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Au fait, c’est quoi un cosmétique ?

> 22 mars 2017

Au fait, c’est quoi un cosmétique ?

Pour le dictionnaire Larousse, « cosmétique » est un « adjectif et nom masculin », désignant « toute préparation non médicamenteuse destinée aux soins du corps, à la toilette, à la beauté ».

En fait, ce n’est pas de cela dont nous voulons parler ici, mais bien plutôt de ce que nous en dit la règlementation en vigueur dans l’Union Européenne.

Dans ce contexte, la première définition structurée et complète du cosmétique date de la loi Veil de 1975, rapidement reprise dans la Directive 76/768/CEE.

Pendant 40 ans, cette Directive fondatrice va subir des modifications jusqu’à aboutir au Règlement (CE) N°1223/2009, entré en vigueur en juillet 2013.

Au Chapitre 1 – Article 2 de ce dernier, on peut lire que l’on entend par « produit cosmétique», toute substance ou tout mélange destiné à être mis en contact avec les parties superficielles du corps humain (épiderme, systèmes pileux et capillaire, ongles, lèvres et organes génitaux externes) ou avec les dents et les muqueuses buccales en vue, exclusivement ou principalement, de les nettoyer, de les parfumer, d’en modifier l’aspect, de les protéger, de les maintenir en bon état ou de corriger les odeurs corporelles ».

Cette définition, fort claire au demeurant, appelle un certain nombre de remarques.

Tout d’abord, un cosmétique est défini comme étant une substance (espèce chimique pure telle que du talc, une eau thermale…) – ce qui est très rarement le cas - ou un mélange (c’est-à-dire une association de matières premières entre elles, produit de l’opération de formulation).

La suite répond à la question « Où ? », le produit étant « destiné à être mis en contact avec les parties superficielles du corps humain ». Son usage est donc topique. Un produit injecté, avalé… (MEME SI SA FINALITE EST ESTHETIQUE) ne pourra en aucun cas être un cosmétique. On peut prendre comme exemples le cas des produits destinés à traiter les rides comme le Botox qui est un médicament et les matériaux de comblement qui sont des dispositifs médicaux ou encore les produits présentés sous forme de gélules et destinés à hydrater la peau ou à renforcer les cheveux ou les ongles et qui sont des médicaments ou des compléments alimentaires.

On remarquera qu’il n’est question que du corps humain. En conséquence, un produit destiné à l’hygiène des chiens, des chats, des chevaux… ou au soin de leur pelage n’est pas un cosmétique. Il aurait peut-être été judicieux que le législateur profite de la refonte qu’a constituée la rédaction du Règlement pour pallier à cette carence.

Nous arrivons à la partie de la définition qui répond à la question « Pourquoi ? » Le recours à un cosmétique s’opère « en vue exclusivement ou principalement de… ». Pendant longtemps (c’est-à-dire à peu près de l’Antiquité à la fin du XXe siècle), on est resté dans le champ du « exclusivement » : un rouge à lèvre maquillait, un savon lavait, une crème hydratait ! Depuis une vingtaine d’années et avec une accélération nette à l’heure actuelle, on a basculé vers le « principalement » : le virage a été pris avec les BB crèmes pour aboutir au GG crèmes (mais où s’arrêteront ils ???). Ce n’est plus une seule action qui est revendiquée mais une liste d’actions de plus en plus longue.

Vient enfin une série de verbes qui correspondent à des actions précises et répétées quotidiennement, tout au moins pour la majorité des gens, à savoir nettoyer (sont concernés les produits d’hygiène tels que savons, shampooings, dentifrices…), parfumer (parfums, eaux de toilette, eaux de Cologne…), modifier l’aspect (maquillage), protéger (crèmes pour les mains, produits de protection solaire), maintenir en bon état (crèmes pour les mains, crèmes anti-rides…) ou corriger les odeurs corporelles (déodorants et anti-transpirants). Cette partie de la définition est extrêmement intéressante, puisqu’elle permet d’établir une barrière infranchissable avec le médicament, car il n’est nullement évoqué une quelconque activité thérapeutique : un produit destiné à traiter l’acné, l’eczéma, le psoriasis… à faciliter l’endormissement ou à améliorer la respiration est, par définition, un médicament.

Il serait bon que TOUS les industriels s’en souviennent ; cela éviterait aux amnésiques un certain nombre de déboires. C’est le cas de la société Promicea qui vient d’être mise en demeure par l’Ansm de retirer du marché deux de ses produits, Neostem sérum et Neostem pocket lift, dans la mesure où ils sont formulés à l’aide de deux substances médicamenteuses, la pravastatine et l’alendronate de sodium (Décision du 13 mars 2017).

Mais revenons aux différentes fonctions d’un cosmétique. Dans le cas très particulier des produits de protection solaire (PPS), ce dont on veut protéger la peau, ce sont des effets néfastes des UV, et par là-même des cancers cutanés. Or un cancer cutané est une maladie, bien évidemment. A la question « Un cosmétique peut-il prévenir une maladie ? », la réponse est clairement « Non ». Qu’à cela ne tienne, l’industrie cosmétique européenne a apporté une réponse que l’on peut juger peu satisfaisante : puisqu’un cancer cutané est une maladie et que prévenir une maladie est du ressort du médicament, mieux vaut n’en point parler ! On se bornera, dans le message marketing, à des allégations concernant la prévention de l’érythème (rougir de plaisir, n’est pas une maladie !), du vieillissement cutané (vieillir n’est pas une maladie, non plus) ou de l’apparition des taches (se teinter la peau n’est – toujours – pas une maladie !) Les Américains ont opté pour une attitude plus conforme au respect de leurs définitions respectives du médicament et du cosmétique en donnant un statut de médicament (OTC) aux PPS.

Alors malgré ses imperfections (sans doute) et ses lacunes (sûrement), on t’aime, définition du produit cosmétique !




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