> 03 décembre 2024
Alors que certains boivent leur urine ou se l’appliquent sur la peau en matière de soins de beauté,1 d’autres souffrent d’une dermatite suite au contact de leur peau avec l’urine (ou les selles). En matière (!!!) d’incontinence urinaire, on voudrait le beurre, l’argent du beurre et une fermière non incontinente sur les genoux. Les produits recherchés devraient nettoyer, isoler, protéger, hydrater tout en étant peu coûteux, faciles à appliquer… Il y a des limites tout de même à l’inventivité ! Ce sont ces limites que nous pointons du doigt aujourd’hui !
Chez les personnes âgées faisant l’objet de soins à domicile, le pourcentage annoncé est 46 !2 En milieu hospitalier, on avance le chiffre de 27 %.3 Une incontinence urinaire qui touche les personnes de plus de 60 ans et qui présente un caractère de gravité chez les personnes grabataires en particulier.
L’incontinence urinaire et/ou fécale peut se traduire par la survenue d’une dermatite associée à l’incontinence ou dermatite périnéale,4 qui se caractérise par un érythème plus ou moins bulleux, un œdème, une érosion, la survenue d’une infection secondaire.2
On conseille un lavage du périnée avec un produit « doux »,5 un syndet (et non du savon, trop irritant),6 afin de permettre, au maximum, de limiter le temps de contact de la peau avec l’urine.4 Un lavage régulier, si possible !
On conseille l’application d’un cosmétique hydratant, qui laisse un film protecteur à la surface de la peau. Des crèmes barrière qui, selon le cas, sont commercialisées sous un statut de cosmétique ou de dispositif médical.7 Des crèmes qui contiennent souvent de l’oxyde de zinc (environ 30 %)8 ou des silicones9 ou de la vaseline,10 associés à des actifs divers comme le miel, par exemple.11 Également des produits à base de polymère (dérivés acryliques) à caractère hydrofuge.12,13
Il est sans doute intéressant de ne pas se contenter d’utiliser un seul ingrédient actif ; en effet, une publication de 2005 montre que la vaseline permet d’isoler la peau des substances irritantes et d’éviter la macération, que la silicone (diméthicone) permet d’hydrater la peau, tout en exerçant un effet barrière (jugé modeste), que l’oxyde de zinc est le champion en matière d’effet isolant vis-à-vis des agents irritants mais que son pouvoir hydratant est loin d’être remarquable.14 Des associations s’avèrent donc indispensable !
Des serviettes hygiéniques absorbantes sont également, traditionnellement, utilisées afin de limiter le contact entre l’urine (ou les selles) et la peau.15 Celles-ci peuvent contenir des antiseptiques permettant de limiter le développement de la flore microbienne et par là-même la production d’ammoniac.16
Une prise en charge médicamenteuse à base d’anti-inflammatoire et d’antifongique est également parfois nécessaire dans les cas les plus graves.5
Ce qui ressort des publications sur le sujet, c’est la notion de coût. On cherche à trouver la solution optimale en matière application (il faut un produit qui s’applique bien et se retire bien, un produit efficace, qui ne nécessite pas de ré-applications fréquentes).17
Le produit idéal est unique, il nettoie et forme une barrière en même temps, afin de réduire le temps des soins de nursing. Un produit qui ne pique pas à l’application, est transparent et permet donc de suivre l’évolution de l’état de la peau, sans avoir à retirer le produit. Un produit qui n’adhère pas à la peau outre mesure, qui permet d’éviter la survenue de dermatite.18 Une sorte de mouton à 5 pattes qu’il nous semble difficile de trouver sur le marché, puisque l’oxyde de zinc, très efficace, se présente, généralement, sous la forme de pâte blanche, donc opaque, pas toujours très facile à ôter !
Comme produit idéal nous est présenté la lingette nettoyante,19 mais on peut douter toutefois de son effet protecteur !
Entre l’érythème fessier du bébé et la dermatite associée à l’incontinence du vieillard, il n’y a pas de différence. Si… Une toutefois… le soin apporté. Chez le nourrisson, la maman est là qui veille au grain. Chez le vieillard, plus de maman qui veille sur la bonne santé des fesses. Des soignants, qui travaillent à la chaîne et ne disposent que de peu de temps pour réaliser les soins élémentaires.
Un défi cosmétique à relever. Trouver le produit idéal. Trouver le mouton à 5 pattes !
1 L’urine comme cosmétique, l’upcycling poussé à bout ! | Regard sur les cosmétiques
2 Beeckman D, Van Damme N, Schoonhoven L, Van Lancker A, Kottner J, Beele H, Gray M, Woodward S, Fader M, Van den Bussche K, Van Hecke A, De Meyer D, Verhaeghe S. Interventions for preventing and treating incontinence-associated dermatitis in adults. Cochrane Database Syst Rev. 2016 Nov 10;11(11):CD011627
3 Gray M. Incontinence-related skin damage: essential knowledge. Ostomy Wound Manage. 2007 Dec;53(12):28-32
4 Gray M. Optimal management of incontinence-associated dermatitis in the elderly. Am J Clin Dermatol. 2010;11(3):201-10
5 Gray M, Beeckman D, Bliss DZ, Fader M, Logan S, Junkin J, Selekof J, Doughty D, Kurz P. Incontinence-associated dermatitis: a comprehensive review and update. J Wound Ostomy Continence Nurs. 2012 Jan-Feb;39(1):61-74
6 Beeckman D, Schoonhoven L, Verhaeghe S, Heyneman A, Defloor T. Prevention and treatment of incontinence-associated dermatitis: literature review. J Adv Nurs. 2009 Jun;65(6):1141-54
7 Holroyd S, Graham K. Prevention and management of incontinence-associated dermatitis using a barrier cream. Br J Community Nurs. 2014 Dec;Suppl Wound Care:S32-8
8 Gunasegaran N, Ang SY, Ng YZ, Lee NES, Agus N, Lee CW, Ong CE, Mostafa SS, Aloweni F. The effectiveness of a hydrocolloid crusting method versus standard care in the treatment of incontinence-associated dermatitis among adult patients in an acute care setting: A randomised controlled trial. J Tissue Viability. 2023 May;32(2):171-178
9 Dykes P, Bradbury S. Comparing the effectiveness and wash-off resistance of skin barrier creams: a healthy volunteer study. J Wound Care. 2017 Sep 2;26(9):552-557
10 Matar H, Larner J, Viegas V, Kansagra S, Atkinson KL, Shetage S, Skamarauskas JT, Theivendran B, Goldman VS, Chilcott RP. Evaluation of a new topical skin protectant (RD1433) for the prevention and treatment of incontinence-associated dermatitis. Cutan Ocul Toxicol. 2017 Sep;36(3):211-219
11 Woodward S. Moisture-associated skin damage: use of a skin protectant containing manuka honey. Br J Nurs. 2019 Mar 28;28(6):329-335
12 Bliss DZ, Zehrer C, Savik K, Smith G, Hedblom E. An economic evaluation of four skin damage prevention regimens in nursing home residents with incontinence: economics of skin damage prevention. J Wound Ostomy Continence Nurs. 2007 Mar-Apr;34(2):143-52
13 Brennan MR, Milne CT, Agrell-Kann M, Ekholm BP. Clinical Evaluation of a Skin Protectant for the Management of Incontinence-Associated Dermatitis: An Open-Label, Nonrandomized, Prospective Study. J Wound Ostomy Continence Nurs. 2017 Mar/Apr;44(2):172-180
14 Hoggarth A, Waring M, Alexander J, Greenwood A, Callaghan T. A controlled, three-part trial to investigate the barrier function and skin hydration properties of six skin protectants. Ostomy Wound Manage. 2005 Dec;51(12):30-42
15 Dykes P, Bradbury S. Incontinence pad absorption and skin barrier creams: a non-patient study. Br J Nurs. 2016 Dec 8;25(22):1244-1248
16 Forsgren-Brusk U, Yhlen B, Blomqvist M, Larsson P. Method for Bacterial Growth and Ammonia Production and Effect of Inhibitory Substances in Disposable Absorbent Hygiene Products. J Wound Ostomy Continence Nurs. 2017 Jan/Feb;44(1):78-83
17 Baatenburg de Jong H, Admiraal H. Comparing cost per use of 3M Cavilon No Sting Barrier Film with zinc oxide oil in incontinent patients. J Wound Care. 2004 Oct;13(9):398-400
18 Muresan M, Muresan S, Brinzaniuc K, Sala D, Neagoe R. Durability of an Advanced Skin Protectant Compared With Other Commercially Available Products in Healthy Human Volunteers. Wounds. 2018 Sep;30(9):310-316
19 Baadjies R, Karrouze I, Rajpaul K. Using no-rinse skin wipes to treat incontinence-associated dermatitis. Br J Nurs. 2014 Nov;23 Suppl 20:S22-8
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