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Cachet anti-allergique pour trio diabolique !

> 11 octobre 2020

Cachet anti-allergique pour trio diabolique !

La nuit qui ne finit pas est un roman d’Agatha Christie assez original.1 L’atmosphère y est lourde ; les personnages mis en scène, Mike, Greta et Ellie, forment un trio diabolique qui n’est pas sans rappeler celui affectionné par le célèbre tandem Boileau-Narcejac.2 Michael Rogers, Mike pour les intimes, a l’envie de la réussite chevillée au corps. La vie ne vaut d’être vécu si l’on n’obtient pas très vite tout ce que l’on rêve de posséder. Pour Mike, c’est simple ; une belle maison construite par un architecte de talent, Rudolf Santonix par exemple, est le gage d’une vie qui débute sous de bons auspices. Pour atteindre cette félicité, une seule solution, rencontrer une jeune fille riche, l’épouser, faire bâtir la maison de ses rêves… Dans ce roman atypique où l’on ne croise ni Hercule Poirot, ni Miss Marple, il est peu question de cosmétiques. Les médicaments, en revanche, occupent une place de choix. Ceux-ci semblent être plus nuisibles à la santé que bénéfiques.

Les gens riches, des gens stressés et malades

Les gens riches sont présentés ici comme des gens cafardeux qui vivent dans la peur de la crise cardiaque et qui ingurgitent à longueur de journée une « kyrielle de pilules ». « Les femmes riches sont le plus souvent mal soignées », nous dit-on. Trop de « poudres, de pilules, de remontants, de tranquillisants » leur sont administrés à la moindre occasion. Le Dr Shaw est d’avis de balancer tout cela aux orties (« Balancez-moi tout ça à la poubelle »)

Les deux catégories d’épouses d’hommes riches

Les femmes de la haute société appartiennent, selon Mike, à deux catégories ; d’une part les « blondes aux jambes interminables », peu portées sur la fidélité et d’autre part des « créatures hideuses », fidèles par manque d’occasions favorables. La vertu, pour Mike, se mesure à la longueur des gambettes.

Ellie, la « pauvre petite fille riche »

Ellie Guteman est une jeune fille fluette, aux « cheveux châtain doré, couleur feuilles d’automne ». La rencontre entre Ellie et Mike se fait au lieu dit « L’arpent du gitan », un site maudit si l’on en croit les histoires qui circulent dans le pays à son sujet. La vie d’Ellie est jusque-là morose, enfermée qu’elle est dans une prison dorée. Une belle-mère aux « cheveux teints » et des oncles trop bienveillants veillent sur ses fréquentations. Mike n’est pas du genre à plaire à ces gens-là. C’est sûrement ce qui fait tout son charme ! En matière de santé, Ellie est plus costaude qu’on ne pourrait le penser. Seule ombre au tableau, une allergie au séneçon et aux chevaux. Heureusement, « les médecins ont des traitements formidables pour les différentes sortes d’allergies ». Un cachet « du plus bel orange » pris chaque matin et notre belle écuyère voit la vie en rose.

Greta, la grande jeune fille pauvre

Greta Andersen, l’amie d’Ellie, est « belle », « grande et blonde ». Son « type nordique, avec le teint clair et les cheveux blonds comme les blés » (une « étincelante chevelure dorée »), ses yeux « d’un bleu clair lumineux » et sa silhouette « parfaite » lui donnent toutes les caractéristiques d’un mannequin à la mode. Greta possède une beauté magnétique ; tout se met à tourner autour d’elle dès lors qu’elle pénètre dans une pièce. Ellie et Mike sont tout autant envoûtés par cette femme qui dirige tout et tous avec une autorité naturelle indéniable.

Une superbe demeure avec une plage privée

Mike n’est pas partageur. Une maison magnifique, une plage privée « notre plage »… tout doit se décliner selon un pronom possessif, ma, mon, mes, notre, nos !  Allez se dorer sur la plage à côté des autres, comme un pauvre malheureux, il n’en est pas question. La plage, ce sera une plage privée, un point c’est tout. (« Mille fois mieux que sur une plage où des centaines de corps rôtissent au soleil tout au long du rivage ») Lorsque Mike voit sa maison sortir de terre, une vague de plaisir l’envahit : « Quand je la vis terminée, quelque chose jaillit à l’intérieur de moi, si fort qu’il me sembla que cela allait sourdre par tous les pores de ma peau. »

La nuit qui ne finit pas, atmosphère, atmosphère…

Lors d’une une interminable nuit qui ne finit, Agatha Christie nous tient en éveil ; une menace rôde autour de la jolie maison de L’arpent du gitan. L’atmosphère est lourde, les nuages s’amoncellent au-dessus de la jolie tête d’Ellie. Esther, la gitane, l’a prédit… nul ne sort indemne de ce lieu maudit.

Un grand merci à Jean-Claude A. Coiffard, poète et plasticien, pour l'illustration du jour.

Bibliographie

1 Christie A. La nuit qui ne finit pas, Eds du masque, Paris, 2002, 252 pages

2 https://www.regard-sur-les-cosmetiques.fr/nos-regards/le-parfum-de-celle-qui-n-etait-plus-un-coty-bon-marche-1602/

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