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Enfin une thèse d’exercice qui considère la socio-esthétique comme une valeur ajoutée de la pratique officinale !

> 06 juillet 2018

Enfin une thèse d’exercice qui considère la socio-esthétique comme une valeur ajoutée de la pratique officinale !

En ce 6 juillet 2018, dans la salle des thèses de la Faculté de Pharmacie de Nantes s’est tenue la soutenance de thèse de Mme Juliette Marradès devant un jury composé de Mmes Muriel Olivier (pharmacienne à Saint-Jean-de-Monts), Laurence Coiffard et Céline Couteau et de M. Emmanuel Legrand (Pharmacien et Président du syndicat des pharmaciens de Vendée). Ce n’est, bien sûr, pas la première thèse à y être soutenue, ce ne sera pas non plus la dernière. La particularité de cette thèse réside dans son sujet extrêmement original : « La pratique de la socio-esthétique : une valeur ajoutée à l’officine et un service complémentaire proposé et offert à la clientèle. »

Un mot d’abord sur son auteur : Juliette Marradès possède un parcours réellement atypique. Après une terminale S au lycée Jules Vernes de Nantes, elle effectue une formation de conseil en image et communication à l'International Success Institut de Nantes (devenu depuis l'Ecole Internationale de Mode EIDM). Dès cette année d’étude, elle est sensibilisée aux différentes approches de la prise en charge du patient/de la personne. Elle est, en effet, amenée à prodiguer des conseils auprès de femmes atteintes de cancer, sous l’égide de la Ligue contre le cancer. Trouver pour chaque femme, les couleurs qui les subliment, telle est la mission qui lui est alors confiée. Cela ne s’arrête pas là puisqu’elle va également entrer en contact avec de jeunes travailleurs logés en foyer ; elle devra leur apporter de l’aide de façon à pouvoir opter pour le style vestimentaire le plus approprié. Sans en avoir pris conscience, Juliette s’attache à venir en aide à des personnes fragilisées. Elle enchaine alors avec un BTS esthétique-cosmétique et entend parler pour la première fois de socio-esthétique. La graine est semée, il ne reste plus qu’à attendre le moment propice ! Elle termine par 6 ans d'études de pharmacie. C’est tout naturellement vers le parcours officine qu’elle se dirige. « C’est le terrain idéal pour conseiller et mettre en pratique mes connaissances pharmaceutiques ainsi que cosmétiques et esthétiques. » nous confie-t-elle. « La combinaison de ces 3 formations m’a fait prendre conscience des multiples possibilités en matière de prise en charge du patient/client, notamment au travers de la socio-esthétique. La découverte de l’existence du DU de socio-esthétique de Nantes a constitué le déclic, « la passerelle entre ma formation initiale d’esthéticienne et celle de pharmacien ».

On peut dire que Juliette est quelqu’un qui aime les études et les chemins détournés. Pour autant ce parcours est extrêmement logique pour qui sait lire entre les lignes… Chaque étape de ce cursus a permis à Juliette de collecter les différentes pièces d’un puzzle qui a désormais toute sa signification.

Cette thèse se présente sous la forme « d’un pavé » de 264 pages. Juliette y répond, bien sûr, à la question : « Qu’est-ce que la socio-esthétique ? » en détaillant quelques définitions, celle du Répertoire National des Certifications Professionnelles (« la pratique professionnelle des soins esthétiques, auprès des personnes fragilisées par une atteinte à leur intégrité physique (maladie, accident, vieillesse, etc.), psychique (handicap, toxicomanie, tec.), ou en détresse sociale (chômage, exclusion sociale, détention, etc.) ou celle de l’ Office national d'information sur les enseignements et les professions ONISEP (« une approche de l’esthétique comme vertu thérapeutique. »).

La socio-esthétique y apparaît comme une discipline trait d’union entre le domaine médical et le domaine de la beauté. La socio-esthétique semble jouer le rôle de croupière et rebat les cartes d’une partie commencée il y a fort longtemps.

Un cosmétique n’est pas un médicament nous dit Simone Veil en 1975 ; un cosmétique est un produit dont la fonction doit être définie et dont la production doit être contrôlée ajoute celle qui souhaite faire du ménage dans un domaine où la poussière des ans s’est accumulée au point de rendre dangereux un produit utilisé au quotidien (https://www.regard-sur-les-cosmetiques.fr/nos-regards/simone-veil-ou-le-combat-pour-des-cosmetiques-surs-d-emploi-673/).

Un cosmétique peut posséder des vertus thérapeutiques nous dit l’ONISEP ; un cosmétique en permettant « un état de complet bien-être physique, mental et social » concourt à l’état de bonne santé, nous souffle l’Organisation Mondiale de la Santé.

Et oui, comme nous l’avons montré avec humour il y a de cela quelques Regards, le cosmétique est un produit-kangourou qui possède plus d’une définition dans sa poche (https://www.regard-sur-les-cosmetiques.fr/nos-regards/exercices-de-style-a-la-maniere-de-raymond-queneau-autour-de-la-definition-du-cosmetique-672/).

Dès les premières pages de cette thèse d’exercice originale, le contexte est posé. On découvre le métier de socio-esthéticienne et les qualités requises, les publics concernés, les actes réalisés, les bénéfices obtenus, la façon de choisir les cosmétiques en fonction du public visé. Enfin, Juliette décrit un cas pratique, celui de Mme X, une dame de 69 ans atteinte d’un cancer du sein. De l’hygiène du visage au traitement de la sécheresse cutanée en passant par le soin des ongles ou la pose d’un maquillage correcteur, Juliette prend en charge sa patiente et répond à toutes les questions qu’elle se pose. L’importance de la photo-protection topique est bien évidemment abordée.

Cette thèse s’achève par une question : « Les besoins toujours grandissants des patients de l’officine pour lesquels la socio-esthétique vient apporter un début de réponse mèneront-ils - prochainement – au développement d’un espace dédié à la socio-esthétique dans un nombre grandissant d’officines ? Cette question n’en est pas vraiment une pour Juliette ; c’est plutôt un souhait…

A la lecture de cette thèse, on comprend qu’il n’y a pas de hasard et que le parcours de Juliette est plein de bon sens. L’acquisition d’une pratique esthétique, l’acquisition de connaissances médicales… brassez le tout et vous obtiendrez le pharmacien de demain, celui qui connait toutes les facettes du cosmétique, qui sait comment le choisir, comment le conseiller, comment l’appliquer !

Ah, un mot encore… Juliette a réalisé une très belle présentation orale, elle ne s’est pas laissée décontenancée par les questions des membres du jury, elle a donc obtenu la mention « Très bien » et « Proposition au prix de thèse » !

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