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La trolamine, un drôle de principe actif !

> 26 septembre 2018

La trolamine, un drôle de principe actif !

Un médicament topique à base de trolamine

A l’origine, on trouve un médicament topique, Biafine, indiqué en cas de brûlures cutanées. Le résumé des caractéristiques de la spécialité ne manquera pas de divertir toute personne possédant quelques compétences scientifiques. La trolamine ou triéthanolamine y est propulsée au rang de principe actif.

Un savon guérisseur 

Du point de vue pharmacologique, on nous explique comment « cela marche » comme pourrait le dire Michel Chevalet. « La trolamine, associée à des acides gras comme l’acide stéarique, agit comme un émulsifiant. Après application cutanée, elle développe des propriétés occlusives et hydratantes, augmente le recrutement des macrophages au niveau de la plaie, favorise la cicatrisation au niveau du derme et la formation de tissu de granulation. » (http://base-donnees-publique.medicaments.gouv.fr/affichageDoc.php?specid=69931588&typedoc=R). On en déduit donc que le principe actif n’est pas la trolamine, mais le résultat d’une réaction chimique qui met en scène une base et un acide gras. Une telle réaction se nomme saponification. Le résultat de la saponification est un savon... ce cosmétique du quotidien ! Ce savon est bien un émulsifiant comme indiqué. Il est étonnant de présenter ce tensioactif anionique comme une matière première occlusive et hydratante dans la mesure où, comme tout tensioactif, il perturbe l’intégrité des membranes cellulaires et favorise par là-même la pénétration d’un certain nombre d’ingrédients et dans la mesure où ce tensioactif n’est pas hydratant mais, au contraire, desséchant lorsque sa proportion est élevée dans le produit final (le savon utilisé dans le cadre de la toilette quotidienne, par exemple). Le savon, ingrédient-phare des cosmétiques de la fin du XIXe siècle et du début du XXe siècle se voit ainsi auréolé d’une aura toute médicale. 

Les excipients de la formule 

Biafine est une émulsion qui contient également les ingrédients suivants : stéarate d'éthylène glycol (tensioactif non ionique permettant de stabiliser la formule), acide stéarique (qui permet de former un savon en présence d’une base ; lorsqu’il est en excès il joue le rôle de facteur de consistance), palmitate de cétyle (facteur de consistance), paraffine solide (facteur de consistance, anti-déshydratant), paraffine liquide (facteur de consistance, anti-déshydratant), perhydrosqualène (émollient), propylèneglycol (humectant), huile d'avocat (émollient), alginate de trolamine et de sodium (gélifiants), sorbate de potassium, parahydroxybenzoate de méthyle sodé (E 219) et parahydroxybenzoate de propyle sodé (E 217) (conservateurs antimicrobiens), arôme Yerbatone*, eau purifiée (excipient). Notons que le parfum est source d’allergènes à déclaration obligatoire (si le produit avait un statut de cosmétique) ; on y trouve, en particulier du Lyral, un allergène nouvellement interdit par la Réglementation cosmétique en vigueur.

Des génériques qui emboîtent le pas 

Les génériques, en bonnes copies du princeps, emboîtent le pas. Si vous voulez un générique de Biafine vous demanderez donc « Trolamine »...


A quand des topiques dont le principe actif sera la soude ou la potasse ?

Puisque la trolamine est le principe actif de Biafine (nous aurions plutôt indiqués comme principes actifs paraffine solide, paraffine liquide et huile d’avocat), nous attendons de pieds fermes des spécialités dont les principes actifs seront la soude et/ou la potasse.

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