautant - est exactement le son de cette chose si rarement comprise : la satisfaction. »)

Les saignements de nez incoercibles, son calvaire. Pour les faire passer, des « serviettes imprégnées de vinaigre » pour entourer sa tête et une « grande clé froide » dans le dos !

Un premier amour enfantin sur fond de cueillette de tilleul (« Des draps blancs avaient été tendus par terre pour recueillir les premières branches lourdement fleuries ») ; une petite fille « d’une douzaine d’années » au visage « bronzé », « brûlé de soleil », aussi belle qu’un « ange » ! « Le parfum purifiant du tilleul », un parfum qui gorge les sens (les « fleurs de tilleul dont le parfum gorgeait mes sens ») restera, pour toujours, gravé dans la mémoire olfactive du peintre.

Un deuxième amour, à l’âge adulte… Une jeune fille enrhumée, dont l’aisselle distille une « odeur sublime, sorte de mélange d’héliotrope, de brebis et de café grillé. »

Un havre de paix dans la maison de Cadaquès : la plage, le soleil, un chevalet… et Gala pour orchestrer tout cela ! Sur les rochers, Dali se fait « rôtir » au soleil, avant de se jeter dans « l’eau bleu de Prusse » !

Et des idées d’inventions

Un cerveau qui fonctionne à 100 à l’heure, sans arrêt, sans répit. Un besoin irrépressible de se faire remarquer. L’envie de créer en permanence toutes sortes d’objets, de cosmétiques. Dans ces mémoires, Dali nous confie ses idées en matière de produits cosmétiques ou d’accessoires esthétiques. Des « ongles artificiels avec des petits miroirs pour se regarder », « des maquillages combinés pour effacer toutes les ombres du visage »… Dali fourmille d’idées. Charge à Gala, en bon représentant de commerce, de valoriser la trouvaille. « Si les ongles postiches n’ont pas marché, essayons le cinéma tactile, les lunettes kaléidoscopiques ou les voitures aérodynamiques. » ! Un représentant pas forcément très efficace qui se fait piquer des idées… « Un jour nous apprîmes que l’on venait de lancer des ongles postiches pour le soir […] » !

La vie secrète de Salvador Dali, en bref

Paranoïaque, ce Dali, qui aimerait bien faire breveter son cerveau dans son entièreté ! On le pille, on le copie, on l’imite (mal !)… « Si le Dali intégral se révélait une nourriture inassimilable, trop poivrée, en revanche la recette qui consistait à saupoudrer d’un peu de Dali les mauvais plats refroidis était monnaie courante. » Cette monnaie qui lui échappe rend fou celui qu’André Breton a baptisé, avec justesse, et en exploitant l’anagramme de son nom, Avida Dollars !

Dans ses mémoires, on croit entendre la chanson-bouillie de Jacques Dutronc (« Merde in France, cacapoum »)3 parce que oui, bien souvent, ça ne vole pas très haut. Le texte n’est pas très digeste, à force de rester plaqué au niveau intestinal.

On y trouve, toutefois, des perles cosmétiques en matière de recettes–maison, en particulier. Un parfum à odeur de bouc, il fallait oser !

Un grand merci à Jean-Claude A. Coiffard, poète et plasticien, pour l'illustration du jour !

Bibliographie

1 Dali S., La vie secrète de Salvador Dali, L’imaginaire Gallimard, La table ronde, 1952, 437 pages

2 https://enfaits.fr/2021/03/30/le-jour-ou-serge-gainsbourg-a-brule-en-direct-un-billet-de-500-francs/

3 https://www.paroles.net/jacques-dutronc/paroles-merde-in-france

 

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