Nos regards
Ça a l’apparence d’un cosmétique, la couleur d’un cosmétique, l’odeur d’un cosmétique… mais ce n’est pas un cosmétique…

> 10 mai 2017

Ça a l’apparence d’un cosmétique, la couleur d’un cosmétique, l’odeur d’un cosmétique… mais ce n’est pas un cosmétique… Comme nous l’avons évoqué dans le Regard « Au fait, c’est quoi un cosmétique ? », un cosmétique ne peut être présenté comme possédant des propriétés curatives ou préventives à l’égard des maladies humaines. On se rappellera à toutes fins utiles que la notion de maladie ne renvoie aucunement à un critère de gravité et de ce fait, un banal petit rhume ne relève pas du soin par un cosmétique…

Pourtant l’industrie cosmétique est très tentée par de tels messages à destination des prescripteurs et des utilisateurs concernés. Plusieurs possibilités se présentent alors à elle.

Première attitude : transgresser la réglementation. C’est bien sûr la solution la plus critiquable et pourtant les exemples abondent : les cosmétiques RoyeR à base de bave d’escargot « préviennent efficacement et réduisent les vergetures, l'acné, les cicatrices et autres problèmes de peau », le savon recette d’Alep Floressance est « utile pour les problèmes de peau : acné, eczéma, irritations de la peau, peau grasse, points noirs, psoriasis... », le Baume respiratoire So Bio étic « est spécialement conçu pour lutter contre les désagréments de l'hiver. Enrichi en camphre et menthol bio, son odeur libère le nez », l’Huile de massage aux huiles essentielles, enrichie à la racine d’harpagophytum Algovital est à utiliser « 2 à 3 fois par jour en massage sur les zones douloureuses », car « idéale pour les zones douloureuses (dos, nuque, articulation) »…

Deuxième attitude : choisir de positionner le produit « dispositif médical » (DM) et non plus « cosmétique ». Cette option qui paraît, quand même encore assez marginale, a l’air de séduire un certain nombre de laboratoires cosmétiques.

Rappelons que le Règlement (UE) 2017/745 du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2017 définit le «dispositif médical» comme « tout instrument, appareil, équipement, logiciel, implant, réactif, matière ou autre article, destiné par le fabricant à être utilisé, seul ou en association, chez l'homme pour l'une ou plusieurs des fins médicales précises suivantes: — diagnostic, prévention, contrôle, prédiction, pronostic, traitement ou atténuation d'une maladie, — diagnostic, contrôle, traitement, atténuation d'une blessure ou d'un handicap ou compensation de ceux-ci, — investigation, remplacement ou modification d'une structure ou fonction anatomique ou d'un processus ou état physiologique ou pathologique, — communication d'informations au moyen d'un examen in vitro d'échantillons provenant du corps humain, y compris les dons d'organes, de sang et de tissus, et dont l'action principale voulue dans ou sur le corps humain n'est pas obtenue par des moyens pharmacologiques ou immunologiques ni par métabolisme, mais dont la fonction peut être assistée par de tels moyens ».

C’est manifestement la société Spirig qui a été la pionnière dans le domaine avec le lancement du produit de protection solaire Daylong actinica (devenu depuis Actinica lotion) suivi depuis sur le même type de créneau par Sinclair (Kelo-cote UV) et très récemment Avène (SunsiMed).

On trouve un seul anti-âge avec un statut de DM, Matricium (Bioderma) et un traitement adjuvant de l’eczéma (Dexiane, Ducray).

Si l’on comprend bien la stratégie marketing et l’intérêt que peuvent avoir les laboratoires cosmétiques à utiliser le statut de dispositif médical pour leur(s) produit(s), il est aussi bien évident que cela génère de la confusion chez les consommateurs et les professionnels de santé. Pourrait se dessiner alors un paysage cosmétique à plusieurs vitesses. Si l’on prend l’exemple précis des produits de protection solaire cohabiteraient ainsi au niveau mondial des médicaments, des cosmétiques et des dispositifs médicaux… statuts différents… mais composition semblable, a minima très analogue… de quoi déboussoler l’utilisateur lambda !


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