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Histoire de l’arroseur arrosé avec en plus… un soupçon de poudre de riz

> 15 janvier 2023

Histoire de l’arroseur arrosé avec en plus… un soupçon de poudre de riz

Thérèse chez le docteur1… Une dizaine d’années après avoir tenté d’empoisonner son époux,2 Thérèse Desqueyroux traîne une vie de misère et suit, de loin en loin, une thérapie avec le bon Docteur Elisée Schwartz. Ce dernier, cocooné par une secrétaire vigilante (Melle Parpin) et par une épouse bienveillante (Catherine), se complaît dans l’écoute de ses patients névrotiques. Ce psychiatre, qui fréquente les soirées louches et les bars nocturnes afin d’étoffer sa clientèle, semble prendre un malin plaisir à se vautrer dans les malheurs de ses patients.

Elisée Schwartz

Un psychiatre bien mal dans sa peau qui passe son temps à humilier une femme (la sienne), beaucoup trop intelligente pour lui. Une « figure bronzée, tannée », sous « d’épais cheveux gris ».

Catherine Schwartz

Fille du baron et de la baronne de Borresche, Catherine, à peine une licence de lettres en poche, se jette dans les bras du psychiatre de son père. Pour fuir un milieu bourgeois étriqué, elle se jette dans la gueule du loup, un loup à l’admirable dentition (« une bouche saine »), prêt à la dévorer toute crue. Le Dr Schwartz sera sans pitié pour cette femme admirable ; humiliation sur humiliation, histoire de casser une personnalité un peu trop forte.

Lorsqu’un soir, fort tard, Thérèse débarque chez les Schwartz pour une consultation nocturne, Catherine ne peut résister à la tentation… L’oreille collée à la porte, elle ne perd pas une miette de la confession de Thérèse qui raconte, en long, en large et en travers ses déboires amoureux (un petit jeune homme de 24 ans lui a, en effet, tapé dans l’œil, « La jeunesse sans alliage, la jeunesse à l’état pur. »)

Et puis tout d’un coup, voilà Elisée qui se met à crier « Désarme-la vite ! ». Penses-tu… La pauvre Thérèse n’a aucune arme dans son sac. La lâcheté d’Elisée… voilà le déclic qui, au bout de 20 pénibles années de mariage, va conduire Catherine au divorce.

Thérèse Desqueyroux

Une simple toque sur la tête. Une toque disposée avec soin, tout de même, afin de masquer le « front trop vaste » qui la caractérise. « Des cheveux coupés, pauvres et rares, déjà grisonnants ; ni poudre ni rouge n’apparaissait sur les joues creuses, sur ces lèvres ravalées, sur ces pommettes. La peau jaune tournait au marron sous les yeux. » Thérèse, déjà vieillissante, est attirée par les jeunes hommes comme si ceux-ci étaient encore capables de lui restituer un semblant de jeunesse.2

Melle Parpin

Cette secrétaire particulière, dévouée corps et âme à son maître, est une femme bien ordinaire, qui ne sort jamais sans chapeau et qui, en quittant le cabinet médical, poudre « ses joues échauffées ».

Thérèse chez le docteur, en bref

Bien fait, pour le Dr Schwartz semble nous dire François Mauriac, qui claque la porte du cabinet d’un coup sec. Ce psychiatre aura bien besoin d’une psychanalyse, lorsque sa femme l’aura abandonné… L’arroseur arrosé, en somme !

Un grand merci à Jean-Claude A. Coiffard, poète et plasticien, pour son illustration du jour.

Bibliographie

1 Mauriac F., Thérèse chez le docteur, Les chefs d’œuvre de François Mauriac, Tome III, Cercle du bibliophile, Grasset, 381 pages

2 Se maquiller pour être présentable | Regard sur les cosmétiques (regard-sur-les-cosmetiques.fr)

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