> 26 août 2020
La société Alban Muller, une société d’ingrédients cosmétiques bien connue des professionnels du milieu, se lance dans la fabrication et dans la vente de produits finis. Celle qui se définit comme le « génie botanique » se lance dans la bataille cosmétique la fleur au fusil et le bagage constellé d’étiquettes diverses et variées : « Non testé sur animaux » (c’est normal et réglementaire), « made in France » (rien à redire, c’est un plus indéniable), « produits certifiés bio » (l’appellation « bio » ne garantit en rien la qualité d’un cosmétique), « produits non nocifs » (entendre ici « pour la planète » - là encore une excellente idée), « protège la biodiversité » (tiens, on nous l’avait encore jamais faite celle-là, mais cela devrait aller de soi suite à la signature du protocole de Nagoya).1
On l’aura compris, Alban Muller veut faire reposer notre peau sur un lit végétal. Pour ce faire, 6 produits sont mis à notre disposition.
Et pour commencer, Alban Muller a décidé de nous faire peur en nous disant : « Pendant que vous lisez cette page sur internet, savez-vous que votre peau s’abîme ? » Bon, nous y voilà... La lumière bleue, voilà l’ennemie.2 On en frémit... Et dire que l’on se croyait en sécurité sur le joli site de la marque !
Pas de panique, Alban Muller dégaine aussi sec son arme anti-lumière bleue. Pour éviter le teint terne et les taches cutanées consécutives à un excès de ce type de rayonnement, nous est tendu, par écran interposé, un sérum multi-actions Complexe éclat jeunesse, que l’on pourra glisser judicieusement sous la crème de jour ou sous la crème de nuit, selon que l’on est plutôt du jour ou de la nuit.
Présenté une fois de plus comme un soin sur-concentré en actifs cosmétiques (c’est faux !3), ce sérum n’en a pas moins une composition bien sympathique.4
Ce gel aqueux est composé majoritairement d’eau et d’humectants. La glycérine n’a plus besoin d’être présentée ; elle est utilisée depuis des lustres pour son effet « capteur d’eau » dans le pot et la peau.5 L’érythritol est, quant à lui, un peu plus original. Dans la littérature scientifique, il est présenté comme un ingrédient édulcorant, intéressant pour les domaines alimentaire et pharmaceutique ; il est contenu dans des fruits et des champignons, ainsi que dans des aliments fermentés telle la sauce soja. Des réactions anaphylactiques rares sont signalées, en cas d’ingestion.6 Dans le cas de ce sérum, pas d’ingestion prévue bien entendu. L’érythritol ici est donc un humectant qui complète l’action de la glycérine. Idem pour le propanediol. Idem pour le dérivé d’acide pyrrolidone-carboxylique.7
Le dérivé de vitamine C (ascorbyl glucoside), à propriétés anti-oxydantes,8 s’inscrit dans la lutte contre les effets de la lumière bleue.
Viennent ensuite différents extraits qui nous font voyager des rives de la méditerranée aux confins de la Chine.
La padine (Padina pavonica) est une algue brune méditerranéenne très peu utilisée dans le domaine cosmétique. Certains extraits présentent une activité anti-hyaluronidasique (en inhibant cette enzyme, on évite ainsi la dégradation de l’acide hyaluronique, l’un des constituants de la matrice extracellulaire du derme) qui peut être intéressante dans les produits cosmétiques souhaitant donner du « rebondi » à la peau.9
La chicorée sauvage, quant à elle, a bien plus à apporter aux cosmétiques que ces doux yeux bleus. Des extraits obtenus à partir de sa racine sont très largement étudiés et font l’objet de publications scientifiques. A pu être mis en évidence un effet bénéfique sur la fonction barrière de la peau de formules en contenant. Mieux protégée, la peau est mieux hydratée.10,11 Et ceci avec une innocuité prouvée.12
Le fruit de Physalis alkekengi, enfin, bien nommé « amour en cage », serait capable de nous guérir de tout et du reste si l’on croit la médecine traditionnelle chinoise. Plus de toux, de pharyngite, de gorge irritée, de dysurie, de pemphigus, d’eczéma ou de jaunisse pour qui sait s’attirer les bonnes grâces de ce fruit bien protégé. Plus sérieusement, il est possible d’isoler un grand nombre de molécules actives dans le fruit ou les différents organes de la plante. Des flavonoïdes à effets anti-inflammatoire et anti-radicalaire peuvent être exploitables dans le cadre qui nous intéresse ici.13
Ajoutons à cela de l’aloe vera et il n’y aura plus rien à ajouter.14
Seul bémol, son prix (comptez une soixantaine d’euros !)
Bibliographie
1 https://www.liberation.fr/terre/2010/10/30/a-nagoya-un-accord-historique-sur-la-biodiversite_690343
2 https://www.regard-sur-les-cosmetiques.fr/nos-regards/pour-ou-contre-la-lumiere-bleue-486/
3 https://www.regard-sur-les-cosmetiques.fr/nos-regards/les-serums-que-d-eau-que-d-eau-95/
4 https://albanmuller.com/blogs/experts/le-serum-le-graal-des-belles-peaux
6 Shiro Sugiura, Yasuto Kondo, Ikuya Tsuge, Tomoko Nakagawa, Norihisa Koyama, IgE-dependent mechanism and successful desensitization of erythritol allergy, Annals of Allergy, Asthma & Immunology, 117, 3, 2016, Pages 320-321.e1
10 Fayad S, Nehmé R, Tannoury M, Lesellier E, Pichon C, Morin P. Macroalga Padina pavonica water extracts obtained by pressurized liquid extraction and microwave-assisted extraction inhibit hyaluronidase activity as shown by capillary electrophoresis. J Chromatogr A., 2017, 12, 1497, Pages 19-27
11 Maia Campos PM, G Mercurio D, O Melo M, Closs-Gonthier B. Cichorium intybus root extract: A "vitamin D-like" active ingredient to improve skin barrier function. J Dermatolog Treat., 2017, 28, 1, Pages 78-81
12 Campos PMBGM, Benevenuto CG, Calixto LS, Melo MO, Pereira KC, Gaspar LR. Spirulina, Palmaria Palmata, Cichorium Intybus, and Medicago Sativa extracts in cosmetic formulations: an integrated approach of in vitro toxicity and in vivo acceptability studies. Cutan Ocul Toxicol., 2019, 38, 4, Pages 322-329
13 Li AL, Chen BJ, Li GH, Zhou MX, Li YR, Ren DM, Lou HX, Wang XN, Shen T. Physalis alkekengi L. var. franchetii (Mast.) Makino: An ethnomedical, phytochemical and pharmacological review., J Ethnopharmacol. 2018, 10, 210, Pages 260-274
14 https://www.regard-sur-les-cosmetiques.fr/nos-regards/aloe-vera-c-est-trop-beau-pour-etre-vrai-422/
Composition
Complexe éclat jeunesse sérum multi-actions : Aqua/Water/Eau, Glycerin, Erythritol, Propanediol, Ascorbyl Glucoside, Sodium PCA, Aloe Barbadensis Leaf Juice Powder, Padina Pavonica Thallus Extract, Xanthan Gum, Ectoin, Cichorium Intybus (Chicory) Root Extract, Physalis Alkekengi Fruit Extract, Sodium Levulinate, Sclerotium Gum, Sodium Hydroxide, Maltodextrin, Sodium Benzoate, Sodium Anisate, Sodium Dehydroacetate
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