Nos regards
Donne-moi ton chapeau, je te dirais qui tu es !

> 13 octobre 2018

Donne-moi ton chapeau, je te dirais qui tu es !

Si pour le galéniste une matière première est tout ingrédient entrant dans la composition d’un médicament ou d’un cosmétique, pour Sherlock Holmes ce terme correspond à tout objet pouvant lui permettre de dresser un portrait très exact de son possesseur.

C’est ainsi qu’un vieux chapeau devient matière première de choix pour le célèbre détective. Ce « melon cabossé » lui révèle plein de secrets. « Nous nous trouvons en présence d’un gentleman qui mène une existence sédentaire, qui sort peu, qui n’est plus en bonne forme physique, qui est entre deux âges, et dont les cheveux grisonnent. Pour les cheveux, il les a fait couper ces jours-ci, et il les discipline d’habitude avec du cosmétique. » Pour mettre le point final à cette démonstration, il a suffi à Sherlock Holmes de sortir sa loupe pour découvrir de petits cheveux collés à la doublure du chapeau. Ces cheveux « sentent distinctement le cosmétique ».

Ce cosmétique, c’est tout simplement une brillantine, c’est-à-dire une préparation composée de différentes substances lipophiles (huiles végétales plus ou moins hydrogénées ou dérivés issus de la pétrochimie) et de consistance plus ou moins épaisse. La brillantine, qui colle les cheveux et les fait scintiller, se distingue, du point de vue de sa composition, de la bandoline, une préparation fixante pour cheveux. La brillantine est autant lipophile que la bandoline est hydrophile... (https://www.regard-sur-les-cosmetiques.fr/nos-regards/josephine-baker-chanteuse-et-icone-cosmetique-157/).

Le célèbre Sherlock Holmes nous déçoit terriblement. Reconnaître des traces de brillantine dans un chapeau melon est élémentaire. Reste à connaître la composition exacte de ce cosmétique... Huile de ricin, vaseline ? Quel colorant permet de rendre attractif ce produit très en vogue ? Quel parfum est utilisé pour envoûter le consommateur ? Quelques expériences en laboratoire auraient suffi au maître de l’art de la déduction pour faire parler le chapeau et lui sortir du melon la marque exacte de la brillantine préférée de notre inconnu ! De là, on aurait pu remonter directement au coiffeur dispensateur de ce bon produit et par là-même au client en question. Au lieu de cela, il a fallu passer une petite annonce dans le journal pour retrouver celui qui se baladait dans les rues de Londres un chapeau sur la tête et une oie bien grasse sous le bras !

Un grand merci à Jean-Claude A. Coiffard, poète et plasticien, pour cet irrésistible Conan Doyle dit à l’oie et au melon…

Bibliographie

1 Doyle C., L’escarboucle bleue in Un scandale en bohême, Le livre de poche, 2016, 213 pages

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