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Crise de la Covid-19, la ruée vers les cosmétiques !

> 07 avril 2020

Crise de la Covid-19, la ruée vers les cosmétiques !

Durant cette crise sanitaire que constitue la pandémie de Covid-19, le papier toilette est présenté comme le produit-phare, vénéré par les consommateurs. Cet amour soudain et profond pour les précieux rouleaux s’observe à l’échelle planétaire.1 Le kit de survie consiste, de nos jours, en l’association de gel hydro-alcoolique pour se désinfecter les mains, de papier WC pour conserver sa dignité jusqu’au bout... du rouleau et de pâtes pour ne pas mourir de faim à l’heure où les déplacements sont excessivement restreints,2 pâtes, qui par parenthèse, permettent d’effectuer un régime « sans résidus » (entendre par cette périphrase avec le minimum de selles) Certains auteurs parlent, non sans humour, de véritables « pulsions d’achat ». Eléonore Solé pour Futura Santé propose différentes explications à ce phénomène. Selon certains chercheurs, l’attrait pour cet article viendrait d’un besoin « de contrôle » de la situation. A l’heure, où l’on ne contrôle plus rien et où l’on se voit obligé de rester confiné (donc de subir une situation qui n’a pas été choisie), l’achat de papier toilette peut être considéré comme un acte sécurisant ; du moins, dans les toilettes, on ne risque pas de manquer ! Le papier toilette qui permet de « contrôler l’hygiène et la propreté »3 constituerait donc une sorte de dernier bastion quant à la conservation de l’estime de soi. D’autres chercheurs font remarquer que cet article est relativement bon marché (donc ne conduit pas à la ruine à une époque où il n’est sans doute pas nécessaire de gaspiller son argent), volumineux (donc son absence sur les rayons se fait nettement remarquer contrairement à d’autres petits articles de taille plus modeste) et multi-usage (beaucoup de gens l’utilisent indifféremment pour se moucher, nettoyer une petite surface...).4

S’il est amusant de discourir à l’infini sur ces rouleaux de papier WC qui ont l’avantage de nous faire sourire à l’heure où le ton adopté est, en règle générale, plutôt sérieux, il est également intéressant de se poser la question de la consommation en matière de produits d’hygiène, en particulier et de produits cosmétiques de manière générale.

Le n°893 de Cosmétiquemag hebdo de mars 2020 a eu la bonne idée de faire le point sur la question et nous fournit des chiffres parlants.5

Le secteur cosmétique en GMS se porte parfaitement bien. Les ventes sont en hausse et, semaine de confinement après semaine de confinement, on voit une confirmation de cette hausse qui ne doit rien au hasard. Par rapport aux semaines qui précèdent et par rapport aux chiffres relevés en 2019, le chiffre d’affaires correspondant aux différentes catégories de cosmétiques est en hausse continuelle pour l’ensemble des produits, à l’exception des coffrets de maquillage.

Les catégories les plus florissantes sont très logiquement les catégories permettant de répondre aux élémentaires besoins d’hygiène. Shampooings et après-shampooings, produits pour le bain et la douche, produits d’hygiène intime, savons, dentifrices et eau de Cologne accusent les plus jolies progressions (progression proche ou supérieure à 100 % selon les produits). L’eau de Cologne a vraisemblablement été perçue par certains consommateurs comme un moyen non pas de se parfumer à l’ancienne, mais bien de se désinfecter à l’ancienne.

Les produits solaires explosent littéralement avec une progression de 300 %, ce qui laisse penser que pour une fraction de la population (celle vraisemblablement qui a migré vers les stations balnéaires ou plus largement vers les résidences secondaires) confinement rime avec exposition solaire... A moins que les conseils distillés par certains journaux et qui affirment la nécessité de se protéger des UV à l’intérieur des maisons ne soient tombés dans la bonne (ou plutôt mauvaise si l’on s’en réfère à notre avis) oreille.6

Les produits de maquillage des lèvres, des yeux et du visage (progression de l’ordre de 40 % pour chaque segment) se portent bien... Leur belle progression conforte l’idée émise par Leonard Lauder selon laquelle le rouge à lèvres est un produit cosmétique qui se complait dans la crise... économique7 ou sanitaire est-il temps d’ajouter !

On l’aura compris, le phénomène de stockage du papier toilette n’est que la partie visible de l’iceberg de la consommation. En souterrain, beaucoup moins visibles, des produits de première nécessité sont également achetés de manière plus ou moins compulsive, afin de ne pas manquer au cas où... le confinement serait amené à durer... au cas où les contrôles visant à vérifier que les déplacements sont justifiés seraient accrus... au cas où les matières premières nécessaires pour fabriquer ces produits indispensables viendraient à manquer. Pas de panique, à ce niveau, l’industrie cosmétique est prête à relever le défi !

Reste à utiliser tous ces produits dans les meilleures conditions, à ne pas les gaspiller. Le confinement a abouti le plus souvent au regroupement des familles dispersées qui se voient obligées, bon gré mal gré, de cohabiter ensemble, à l’ancienne.

Afin d’éviter comme ce qui passe dans la famille de Boule et Bill, d’énerver les uns et les autres rappelons qu’un tube de dentifrice se respecte. On le rebouche avec précaution lorsqu’on l’a utilisé ; on le stocke toujours au même endroit afin de le retrouver aisément et surtout on ne mord pas dedans à pleines dents, même si l’on est affamé !8

Bibliographie

1 https://www.lemonde.fr/big-browser/article/2020/03/23/covid-19-dans-le-monde-la-fievre-du-stockage-et-une-ruee-sur-le-papier-toilette_6034158_4832693.html

2 ttps://www.courrierinternational.com/article/opinion-coronavirus-vous-navez-plus-de-papier-toilette-tant-mieux

3 https://www.pourquoidocteur.fr/Articles/Question-d-actu/31953-Confinement-d-ou-vient-peur-manquer-de-papier-toilette

4 https://www.futura-sciences.com/sante/breves/coronavirus-covid-19-ce-besoin-urgent-acheter-papier-toilette-2162/

5 https://fr.calameo.com/read/0061767626594cb99a46a

6 https://www.regard-sur-les-cosmetiques.fr/nos-regards/non-non-et-non-pas-de-creme-solaire-ou-de-creme-affichant-un-spf-a-la-maison-1402/

7 https://www.regard-sur-les-cosmetiques.fr/nos-regards/le-rouge-a-levres-le-cosmetique-qui-aime-trop-la-crise-1376/

8 Roba J. Bill est maboul, Dupuis, 2008, 46 pages

 

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