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Fantômette au secours d’un peintre excentrique qui se coiffe à la diable et sent le menthol et la lavande

> 29 avril 2021

Fantômette au secours d’un peintre excentrique qui se coiffe à la diable et sent le menthol et la lavande

Lorsque Fantômette se retrouve face à un fantôme,1 ça risque de barder ! Il y a effectivement un fantôme, un vrai, un grand, un terrible, tout chargé de chaînes grinçantes, qui vient, chaque nuit, tourner autour de la villa des Pétunias, occupée par Agathe et Germaine, les « demoiselles Faïence », les tantes de Ficelle, l’une des copines de Fantômette. Pour bien s’y retrouver, il convient de rappeler que Françoise, une petite brune piquante, copine de Ficelle et Boulotte (deux petites filles dont la morphologie est facile à déduire de leurs sobriquets) se transforme à volonté en Fantômette, une justicière qui se promène en justaucorps de soie jaune, « coiffée de son bonnet à pompon », un masque noir sur les yeux !

Les demoiselles Faïence, de bien agréables vieilles dames

Agathe et Germaine sont de charmantes vieilles dames, qui cultivent les cactus et boivent des infusions de camomille ou de tilleul, des boissons jugées vraiment trop fades par l’héroïne du roman.

Ficelle et Boulotte, de charmantes copines qui font - qui sont - des bulles

Ficelle ressemble à un « crayon », à une « aiguille à tricoter » ou à une « baguette de tambour ». Ses cheveux, tels une « botte de paille », couronnent cette structure filiforme. Rêvant de devenir mannequin (« Tu sais, les dames qui présentent des robes dans les maisons de haute couture »), elle s’entraîne à marcher droit, avec le livre de cuisine de Boulotte sur la tête.

Championne des bulles de savon, Ficelle les confectionne en mettant une « cuiller à café de shampooing dans un verre d’eau ». A l’aide d’un « tube de carton de 3 centimètres de diamètre » de superbes bulles prennent ainsi vie ; des bulles monstrueuses, de la taille d’un melon, qui se parent de toutes sortes de couleurs (rose, mauve, verte...) ; des bulles extra-résistantes, capables de rebondir sur la moquette sans éclater. « La bulle incassable » vient d’être inventée. Ficelle, ne s’arrête pourtant pas là et s’attelle désormais à une nouvelle mission… la mise au point de « bulles cubiques ».

Boulotte a, quant à elle, « la sphéricité d’un bonbon, d’un globe terrestre ou d’une citrouille ». On la trouve toujours « un bout de bois de réglisse à la bouche » ou bien des gaufrettes, des biscuits champagne à la main ou encore une tarte aux framboises, une poire ou une pomme aux lèvres. Avec Françoise et Ficelle, Boulotte aime écouter de la musique grâce à son électrophone, passe son temps « à enrouler leurs mèches de cheveux sur des bigoudis auto-collants » ou à jouer de la guitare à 2 cordes !

Fantômette, une héroïne masquée et coquette

Dans la lutte qui oppose le fantôme à Fantômette, des coups sont donnés et rendus ; un « joli coup sur le crâne » et notre justicière s’écroule ! Un peu « d’eau de fleur d’oranger sur un mouchoir pour lui bassiner les tempes », « une goutte de verveine », remède « souverain pour le mal de tête » et ça repart ! Le fantôme est visiblement plus matériel qu’une simple âme en peine. Parallèlement à ces apparitions nocturnes, il se passe au « musée d’Art futuriste de Framboisy » de drôles de choses. Les toiles vont et viennent - les vraies, les fausses - ; le commissaire Maigrelet, pipe aux lèvres, est sur les dents ! Si Françoise est une détective hors-pair, elle n’en reste pas moins une petite fille pleine de coquetterie qui réajuste ses boucles brunes d’un coup de peigne lorsque son célèbre bonnet à pompon n’est plus sur sa tête.

Popovitch, un peintre qui sent le menthol et la lavande

Popovitch est un peintre d’avant-garde très prometteur, qui utilise, pour peindre, des « brosses en soie de porcelet à 28 poils », made in Japan, trempées dans de « l’huile de soja parfumée au menthol ». Ses œuvres sont exposées au musée de Framboisy. Le maître a une drôle de dégaine avec des cheveux « coiffés en cornes de diable ». « Sur sa tête, ses cheveux cosmétiqués se dressaient en deux pointes démesurées, comme des antennes. » ; la barbiche très effilée, qui pend à son menton est, elle aussi, soigneusement cirée afin de lui conférer l’aspect « d’un monstre marin » ou d’un extra-terrestre. Le maître fume une pipe, qui dégage un « nuage parfumé rappelant l’encens ». Son hôtel particulier, situé à Paris, avenue de l’Hippodrome est délicatement parfumé à la lavande.

Le Furet, un voleur qui se maquille et change d’aspect à volonté

Le Furet, l’ennemi implacable de Fantômette, a flairé le bon coup... Les œuvres de Popovitch sont très cotées ; il les lui faut à tout prix. Capable de se transformer à volonté en expert en peintures (M. Floquet, « le plus grand expert du monde »), en peintre de renom (Popovitch lui-même), en commissaire Maigrelet (lui-même) ou en comte de la Pastille, le Furet dispose de toute une palette de maquillage pour se transformer à volonté. « Habilement grimé », postiches sur la tête ou sur le menton, le Furet se glisse partout, avec toujours autant d’aisance. Démasqué par Fantômette, le Furet plastronne « Vous m’avez reconnu ? Bon, d’accord. Mais avouez que mon maquillage est bon tout de même. Tout le monde s’y est laissé prendre. »

Fantômette et la maison hantée, en bref

Après Fantômas le voleur masqué (créé en 1910), Georges Chaulet nous propose, en 1961, une héroïne masquée ; habile, talentueuse, rusée, Fantômette - ou Françoise, selon les moments de la journée - résout les énigmes les plus ardues, en conservant toujours le sourire. Ses copines, Ficelle et Boulotte, sont, bien sûr admiratives, sans toutefois faire le lien entre leur meilleure amie et la justicière masquée. Dans l’opus Fantômette et la maison hantée, Françoise réussit, une fois de plus, à contrecarrer le Furet ; les œuvres d’art sont restituées à leur propriétaire ; la maison des tantes Faïence est désensorcelée (les bandits se servaient de cette jolie villa très lumineuse pour réaliser des copies des peintures volées). Tout est bien qui finit bien dans le monde poétique de Georges Chaulet !

Bibliographie

1 Chaulet G., Fantômette et la maison hantée, Hachette, Bibliothèque rose, 1971, 183 pages

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