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Cosmétique bio versus cosmétique conventionnel, bien savoir pour pouvoir choisir !

> 26 mars 2020

Cosmétique bio versus cosmétique conventionnel, bien savoir pour pouvoir choisir !

Depuis le début des années 2000 on constate une montée en puissance des cosmétiques bio, ces cosmétiques qui ne possèdent pas de définition réglementaire propre, le Règlement (CE) N°1223/2009 ne connaissant que le cosmétique « tout court » et pas le cosmétique « bio », pas plus d’ailleurs que le cosmétique « naturel » ou le « dermocosmétique ».1 Ce sont donc des associations comme par exemple Cosmébio (« le label des vrais cosmétiques bio ») pour la France,2 BDIH (certified natural cosmetics) pour l’Allemagne,3 Natrue pour le monde entier (cette association basée à Bruxelles voit plus grand que ses consœurs et accueille des membres de pays aussi variés que le Sri Lanka ou la Suisse)4 qui rédigent des cahiers des charges en matière de « naturalité », de pourcentage d’ingrédients d’origine biologique, d’ingrédients interdits.

Les sociétés qui commercialisent des produits bio ont développé une communication basée sur la peur d’un certain nombre d’ingrédients, pourtant tout à fait autorisés par le Règlement (CE) N°1223/2009 modifié. Les mentions « sans » (« sans paraben, sans silicone, sans dérivés de pétrole, sans PEG, sans sulfate ») se sont multipliées à un point tel que les autorités européennes ont été obligées de rédiger un Règlement spécifique (c’est le Règlement (UE) n°655/2013) concernant les allégations, c’est-à-dire les éléments de communication pouvant être mis en avant par les marques. Ce document rappelle que le cosmétique doit être conforme à la réglementation (c’est normal, c’est le minimum). Les critères à respecter sont la véracité (les allégations doivent reposer sur des « faits vérifiables », des « faits probants »), la sincérité, l’équité afin de permettre aux consommateurs « un choix en connaissance de cause ». En matière d’équité, il est écrit noir sur blanc : « Les allégations relatives aux produits cosmétiques doivent être objectives et ne peuvent dénigrer ni la concurrence ni des ingrédients utilisés de manière légale. » Cette mention va donc, on ne peut plus clairement, à l’encontre des mentions « sans » apposés à tort et à travers.

En 2013 on aurait dû voir la disparition des mentions « sans » du fait d’un règlement qui tape du poing sur la table. Et pourtant non ! Une partie de l’industrie cosmétique qui réalise son chiffre d’affaires en surfant sur des peurs fait la sourde oreille et continue à agiter les esprits, tant et si bien que le 1er juillet 2019, l’Autorité de Régulation Professionnelle de la Publicité (ARPP) a publié une « Recommandation produits cosmétiques V8 » qui est entrée en vigueur le jour-même (ben oui, évidemment, le Règlement (UE) N°655/2013 qui traitait du même sujet était déjà censé être appliqué depuis le 11 juillet 2013 !) qui enfonce le clou en renvoyant vers ledit règlement.5

La question importante est de savoir si un ingrédient naturel et issu de l’agriculture biologique est meilleur qu’un ingrédient de synthèse. La réponse est évidemment « non ». Les ingrédients utilisés dans le domaine cosmétique répondent à des critères de pureté spécifiques. Il vaudra donc mieux utiliser de l’allantoïne de synthèse à un pourcentage suffisant (0,5 à 1,0 %) pour observer un effet apaisant, plutôt qu’un extrait de grande consoude (sa teneur en allantoïne variant de 0,7 à 2,5 %) ou qu’un extrait de soja qui n’en contient que 0,03 %.6 En ce qui concerne ce que certains appellent la nitrocellulose biosourcée, il est important de rétablir la vérité. Cette matière première de synthèse, incorporée dans les vernis à ongles pour son effet filmogène, est obtenue, bien évidemment, à partir de cellulose (son nom l’indique), un ingrédient naturel, mais doit obligatoirement passée dans le creuset du chimiste pour obtenir ses qualités cosmétiques.

Ajoutons encore qu’il est aberrant d’opposer ingrédient naturel et ingrédient de synthèse dans la mesure où il existe dans la nature des plantes très toxiques et d’ailleurs interdites d’emploi en cosmétologie et, qu’en revanche, il est possible de synthétiser des ingrédients très utiles et totalement inoffensifs.

Rappelons également que le savon, matière première et cosmétique chers aux sociétés bio, est issu d’une réaction chimique, la réaction de saponification. Il s’agit donc d’un ingrédient de synthèse !

Pour terminer ajoutons que les produits de protection solaire appartenant aux catégories « haute » et « très haute protection » ne sont pas des produits qui peuvent être formulés dans de bonnes conditions avec les seuls et uniques filtres autorisés par les chartes bio, à savoir le dioxyde de titane et/ou l’oxyde de zinc. Les tests que nous effectuons dans notre laboratoire depuis 2004 nous le prouvent très régulièrement.

Alors bio, naturel ou conventionnel ? La réponse se trouve au fil des Regards. Tous les cosmétiques ne se valent pas. Pour nous, les meilleurs cosmétiques sont naturellement conventionnels.

Bibliographie

1 https://www.regard-sur-les-cosmetiques.fr/nos-regards/les-dermocosmetiques-a-quand-une-norme-iso-771/

2 https://www.cosmebio.org/fr/

3 https://www.kontrollierte-naturkosmetik.de/e/index_e.htm

4 https://www.natrue.org/fr/our-members/

5 https://www.arpp.org/nous-consulter/regles/regles-de-deontologie/recommandation-produits-cosmetiques-v8/#toc_0_10

6 https://www.regard-sur-les-cosmetiques.fr/nos-regards/l-allantoine-un-bon-petit-soldat-au-service-des-cosmetiques-822/

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